Blue Steel : la critique du film (1990)

Policier, Thriller, Action | 1h42min
Note de la rédaction :
7/10
7
Blue Steen en VOD

  • Réalisateur : Kathryn Bigelow
  • Acteurs : Jamie Lee Curtis, Kevin Dunn, Clancy Brown, Louise Fletcher, Ron Silver, Elizabeth Peña, Richard Jenkins, Paul Sizemore
  • Date de sortie: 25 Avr 1990
  • Nationalité : Américain
  • Année de production : 1990
  • Scénariste(s) : Kathryn Bigelow, Eric Red
  • Directeur de la photographie : Amir Mokri
  • Compositeur : Brad Fiedel
  • Société(s) de production : Lightning Pictures, Precision Films, Mack-Taylor Productions
  • Distributeur (1ère sortie) : Forum Distribution
  • Éditeur(s) vidéo : Delta Vidéo (VHS) / Metropolitan Vidéo (DVD et blu-ray)
  • Date de sortie vidéo : 1er avril 2011
  • Box-office France / Paris-périphérie : 129 494 entrées / 61 383 entrées
  • Box-office nord-américain 8,2 M$
  • Budget : -
  • Rentabilité : -
  • Classification : Tous publics
  • Formats : 1.85 : 1 / Couleurs / Son : Dolby Stereo
  • Festivals et récompenses : Mention spéciale pour Jamie Lee Curtis, lors du Festival du film policier de Cognac en 1990 / Prix de la meilleure actrice et nomination au prix du meilleur film, lors du Mystfest en 1990.
  • Illustrateur / Création graphique : Seiniger Advertising
  • Crédits : Vestron Pictures
Note des spectateurs :

Série B d’une implacable efficacité, Blue Steel vaut bien certains films de Michael Mann par son ambiance urbaine anxiogène et sa maestria visuelle. A réévaluer.

Jamie Lee Curtis dans Blue Steel (photo 2)

© 1989 Vestron Pictures / © 2011 Metropolitan Filmexport. Tous droits réservés.

Synopsis : Jeune recrue de la police, Megan Turner abat un voyou en plein flagrant délit de hold-up. Ne pouvant prouver qu’elle était en état de légitime défense, la jeune femme se voit suspendue de ses fonctions. Désemparée, elle se laisse séduire par un agent de change, dont elle vient de faire la connaissance. Quelques temps plus tard une série de crimes est commis : le tueur utilise des balles sur lesquelles il a gravé le nom de Megan !

Hitcher au féminin

Critique : A une époque où il était encore très difficile d’être une femme réalisatrice à Hollywood, Kathryn Bigelow est parvenue à s’imposer grâce à son talent visuel imparable et sa force de caractère. Elle a mis tout le monde d’accord avec son deuxième long-métrage, l’étrange film de vampires Aux frontières de l’aube (1987) qui n’a pas rencontré le succès, mais a scotché bon nombre de cinéphiles. Elle reçoit notamment le soutien d’Oliver Stone qui compte produire son prochain long-métrage.

Blue steel, jaquette blu-ray

© 1989 Vestron Pictures / © 2011 Metropolitan Filmexport. Tous droits réservés.

Elle retrouve pour l’occasion le scénariste Eric Red avec qui elle a collaboré sur son précédent long, mais est également connu pour avoir signé le script du cultissime Hitcher (Harmon, 1986). Ce dernier imagine de transposer l’intrigue de son classique dans un univers plus urbain. Il s’agit donc à nouveau d’une traque entre deux personnages, dont l’un est une jeune recrue de la police et l’autre un serial killer complètement obsédé par les armes. Toutefois, sur ce canevas somme toute assez classique, Kathryn Bigelow a ajouté quelques notations plus personnelles liées notamment à son statut de femme réalisatrice.

Etre une femme dans un univers masculin

Ainsi, le portrait initial du personnage incarné par Jamie Lee Curtis peut se voir comme un reflet de la situation de la réalisatrice à Hollywood. Comme cette femme flic qui doit évoluer dans un univers majoritairement masculin, Kathryn Bigelow a également dû faire ses preuves et bousculer l’establishment pour s’imposer. Sa place, elle la doit bien uniquement à son talent, et non à quelque quota imposé par la bien-pensance. Elle met donc en scène un personnage de femme forte qui doit lutter contre les préjugés de genre, aussi bien dans son entourage professionnel que personnel. On adore notamment toutes les séquences où elle doit se justifier vis-à-vis de ses proches qui la regardent comme un être étrange et dérangé.

Au passage, Kathryn Bigelow oppose cette jeune femme farouchement indépendante à sa mère – excellente Louise Fletcher – qui appartient à une génération d’épouses soumises et parfois maltraitées dans le secret de la chambre à coucher par des maris tout-puissants. Ces notations, bien entendu importantes et fort appréciables, ne sont pourtant jamais brandies comme un étendard par une réalisatrice qui serait une militante avant d’être une artiste. Bien au contraire, Kathryn Bigelow s’emploie à respecter l’intégrité psychologique de ses personnages.

Portrait de l’Amérique carnassière de Reagan

Elle se livre également à un petit commentaire sur l’évolution de l’Amérique reaganienne uniquement intéressée par l’argent facile et la compétition entre les winners et les losers. Ainsi, le personnage de serial killer incarné par Ron Silver – aucun spoiler ici puisqu’on le sait dès le début du film – n’est autre qu’un trader dont la vie consiste à écraser les autres. Il n’opère qu’un léger basculement de paradigme en éliminant physiquement des êtres qu’il juge insignifiant. Là encore, pas d’insistance sur ces éléments de la part d’une réalisatrice qui a surtout à cœur d’embrasser le genre du thriller avec une grande efficacité.

En réalité, elle anticipe avec Blue Steel une thématique qui sera encore développée dans son Point Break (1991), à savoir celle de l’attraction-répulsion qui peut exister entre un flic et un truand. Sans théoriser quoi que ce soit, Bigelow pose la question de la fine distance qui sépare un membre des forces de l’ordre et celui qui enfreint la loi. Dans Blue Steel, elle fait ainsi de Ron Silver une sorte de double maléfique (ou doppelgänger) de Jamie Lee Curtis. Elle réfléchit également en creux à la fascination du peuple américain pour les armes à feu.

Jamie Lee Curtis dans Blue Steel (photo)

© 1989 Vestron Pictures / © 2011 Metropolitan Filmexport. Tous droits réservés.

L’égale de Michael Mann en matière de réalisation racée

Toutefois, ce qui marque le plus durant le visionnage de Blue Steel (1990) vient de l’extrême modernité de sa réalisation. Grâce à des mouvements de caméra gracieux, mais également dotés d’une puissance d’évocation extraordinaire, Blue Steel se distingue du tout-venant de l’époque et tutoie le cinéma d’un Michael Mann en matière de brio formel. A l’aide d’éclairages bleutés et d’une musique inquiétante de Brad Fiedel, Kathryn Bigelow signe un film glacial qui impose une atmosphère urbaine pesante et tendue comme un garrot. Zébré d’éclairs de violence bruts, le résultat est tout bonnement enthousiasmant, si l’on fait abstraction de certaines facilités d’écritures. On peut en tout cas y admirer le jeu parfaitement maîtrisé de la grande Jamie Lee Curtis, opposée ici à un Ron Silver totalement démoniaque, comme possédé par une force surnaturelle.

Un échec commercial injuste

Sorti dans l’indifférence générale aux Etats-Unis où le film n’a glané que 8,2 millions de dollars malgré des critiques positives, Blue Steel n’a guère mieux marché sur le territoire français. Ils ne furent que 129 494 curieux à faire le déplacement en salles dans l’Hexagone, alors que sévissait la terrible crise du cinéma.

Il est donc temps de rendre hommage au talent visionnaire de Kathryn Bigelow qui, par-delà son statut de femme, est avant tout une grande artiste, encore trop ignorée de la communauté des cinéphiles.

Critique de Virgile Dumez

Les sorties de la semaine du 25 avril 1990

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Blue steel affiche du film de Kathryn Bigelow

: © Lightning Pictures, Precision Films

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