Dans Le nouveau stagiaire, Nancy Meyers sort de sa retraite après 7 ans d’absence et passe à côté de son sujet sociétal (le retour à la vie active de nos aînés) pour favoriser la comédie de complicité intergénérationnelle. Robert De Niro y est comme anesthésié.
Synopsis : Ben Whittaker, un veuf de 70 ans s’aperçoit que la retraite ne correspond pas vraiment à l’idée qu’il s’en faisait. Dès que l’occasion se présente de reprendre du service, il accepte un poste de stagiaire sur un site Internet de mode, créé et dirigé par Jules Ostin.
Le nouveau stagiaire : bienveillance et sourires forcés
Critique : Après Les stagiaires, qui précipitait Owen Wilson et Vince Vaughn, deux quadragénaires au chômage, dans le monde high-tech (et édulcoré) de Google, pour un stage aux résonances d’un conflit des générations finalement bien peu éloquent, c’est au tour de la réalisatrice Nancy Meyers (Ce que veulent les femmes, avec Mel Gibson, et pléthore de comédies pour femmes de plus de 50 ans) de s’intéresser de près à la réinsertion des plus âgés de nos (in)actifs dans une société qui court après la cool-attitude.
Voici donc De Niro cachetonneur, dans le costume d’un pépé de 70 ans, tout dans la retenu pour une fois, qui retrouve la voie de l’entreprise contemporaine, via un programme de réinsertion des plus de 60 ans, qui propose des stages dans une société active, celle d’une comédie romantique peu crédible, qui les avaient oubliés.
L’idée de confronter son personnage aux nouvelles technologies, qui pourraient le conduire à des vertiges de stress, est surtout l’occasion de faire le catalogue de tous les petites choses à la mode… De l’ordinateur Apple à Instagram, en passant par Skype, et l’omniprésence du mobile, tout y passe. On retiendra donc que ce vétéran de l’entreprise apprend à ouvrir un compte Facebook grâce au tutorat de sa patronne complice jouée par Anne Hathaway. N’est-ce pas beau la misère cinématographique ?
Anne Hathaway retrouve l’univers passablement requin de l’entreprise, qu’elle incarne, non pas en directrice autoritaire, comme dans le film Le diable s’habille en Prada où Meryl Streep lui en faisait voir de toutes les couleurs, mais en working girl investie qui n’a plus le temps de préserver sa famille, son époux en étant réduit au statut de house husband fade qui finira par la tromper…
Enième succès ronflant pour Nancy Meyers
Plus qu’une comédie de situation qui opposerait les générations, Le stagiaire est surtout un hymne à la complicité et à la bienveillance. Le regard paternel assumé, De Niro se glisse progressivement dans les sapes de l’ange gardien et du confident, ramenant la jeune femme à des valeurs familiales plus authentiques, où la gestion du temps et de l’autre devient essentielle.
Nancy Meyers sait parler à son public qui y trouvera un certain charme désuet, mais s’aliénera tous les autres qui espéraient éventuellement y trouver une (légère) réflexion sur la difficulté de vieillir dans une société liftée par les nouvelles technologies, où l’évanescence des modes évacue tous ceux qui sont hors du coup. Ce n’est ni truculent, ni mordant, juste aseptisé et somnolent.
Le public américain ne lui en a pas tiré rigueur. Comme tous les films guimauves de la cinéaste, Le stagiaire a été un beau succès, avec plus de 70 millions de dollars localement. En France, avec également plus de 400 000 entrées, Warner y a plus ou moins trouvé le compte.
Critique de Frédéric Mignard