Sur un script imaginatif qui ose s’éloigner du premier volet, Esther 2 : les origines est une série B très agréable à suivre car surprenante dans son déroulement. Et ceci malgré des incohérences manifestes.
Synopsis : Leena Klammer, femme atteinte de pan hypopituitarisme, est internée dans un asile psychiatrique estonien. Après s’être évadée, elle décide d’usurper l’identité d’une petite fille riche disparue, Esther Albright. Après avoir infiltré la famille de Tricia et Allen Albright, « Esther » tente de commettre son premier meurtre.
Une suite que plus personne n’attendait
Critique : En 2019 naît l’idée apparemment saugrenue de donner une suite tardive au thriller Esther (Collet-Serra, 2009) qui fut un joli succès surprise dix ans auparavant. En réalité, il s’agit d’un préquel qui permet de revenir aux origines du drame vécu par la petite Esther. Comme le twist du premier volet est désormais connu de tous (attention spoiler du premier épisode : la gamine est en réalité une adulte psychopathe coincée dans un corps d’enfant. Fin du spoiler), il n’était pas question de fonder ce nouvel épisode sur la même idée, ce qui représentait un véritable challenge pour le scénariste David Coggeshall.
Autre défi de taille, le réalisateur William Brent Bell (connu pour The Boy et sa suite en 2016 et 2020) a tenu à ce qu’Isabelle Fuhrman reprenne son rôle iconique. Toutefois, le temps ayant fait son œuvre, la gamine de 12 ans qu’il était facile de vieillir est devenue une jeune femme de 24 ans qu’il est plus ardu de faire passer pour une enfant. Pour rendre la transformation crédible, les auteurs ont eu recours à des effets de maquillage pour rajeunir les traits matures de l’actrice, puis ils ont utilisé des doublures enfantines pour les séquences où le personnage est debout. Enfin, l’usage de perspectives forcées a parachevé l’illusion qui, si elle n’est pas parfaite, se trouve tout de même suffisamment convaincante.
Une première partie classique qui suit les traces du premier
Esther 2 : les origines débute dans l’asile psychiatrique où la gamine est internée quelque part en Estonie. Après une séquence d’ouverture plutôt efficace qui nous présente donc les capacités létales de la fausse enfant modèle, le long-métrage semble se conformer au schéma déjà vu dans le premier volet. Ainsi, la môme déséquilibrée réussit à se faire passer pour une enfant disparue d’un couple d’Américains. L’intégration dans sa nouvelle famille ne se fait pas sans mal et, bien entendu quelques personnages trop curieux vont se mettre sur son chemin, au risque d’en perdre la vie.
Cette première partie suit d’un peu trop près les attentes du spectateur ayant en mémoire le premier film. L’ensemble n’est jamais désagréable car les acteurs sont plutôt bons et la réalisation de William Brent Bell est assez efficace. Pourtant, Esther 2 : les origines gagne en puissance dans sa deuxième partie à la faveur d’un twist, certes improbable, mais que l’on ne voit vraiment pas venir. Le scénariste est ainsi parvenu à renouveler la franchise d’une manière inattendue et originale qui donne à la projection un doux parfum que l’on n’attendait pas : celui d’un pur film bis à l’humour noir et bitchy.
Une seconde partie bis, entre twist inattendu et rires
Ainsi, l’affrontement entre Isabelle Fuhrman et Julia Stiles est tout à fait savoureux tant les deux actrices se livrent à un concours d’œillades vachardes. Esther 2 : les origines fait à nouveau preuve de perversité lorsque les auteurs laissent entendre une propension à l’inceste de la part du père de famille. Au passage, l’image proprette de la famille américaine en prend pour son grade et se retrouve largement écornée dans cette suite-préquelle que l’on n’imaginait pas aussi roublarde et maline.
Toutefois, signalons quelques défauts qui pourront paraître rédhibitoires à certains spectateurs qui ne goûtent guère le cinéma bis. Tout d’abord, le script cumule un nombre conséquent d’incohérences – pourquoi personne ne remarque la disparition de l’inspecteur asiatique ? Comment des tests ADN n’ont-ils pas été effectués alors que cela existait déjà à la fin des années 2000 ? Bien d’autres questions resteront bien évidemment sans réponses. Mais après tout, le postulat de départ du premier Esther n’était-il pas aussi absurde ?
Box-office : Esther 1 contre Esther 2
Sorti trop tardivement par rapport au premier film, largement oublié depuis 2009, Esther 2 : les origines n’a pas rencontré le succès de son ainé, en particulier aux Etats-Unis où le métrage a été projeté dans 500 salles et n’a glané que 5,4 M$ pour un budget pourtant serré de 10 M$ et une 98e place annuelle. Orphan 1 y avait perçu 9 fois plus de cash.
En France, plus gros marché historique du premier opus hors USA, le thriller horrifique porté par Metropolitan FilmExport a réalisé deux fois moins d’entrées que le précédent épisode, distribué par Warner Bros qui avait beaucoup communiqué dessus. Le contexte post-Covid rend toutefois les comparaisons difficiles. 2022 fut une année lamentable. Aussi, en France, le succès se lit en filigrane. Avec 338 405 entrées, le sequel sera le 4e meilleur score de Metropolitan durant une année catastrophique où la société déploiera 15 films et dont le plus gros succès attirera à peine 404 408 entrées (La proie du diable).
Esther 2 sera néanmoins (plus ou moins) rentable grâce à l’apport des chiffres internationaux qui s’élèvent à 43,8 M$. Une misère en fait, dans un contexte sinistré. Devant les USA, le Mexique est le premier marché au monde, avec 6 642 451$. Le Royaume-Uni est troisième, avec des recettes s’élevant à 2 461 055$. La France suit (2 264 074$), avec l’Australie (1 824 620), la Corée du Sud (1 359 757) et la Russie (1 012 393$). En Allemagne et en Espagne, la sinistrose ne le conduira même pas au-dessus du million de dollars de recettes. A vrai dire, l’Allemagne n’avait déjà pas accroché au premier film.
Critique de Virgile Dumez
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William Brent Bell, Isabelle Fuhrman, Julia Stiles, Rossif Sutherland, Matthew Finlan
Mots clés
La franchise Esther, Les thrillers domestiques au cinéma, Les enfants maléfiques au cinéma, Dark Castle Entertainment