La menace est un thriller à l’américaine qui brouille les pistes et joue avec les codes du genre sans jamais chercher la facilité. Mais l’excellence de sa réalisation cache parfois un certain manque de profondeur chez les personnages. Efficace avant tout.
Synopsis : Tombé amoureux de Julie, une jeune Canadienne, Henri Savin s’apprête à quitter sa compagne dépressive. Accablée, celle-ci se suicide et tout semble accuser Julie. Savin fabrique alors de fausses preuves pour la sauver mais son jeu se retourne bientôt contre lui.
Retour à l’action pour le duo Corneau / Montand
Critique : Tout juste après le beau succès remporté par son second film Police Python 357 avec Yves Montand, le jeune cinéaste Alain Corneau récidive dans un genre qui va devenir sa spécialité, à savoir le polar noir. Détournant bon nombre des codes classiques du genre, l’auteur opère d’imperceptibles glissements qui entraînent son troisième opus vers une étrangeté déstabilisante. Débutant comme une traditionnelle affaire de mœurs, l’ensemble évolue vers un thriller hitchcockien pervers, avant de se terminer en film d’action couillu.
Cette structure à la fois circulaire et imprévisible a sans nul doute fait beaucoup pour que les critiques de l’époque se braquent contre le film. Pourtant, à y regarder de plus près, c’est aussi ce qui fait sa singularité par rapport à tous les polars de série sortis alors.
Un réalisateur virtuose, en pleine possession de ses moyens
Certes, on peut trouver vain ce jeu du chat et de la souris entre des personnages et leur propre destin, mais la maestria formelle d’un réalisateur en pleine possession de ses moyens ne fait, elle, aucun doute.
La menace n’est pas le meilleur film de son auteur
Photo : François Ducasse – Crédit affiche : Ferracci – © Les Productions du Daunou – Design DVD : Universal Pictures France
Aussi à l’aise dans les moments intimistes que lors des passages plus mouvementés, Alain Corneau signe un film bien plus pessimiste qu’il y paraît de prime abord. Le tout est soutenu par une excellente musique jazzy et une interprétation de premier ordre : Yves Montand porte magnifiquement tout le poids du monde, Carole Laure joue l’étonnement avec conviction, tandis que Marie Dubois s’enfonce dans la démence avec une rare jubilation. Elle sera césarisée pour ce rôle. On peut juste regretter que leurs personnages soient trop souvent réduits à des marionnettes dans un échafaudage narratif trop bien huilé pour être totalement crédible.
Au final, La menace n’est assurément pas le meilleur film de son auteur, mais il arrive toutefois à se démarquer du tout-venant grâce à quelques idées étranges et bienvenues. Même si le métrage ne fut pas un grand hit, il a quand même glané plus d’1 300 000 entrées en 1977, de quoi en faire un joli succès d’estime.
Critique du film : Virgile Dumez
Sorties de la semaine du 21 septembre 1977
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Photo : François Ducasse – Crédit affiche : Ferracci – © Les Productions du Daunou