Au nom du peuple italien / Le petit juge : la critique du film (1975)

Comédie dramatique, Satire politique | 1h45min
Note de la rédaction :
8/10
8
Au nom du peuple italien, l'affiche de la reprise 2021

  • Réalisateur : Dino Risi
  • Acteurs : Vittorio Gassman, Ugo Tognazzi, Rossella Bergamonti, Yvonne Furneaux, Ely Galleani, Pietro Tordi, Renato Baldini
  • Date de sortie: 12 Fév 1975
  • Nationalité : Italien
  • Titre original : In nome del popolo italiano
  • Titres alternatifs : Le petit juge (titre de la reprise française de 1980) / In the Name of the Italian People (titre international) / En nombre del pueblo italiano (Espagne) / Em Nome do Povo Italiano (Portugal) / W imieniu narodu włoskiego (Pologne) / Abend ohne Alibi (Allemagne)
  • Année de production : 1971
  • Scénariste(s) : Agenore Incrocci et Furio Scarpelli
  • Directeur de la photographie : Alessandro D'Eva
  • Compositeur : Carlo Rustichelli
  • Société(s) de production : International Apollo Films
  • Distributeur (1ère sortie) : Les Films Molière
  • Distributeur (reprise) : Les Films Galatée – AMLF (sous le titre Le petit juge, en 1980) / Les Acacias
  • Date de reprise : 27 février 1980 / 23 janvier 2013 / 1er septembre 2021
  • Éditeur(s) vidéo : StudioCanal (DVD, 2007)
  • Date de sortie vidéo : 2 juillet 2007
  • Box-office France / Paris-périphérie : 108 192 entrées / 44 540 entrées - 16 915 (France, reprise 2013) - 1 012 entrées (France, reprise 2021)
  • Box-office nord-américain : -
  • Budget : -
  • Rentabilité : -
  • Classification : Tous publics
  • Formats : 1.85 : 1 / Couleurs / Son : Mono
  • Festivals et récompenses : -
  • Illustrateur / Création graphique : -
  • Crédits : StudioCanal
Note des spectateurs :

Brillante comédie, Au nom du peuple italien renvoie dos à dos toutes les classes sociales dans un grand bain de misanthropie. Du grand Dino Risi.

Synopsis : Le juge Bonifazi est un magistrat intègre et scrupuleux. L’enquête sur la mort d’une jeune call-girl semble impliquer Santenocito, un industriel sans scrupules, riche et puissant, directeur de plusieurs entreprises polluantes. L’industriel tente par tous les moyens de faire clore l’enquête, jusqu’à organiser un faux témoignage.

Dino Risi refuse de prendre parti durant les années de plomb

Critique : Au début des années 70, l’Italie traverse une période politique très complexe que l’on a résumé par le terme générique des années de plomb. Il faut dire que les tensions sont très vives et que la violence est omniprésente dans la lutte que se livre d’un côté les forces révolutionnaires de gauche et de l’autre l’aristocratie de droite au pouvoir, soutenue par l’influente Église catholique. Dans cette cacophonie, les cinéastes sont sommés de prendre parti. Ainsi, le Poliziottesco devient le genre par excellence de l’expression d’une idéologie politique. On retrouve d’ailleurs en son sein  les habituelles oppositions entre les tenants d’une vision critique envers des autorités fascisantes (on pense au cinéma de Sergio Sollima ou Damiano Damiani par exemple), tandis que d’autres artistes vont choisir de valoriser l’autodéfense (parmi eux, on trouvera Enzo G. Castellari ou Umberto Lenzi).

Le cinéaste Dino Risi va donc prendre tout ce beau monde à rebrousse-poil avec Au nom du peuple italien (1971). Effectivement, le réalisateur spécialisé dans la comédie noire et cruelle va au cours des années glisser vers une forme prononcée de misanthropie qui apparaît déjà de manière flagrante dans cette comédie satirique particulièrement virulente. Comme ses confrères, Risi et ses scénaristes Agenore Incrocci et Furio Scarpelli partent d’un postulat policier – on découvre le corps sans vie d’une jeune fille qu’on suspecte d’être une prostituée – pour mieux décrire la société italienne du moment.

Au nom du peuple italien de Dino Risi, visuel promotionnel

Copyrights 1983 Proserpine – Au nom du peuple italien de Dino Risi, visuel promotionnel / Les archives de CinéDweller

Un point de vue en apparence binaire

Ainsi, le métrage semble d’abord opposer de manière binaire un juge droit, intègre et soucieux d’équité joué avec talent par Ugo Tognazzi à un grand magnat de l’industrie interprété avec faconde par le grand Vittorio Gassman en mode abject. De fait, la présentation du personnage de Gassman est tellement chargée que l’on se dit qu’il s’agit assurément d’une caricature. L’homme de pouvoir incarne tout ce que l’on peut exécrer chez un être humain : manipulateur, menteur, égoïste et ignoble avec son entourage (on adore notamment les scènes avec son vieux père). Voulant se donner l’image d’un citoyen modèle, le chef d’entreprise est tout ce qu’il y a de plus méprisable.

Face à lui, le juge paraît bien plus sympathique, même si on sent également poindre une forme de raideur idéologique à plusieurs reprises au cours du film. Le jeu du chat et de la souris qui s’instaure entre les deux hommes s’avère jubilatoire. Toutefois, on voit bien que le juge est décidé à « se faire » le magnat puissant, quitte à accepter quelques petits arrangements avec la réalité des faits. Bien évidemment, le long-métrage ne serait pas aussi brillant s’il ne débouchait pas sur une scène finale remarquable.

L’être humain dans toute sa dimension méprisable

Dino Risi imagine donc la victoire de l’Italie en Coupe du Monde de football et plonge le juge au cœur de la foule en liesse. Celui qui dit se battre pour rétablir la justice sociale est alors pris de vertige car il voit en chaque supporter le visage de Gassman – l’occasion pour l’acteur de se grimer comme il aimait tant le faire. Dès lors, le juge prend une décision lourde de conséquence, mais que nous ne révélerons pas. En tout cas, cela montre que Dino Risi renvoie tout le monde dos à dos. Personne ne peut se dire parfait et la vérité est bafouée par tous. Selon le cinéaste, si les élites sont méprisables, le peuple qui les porte au pouvoir est à leur image.

Le petit juge (au nom du peuple italien), Dino Risi

Design : Landi © 1971 StudioCanal

Dans ce grand bain de misanthropie assumée, le cinéaste s’appuie sur deux acteurs remarquables qui se donnent la réplique avec une jubilation palpable. On soulignera également l’excellente partition musicale de Carlo Rustichelli, ainsi que la grande rigueur de la mise en scène faisant d’Au nom du peuple italien un must de la comédie italienne, à la fois noire, cruelle et cinglante.

Au nom du peuple italien devient Le petit juge à la faveur d’une ressortie

Pourtant, le long-métrage a mis du temps avant d’arriver sur les écrans français. Tourné en 1971, Au nom du peuple italien n’est sorti en France qu’en février 1975, avec moins de 5 écrans sur Paris-Périphérie. Néanmoins, grâce à une belle moyenne par écran sur ses 3 toiles, le film restera stable pendant de nombreuses semaines lui permettant de multiplier par 7 sa mise de départ !

La comédie est finalement ressortie en salles en février 1980 sous le titre Le petit juge, sans grand succès, malgré la force d’AMLF.

Avec un total de 108 192 entrées sur la France, cette brillante comédie italienne est donc clairement passée inaperçue chez nous. Après avoir été édité en DVD, le métrage a fait l’objet d’une reprise récente par Les Acacias au mois de septembre 2021 dans une copie parfaitement restaurée. Le film le mérite amplement.

Critique de Virgile Dumez

Les sorties de la semaine du 12 février 1975

Les sorties de la semaine du 27 février 1980

Les sorties de la semaine du 1er septembre 2021

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Au nom du peuple italien, l'affiche de la reprise 2021

© 1971 StudioCanal / © 2021 Les Acacias. Tous droits réservés.

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Au nom du peuple italien, l'affiche de la reprise 2021

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