Cent jours à Palerme : la critique du film (1984)

Biopic, Historique, Policier | 1h40min
Note de la rédaction :
5,5/10
5,5
Cent jours à Palerme, affiche film 1094

  • Réalisateur : Giuseppe Ferrara
  • Acteurs : Lino Ventura, Adalberto Maria Merli, Giuliana de Sio, Stefano Satta Flores, Arnoldo Foà, Lino Troisi
  • Date de sortie: 25 Avr 1984
  • Nationalité : Italien, Français
  • Titre original : Cento giorni a Palermo
  • Titres alternatifs : Morte a Dalla Chiesa (Brésil) / Cem dias em Palermo (Portugal) / Die hundert Tage von Palermo (Allemagne)
  • Année de production : 1984
  • Scénariste(s) : Giuseppe Ferrara, Pier Giovanni Anchisi, Riccardo Iacona, Giuseppe Tornatore
  • Directeur de la photographie : Silvio Fraschetti
  • Compositeur : Vittorio Gelmetti
  • Société(s) de production : Ombre et Lumière, Transcontinentale Production, La Cecilia, Compania Lavoratori del Cinema e del Teatro (C.L.C.T.), TV Cine 2000
  • Distributeur (1ère sortie) : AMLF
  • Distributeur (reprise) : -
  • Date de reprise : -
  • Éditeur(s) vidéo : Proserpine (VHS, 1986) / Fil à Film (VHS, 1990) / TF1 Vidéo (DVD) / LCJ Editions (DVD)
  • Date de sortie vidéo : 15 septembre 2005 (DVD)
  • Box-office France / Paris-périphérie : 500 403 entrées / 157 166 entrées
  • Box-office nord-américain : -
  • Budget : -
  • Rentabilité : -
  • Classification : Tous publics
  • Formats : Couleurs / Son : Mono
  • Festivals et récompenses : David di Donatello 1984 : 1 nomination pour Meilleur acteur dans un second rôle pour Stefano Satta Flores / Italian National Syndicate of Film Journalists 1984 : 1 nomination pour Giuliana de Sio (meilleure actrice)
  • Illustrateur / Création graphique : Agences ARP / LPC
  • Crédits : © 1984 TF1 International - Transcontinentale Productions - Pacifique Productions - Compania Lavoratori del Cinema e del Teatro (C.L.C.T.) - TV Cine 2000
Note des spectateurs :

Déséquilibré par un montage mal fagoté et un manque de point de vue, Cent jours à Palerme bénéficie d’une prestation très honorable de Lino Ventura et d’une dimension documentaire et historique appréciable.

Synopsis : Au printemps 1982, le général Dalla Chiesa affiche de brillants états de service après avoir réussi à vaincre les Brigades rouges. Alors qu’il pourrait partir à la retraite, satisfait du devoir accompli, et mener une vie paisible aux côtés de sa compagne Emanuela, il accède à un dernier poste. Il accepte la charge de préfet à Palerme, une ville contrôlée par la Mafia sicilienne. Peu de temps après son arrivée, le député communiste Pio La Torre est éliminé par Cosa Nostra. Révolté par ce crime et la corruption ambiante, Dalla Chiesa sera désormais la bête noire des parrains du crime.

Un film-dossier qui suit les traces de Francesco Rosi

Critique : Au cours des années 70, le cinéma italien ne cesse d’évoquer le problème de la mafia, que ce soit à travers des œuvres de pure exploitation qui cherchaient à surfer sur le succès du Parrain (Coppola, 1971) ou bien sous forme de films plus politisés et théoriques. Au cœur de cette seconde catégorie, nous pouvons bien sûr signaler l’importance de l’œuvre de Francesco Rosi qui a créé le sous-genre du film-dossier avec des films comme Main basse sur la ville (1963), L’affaire Mattei (1971), Lucky Luciano (1973) ou encore Cadavres exquis (1975) déjà interprété par Lino Ventura.

Il était important d’opérer ce détour pour évoquer Cent jours à Palerme (1984), tant le réalisateur Giuseppe Ferrara semble avoir voulu retrouver la saveur et la puissance du cinéma de Francesco Rosi. Si le réalisateur est loin d’être un novice puisqu’il a débuté dans les années 60, c’est à partir des années 80 qu’il va développer une thématique quasiment unique, à savoir l’auscultation de l’histoire récente de l’Italie à travers des biopics de personnages éminents.

Un biopic trop superficiel d’une figure majeure

Ici, il débute ce corpus par les cent derniers jours de la vie du général Carlo Alberto dalla Chiesa qui venait tout juste de se faire assassiner par la mafia sicilienne. Pour mémoire, le général des carabiniers était une figure d’autorité importante en Italie, lui qui avait été un résistant au fascisme, puis l’un des vainqueurs des Brigades rouges lors des années de plomb. Nommé à Palerme à la fin de sa carrière, l’homme avait pour mission de faire une opération main propre en Sicile à l’encontre de la Cosa Nostra. Connu pour son intransigeance et son efficacité, le général a dérangé trop de gens importants et a été assassiné. Ce sont ses derniers instants que Ferrara et ses scénaristes ont décidé de décrire dans un film qui se veut d’une parfaite neutralité.

Si le résultat final est assez efficace, l’ensemble n’en demeure pas moins légèrement décevant à cause d’une certaine superficialité dans le traitement du sujet. Sans doute pour ne blesser personne, le réalisateur ne prend pas vraiment de risques dans sa description de la mafia. On perçoit bien une structure tentaculaire qui a fait main basse sur la ville, mais on ne comprend pas nécessairement ses rouages au vu du film. Le cinéaste a préféré se concentrer sur l’action du général, incarné avec beaucoup d’autorité et de charisme par un Lino Ventura très à l’aise. Mais là encore, on sent des errances au niveau du script et du montage qui nous interdisent de comprendre l’ensemble des mécanismes à l’œuvre.

Entre spectacle et dénonciation politique, il fallait choisir !

Visiblement partagé entre sa volonté pédagogique et son sens du spectacle, Ferrara n’arrive pas vraiment à définir son point de vue. Il souhaite clairement dénoncer l’inertie du gouvernement italien de l’époque, mais sans avancer d’arguments frappants. Ainsi, il passe pas mal de temps à filmer des scènes d’exécutions et de massacres comme pour faire passer les séquences qui comportent de vrais tunnels dialogués. Il parvient tout de même à retranscrire la violence et la lâcheté des membres de la mafia lors des scènes d’exécutions où l’on ressent l’absence de prise de risque d’exécutants qui agissent en meute. On est donc loin ici d’une quelconque vision glamour du crime organisé.

Il est important de savoir à ce stade que la coproduction entre la France et l’Italie a impliqué la création de deux montages différents, cette critique se basant donc sur le montage français. Apparemment, aucun des deux n’est pleinement satisfaisant et l’on sent à plusieurs reprises des flottements dans la narration.

Générique Cent jours à Palerme

Cent jours à Palerme – © 1984 TF1 International – Transcontinentale Productions – Pacifique Productions – Compania Lavoratori del Cinema e del Teatro (C.L.C.T.) – TV Cine 2000 / Affiche : A.R.P./ L.P.C. (agence). Tous droits réservés.

Cent jours à Palerme, un échec critique et public

Tourné par un réalisateur assez peu aguerri dans le genre, Cent jours à Palerme souffre également de la mésentente assez forte entre Giuseppe Ferrara et sa vedette Lino Ventura qui n’a guère apprécié le tournage. Il faut dire que passer d’un maître comme Francesco Rosi à un habile faiseur comme Ferrara a sans doute paru difficile pour Ventura, par ailleurs connu pour sa franchise et ses humeurs changeantes. En tant que grand professionnel, Lino Ventura ne supportait pas l’improvisation et l’incompétence, ce qu’il reprocha à son réalisateur. De fait, Cent jours à Palerme souffre bel et bien d’une réalisation un peu trop télévisuelle et parfois confuse. Toutefois, Ferrara s’en sort de justesse grâce au charisme de son acteur principal et à la puissance de son histoire vraie.

Précédé de critiques assez tièdes, Cent jours à Palerme sort sur les écrans français au mois d’avril 1984 et devient assez rapidement un échec commercial pour Lino Ventura avec 500 403 entrées glanées sur son seul nom. L’acteur étant encore habitué à régulièrement dépasser les deux millions d’entrées, la déception fut grande. Malgré une publicité conséquente et un nombre de salles important pour accueillir le long-métrage, Cent jours à Palerme ne parvient même pas à s’imposer à Paris lors de sa première semaine d’exclusivité, se faisant doubler par Viva la vie de Lelouch, pourtant sorti la semaine précédente. Si le film s’est globalement maintenu durant sa seconde semaine, la chute fut bien plus rude par la suite. Le grand public français n’a donc guère été convaincu par ce sujet, sans doute trop italien pour l’intéresser.

Critique de Virgile Dumez

Les sorties de la semaine du 25 avril 1984

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Cent jours à Palerme, affiche 4X3, archives CinéDweller

© 1984 TF1 International – Transcontinentale Productions – Pacifique Productions – Compania Lavoratori del Cinema e del Teatro (C.L.C.T.) – TV Cine 2000 / Affiche : A.R.P./ L.P.C. (agence). Tous droits réservés.

L'étrange musique de Cent jours à Palerme

Box-office :

Grosse production avec une star qui refuse de jouer pour un salaire à moins de 4 à 5 millions de francs, Cent jours à Palerme bénéficie d’une très belle exposition médiatique. Première Magazine, alors en forme au niveau des ventes, accorde une couverture à Ventura et Marc Esposito retrace sa carrière. Beau.

Le mercredi 25 avril 1984, Cent jours à Palerme est la sortie du jour, avec pas moins de 44 écrans sur Paris-intramuros. Un vrai circuit de mastodonte, loin devant les nouveautés du jour : Les voleurs de la nuit avec Véronique Jannot est dans 19 salles, Brooke Shields et Lambert Wilson dans Sahara resplendissent de leur jeunesse dans 14 cinémas, La diagonale du fou trouve 9 écrans, Nastassja Kinski dans Faut pas en faire un drame floppe dans 8 salles, Warner lance L’étoffe des héros dans 6 cinémas, et les films indépendants Forbidden Zone et le premier Jarmusch, Permanent Vacation, jouent chacun dans une salle.

Echec dès le lancement

Le premier jour est décevant, avec 7 480 entrées. Une semaine plus tôt, dans 19 cinémas, Claude Lelouch célébrait Viva la vie avec 12 798 spectateurs pour la première journée en intra-muros.

En première semaine, la déception est française, avec une petite quatrième position derrière Viva la vie, Retour vers l’enfer et Aldo et Junior. Sur Paname, la combinaison solide que lui a acquise AMLF (aujourd’hui Pathé), lui permet d’atterrir en 2e place, avec 62 723 spectateurs. Viva la vie, en 2e semaine, réalise 20 000 entrées de plus, avec 22 salles en moins.

Dans quel cinéma voir Cent jours à Palerme à Paris?

Cent jours à Palerme bénéficie d’environ 22 écrans en intra-muros : le Marignan Pathé, Publicis Elysées, Paramount Bastille – Montparnasse – Maillot – Galaxie – Odéon – Opéra, les Pathé Wepler – Montparnasse – Français –  Victor Hugo – Quintette, le Convention Saint-Charles, les Gaumont Richelieu – Gambetta – Sud – Convention, le Nation, le Forum Cinémas, le Saint-Lazare Pasquier, le Fauvette.

Pas un arrondissement de la ville lui échappe.

Lino Ventura fait au moins mieux que Chabrol…

La 2e semaine le voit passer à 53 629 spectateurs. Il est doublé par L’étoffe des héros que son distributeur a gonflé à 18 écrans. Pis, la reprise de L’homme qui en savait trop d’Alfred Hitchock (CIC) crée la surprise avec une remarquable première place et pas moins de 94 181 Parisiens. Au moins, Cent jours à Palerme se classe devant Le sang des autres de Claude Chabrol qui est un lourd échec avec 39 676 spectateurs dans 36 cinémas. La présence de Jodie Foster n’a pas aidé.

En 3e semaine, Lino Ventura rétrograde vers la sortie, avec une 9e position douloureuse (24 214).

Sortie VHS anticipée, Ventura furieux

Avec 11 écrans en 4e semaine, Cent jours à Palerme passe sous la barre des 10 000 (7 881). La banlieue ne le programme plus en 5e semaine, Paris lui octroie à peine 4 cinémas pour 3 898 spectateurs. Pour sa 7e semaine, AMLF parvient encore à le caser dans un cinéma sur les Champs, le Marignan Pathé, pour 1 014 entrées supplémentaires.

Le biopic s’éteint à 157 166 entrées sur la capitale et 500 403 spectateurs sur la France. Face à un tel désaveu, Proserpine peut le sortir moins de 7 mois après sa sortie en salle.

L’acteur, alors en promo pour La septième cible, ne veut plus revenir sur cette expérience douloureuse dès le tournage, et son différend avec le cinéaste qui a renié le montage projeté en France. Lorsque François Guérif, pour Télé Ciné Vidéo lui demande, en octobre 1984 ce qu’il pense de la réaction du cinéaste, il lui répond :

Cela me gêne beaucoup, parce que je préférerais traiter cela par le mépris. C’est vraiment absurde de sa part, et je ne comprends pas qu’on puisse se conduire de la sorte. J’aimerais en rester là.

En fait, nous aussi.

Frédéric Mignard

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Bande-annonce de Cent jours à Palerme

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