Le temps des loups : la critique du film (1970)

Policier, Drame | 1h45min
Note de la rédaction :
5,5/10
5,5
Le temps des loups, l'affiche

Note des spectateurs :

Polar violent, Le temps des loups est un bel objet formel, mais qui peine pourtant à sortir des poncifs du genre. Inégal.

Synopsis : Alors qu’il prépare l’attaque d’un camion transportant des fonds, le gangster Dillinger tombe amoureux d’une femme fatale qu’il a rencontré dans un casino de la Côte d’Azur.

Une belle démonstration de virtuosité technique

Critique : Très en verve à la fin des années 60, le cinéaste italien Sergio Gobbi, depuis longtemps installé en France, développe une œuvre commerciale qui flirte sans cesse avec le cinéma d’exploitation, tout en ayant comme référence ultime les films hollywoodiens. Il n’est d’ailleurs pas interdit d’interpréter la fascination du personnage principal pour le gangster américain Dillinger comme une métaphore de celle de Sergio Gobbi pour un cinéma made in US.

Formaliste avant tout, Sergio Gobbi recherche l’efficacité à tout prix, à l’aide d’une caméra coup de poing très mobile qui peut être considérée comme la véritable star du Temps des loups (1970). Effectivement, le réalisateur tourne souvent caméra à l’épaule pour suivre chaque mouvement de ces truands frénétiques. Il ne rechigne pas non plus à multiplier les effets de travelling, de vues en plongée, tout en déformant parfois volontairement le son.

Une histoire peu crédible et jouée sans entrain

De ce déluge d’effets, le spectateur contemporain pourra retenir qu’il s’agit d’une réalisation travaillée et plutôt moderne. Malheureusement, cette attention maniaque envers la forme se fait constamment au détriment du fond. Ainsi, Sergio Gobbi ne parvient jamais vraiment à rendre crédible cette histoire d’amitié entre deux gamins qui jouaient au policier et au voleur dans la cour de récréation et continuent à se courir après plus de trente ans plus tard. L’un est devenu un bandit qui multiplie les casses sanglants et spectaculaires, tandis que l’autre est un flic un peu sentimental.

Le premier est incarné par un Robert Hossein qui maîtrise parfaitement son rôle de dur à cuire, tandis que le second est interprété par un Charles Aznavour un peu en retrait. A vrai dire, et même si l’on apprécie d’ordinaire le jeu intériorisé du chanteur, il ne convient pas vraiment au rôle et semble en constant décalage avec ce qu’il a à jouer.

L’ultra-violence de Bonnie and Clyde déteint sur le film de Gobbi

Toutefois, dans ce jeu du chat et de la souris, c’est finalement l’histoire d’amour entre le truand et la belle Virna Lisi qui emporte davantage le morceau. Dans ces moments, on sent nettement l’influence du Bonnie and Clyde (1967) d’Arthur Penn. Le film ultra-violent vient tout juste de sortir et l’on sent bien que Sergio Gobbi cherche à en retrouver l’ambiance et le charme. Si le long-métrage choque moins de nos jours, il est important de signaler que Le temps des loups apparaît désormais comme un film à la croisée des années 60, plus policées, et des années 70 avec sa violence plus crue. Dans le film de Gobbi, on sent nettement l’influence de la série B américaine (Don Siegel en ligne de mire, entre autres).

Le réalisateur échoue toutefois à sortir des archétypes du genre. Sa tentative d’explication psychanalytique ne tient absolument pas la route et il ne fait finalement que reproduire des schémas narratifs éculés. On ne retiendra in fine qu’une certaine violence et noirceur des sentiments humains, ainsi qu’une tentative audacieuse mais inaboutie de faire entrer le cinéma policier français dans une autre ère.

Un succès essentiellement provincial

Malgré un écho plutôt décevant sur la capitale, Le temps des loups a surtout connu un joli succès provincial, réussissant à cumuler plus de 1,2 million de spectateurs dans l’Hexagone. Ce joli score en a fait un nouveau succès dans la carrière déjà bien remplie de Robert Hossein, tout en étant l’un des plus beaux scores de celle de Charles Aznavour. Pourtant, le long-métrage est assez rapidement tombé dans l’oubli. Une VHS est sortie au début de l’ère de la vidéo, mais les éditeurs de DVD et de blu-ray semblent avoir fait l’impasse. Il est à nouveau visible de nos jours sur des plateformes de VOD dans une copie plutôt correcte.

La fiche du film sur le site Unifrance

Critique de Virgile Dumez

Les sorties de la semaine du 21 janvier 1970

Le temps des loups, l'affiche

© 1970 StudioCanal / Affiche : Michel Landi © ADAGP Paris, 2019. Tous droits réservés.

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