Godzilla : la critique du film (1998)

Science-Fiction, Catastrophe, Action | 2h19min
Note de la rédaction :
4/10
4
Godzilla, l'affiche

Note des spectateurs :

Godzilla subit les attaques du rouleau compresseur Roland Emmerich dans cette version américaine dépourvue de la moindre subtilité et pâtissant d’un script exsangue. On préfère oublier.

Synopsis : Une tempête effroyable se déchaîne sur le Pacifique, engloutissant un pétrolier tandis qu’un immense éclair illumine le ciel au-dessus de la Polynésie française. Des empreintes géantes creusent un inquiétant sillon à travers des milliers de kilomètres de forêts et de plages au Panama. Les navires chavirent au large des côtes américaines et ces horribles phénomènes s’approchent de plus en plus près de New York. Le chercheur Nick Tatopoulos est arraché à ses recherches afin d’aider les Etats-Unis à traquer le monstre qui est à l’origine de ces désastres mystérieux.

Godzilla ou Jurassic Park, Roland Emmerich ne parvient pas à choisir

Critique : Grand spécialiste du blockbuster des années 90, le cinéaste allemand Roland Emmerich n’a eu de cesse de proposer des spectacles impressionnants, tablant sur les derniers effets spéciaux numériques alors balbutiants pour livrer des œuvres vouées à restaurer le prestige d’un certain cinéma catastrophe des années 70. N’ayant plus aucune limite imposée par les restrictions techniques, Emmerich peut envisager la destruction complète d’une ville et propose au public de l’époque des images jamais vues jusqu’alors.
Malheureusement, ce déferlement de destructions massives se fait souvent au détriment du scénario, et surtout des personnages qui sont régulièrement réduits à d’insipides caricatures. Cette tendance était déjà notable dans son Independance Day de 1996 et cela se confirme avec sa version américaine de Godzilla tournée deux ans plus tard avec des moyens considérables (on parle d’une enveloppe de 130 millions de dollars d’alors).

Godzilla n’est désormais plus rattaché au Japon, mais à l’aire occidentale

Si le projet a immédiatement séduit les studios qui cherchaient à développer une nouvelle franchise lucrative fondée sur un personnage déjà bien établi, les fans du monstre japonais ont été nettement moins emballés à l’annonce de la récupération effectuée par Emmerich de leur personnage culte. Et de fait, Dean Devlin et Emmerich n’ont absolument pas cherché à respecter l’univers de la franchise japonaise développée dans une trentaine de films depuis les années 50. Ainsi, ils actualisent la problématique nucléaire en expliquant la création du monstre par les essais pratiqués dans l’atmosphère par les Français en Polynésie. Si l’idée n’est pas idiote en elle-même, elle dépossède donc les Japonais de leur monstre préféré et recentre la problématique sur l’aire de civilisation occidentale, ce qui ne fut pas nécessairement du goût de tout le monde.

Pourtant, les griefs n’allaient pas s’arrêter là puisque les auteurs de cette version hollywoodienne transforment la créature nucléaire en dinosaure géant, de façon à la rattacher à un autre triomphe du début des années 90, à savoir Jurassic Park que le cinéaste semble citer à chaque plan. Comme les auteurs se sont retrouvés embarrassés par la taille gigantesque de Godzilla, ils n’ont rien trouvé de mieux que de lui faire pondre des centaines d’œufs pour donner naissance à des petits dinosaures que l’on peut rapprocher encore un peu plus du film de Spielberg.

Godzilla, un monstre perdu dans un script qui tutoie le vide absolu

Manque de chance, le script n’a aucunement la finesse de celui de Jurassic Park et le jeu de cache-cache entre le monstre géant et l’armée en plein cœur de New York tourne rapidement à la vaste blague. Comment peut-on égarer ainsi une créature aussi énorme ? Comment peut-elle parvenir à investir le réseau d’égout sans que personne ne la remarque ? Si l’on ajoute à cela des personnages insipides dont les petites histoires d’amour n’ont strictement aucun intérêt, ainsi qu’un nombre incalculable de clichés sur les Français (uniquement préoccupés par la nourriture, c’est bien connu), Godzilla 1998 s’enfonce progressivement dans une médiocrité sans appel. Bien évidemment, certaines scènes de destruction sont encore aujourd’hui spectaculaires – même si les effets numériques de l’époque commencent à piquer les yeux par moments – mais elles ne peuvent en aucun cas compenser l’extrême déficit d’écriture qui plombe l’ensemble du long-métrage.

Détesté par la critique lors de sa sortie, le film n’a guère passionné les foules aux Etats-Unis où il a contre-performé en ne cumulant localement que 136 millions de dollars. Destiné à cartonner partout, le métrage n’a pas connu d’exploitation glorieuse, sauf en France où il est parvenu à se hisser vers les 3 millions d’entrées, soit la 14ème place annuelle. Pas de quoi pavoiser pour autant et la déception des exécutifs a été sans appel puisque la franchise a aussitôt été avortée. Il a fallu attendre 2014 pour que Godzilla refasse surface en Occident avec la version contestée et contestable de Gareth Edwards, produite par Warner, qui a mieux fonctionné aux Etats-Unis, mais a été à peine remarqué en France.

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Critique de Virgile Dumez

Copyright 1998 Columbia Tri Star Films. Tous droits réservés.

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