Triomphe mémorable de Jean-Paul Belmondo, Le professionnel, polar inégal, vaut surtout pour son interprétation et la superbe musique d’Ennio Morricone. Le reste n’est qu’emballage commercial efficace.
Synopsis : Issu de l’élite de l’armée française, Joss Beaumont est chargé d’exécuter le président du Malawi. Un contre-ordre tombe, la cible est devenue un ami de l’Etat. Pour l’empêcher de nuire, Beaumont est incarcéré, mais ne tarde pas à s’évader, décidé à mener à bien l’opération malgré l’opposition de sa hiérarchie.
Belmondo dans un thriller politique sur la Françafrique
Critique : Cette troisième collaboration successive entre Belmondo, Lautner et Audiard tranche sérieusement avec leurs précédentes tentatives (Flic ou voyou et Le guignolo). Chassant cette fois-ci sur les terres d’Alain Delon, le trio signe une œuvre sérieuse avec en toile de fond magouilles politiques, assassinats commandités et flics ripoux. A partir d’un sujet très ambitieux qui ose tout de même aborder les relations troubles entre la France et l’Afrique centrale, ainsi que l’utilisation par l’Etat d’exécuteurs des basses besognes de la République, Georges Lautner se contente de trousser un divertissement sympathique, mais ne cherche surtout pas à égratigner qui que ce soit.
La dictature africaine décrite ici est imaginaire et l’histoire de ce barbouze lâché par sa hiérarchie est suffisamment extravagante pour ne laisser aucun doute quant à son origine fictionnelle. Jean-Paul Belmondo incarne une fois de plus une figure d’anarchiste de droite, telle qu’on peut en trouver dans le cinéma d’Eastwood ou dans les poliziotteschi italiens des années 70.
Le professionnel, un film inégal réhaussé par la musique d’Ennio Morricone
D’une pureté intégrale malgré son métier de tueur professionnel, Belmondo n’obéit à aucune règle et s’oppose à sa hiérarchie, issue d’une société pervertie (flics ripoux, lesbienne forcément perverse, ministres incompétents). Cet aspect réactionnaire se retrouve dans les dialogues souvent drôles et percutants de Michel Audiard.
Parfois maladroit sur le plan formel – les premiers combats au corps à corps laissent clairement entrevoir les chorégraphies avec des coups de poings artificiels – Le professionnel a acquis son énorme popularité grâce à la précieuse collaboration d’Ennio Morricone qui compose ici une bande originale superbe.
Le thème principal (devenu un classique) donne une profondeur remarquable à ce long métrage pourtant réalisé sans aucun génie. A la fois angélique et d’une noirceur terrible, cette musique contribue nettement au plaisir que l’on prend encore aujourd’hui à regarder ce film pourtant assez bancal. Le musicien fut d’ailleurs nommé au César de la meilleure musique en 1982, sans pour autant obtenir la précieuse statuette.
Un triomphe qui conforte Belmondo dans son statut de star
A sa sortie, le public se rend en masse découvrir les aventures de leur héros préféré, alors que la critique est mitigée, à raison. Il faut dire que la campagne d’affichage fut imposante et volontairement agressive. Ainsi, le flingue dirigé vers le spectateur déborde du cadre de l’affiche, histoire que celui-ci comprenne la dimension sérieuse et violente du long-métrage qui doit se démarquer des précédentes comédies interprétées par l’acteur.
Triomphe absolu au box-office avec plus de 300 000 entrées sur Paris-périphérie en première semaine, ce hit a terminé sa carrière avec plus de 5 millions d’entrées sur toute la France. Ajoutons à cela les ventes exceptionnelles de la bande originale, l’exploitation VHS et les multi-rediffusions à la télévision, et vous aurez compris que Le professionnel marque une des plus lucratives opérations de Belmondo et René Chateau.
Critique du film : Virgile Dumez