Andreï Roublev : la critique du film et le test blu-ray (1969)

Drame, Historique, Biopic | 3h25min
Note de la rédaction :
10/10
10
Andreï Roublev, l'affiche du film

  • Réalisateur : Andreï Tarkovski
  • Acteurs : Nikolaï Bourliaïev, Nikolaï Grinko, Anatoli Solonitsyne, Ivan Lapikov, Youri Nazarov
  • Date de sortie: 18 Nov 1969
  • Nationalité : Soviétique
  • Titre original : Andrey Rublyov
  • Titres alternatifs : Andrej Rubljow (Allemagne) / Andriej Rublow (Pologne) / Den yderste dom (Danemark)
  • Année de production : 1966
  • Scénariste(s) : Andreï Kontchalovsky, Andreï Tarkovski
  • Directeur de la photographie : Vadim Ioussov
  • Compositeur : Viatcheslav Ovtchinnikov
  • Société(s) de production : Mosfilm, Tvorcheskoe Obedinienie Pisateley i Kinorabotnikov
  • Distributeur (1ère sortie) : -
  • Distributeurs (reprises) : Baba Yaga Films (2015) / Potemkine Films (2017)
  • Dates de reprise : 29 mai 2015 / 5 juillet 2017
  • Éditeur(s) vidéo : Les Films de ma Vie (VHS) / Gaumont Columbia RCA Vidéo (VHS) / Les Films sans Frontières (DVD, 2002) / MK2 (DVD, 2005, 2008) / Potemkine Films (DVD, 2011) / Potemkine Films (DVD et blu-ray, 2017)
  • Date de sortie vidéo : 21 novembre 2017 (blu-ray)
  • Box-office France / Paris-périphérie : 365 820 entrées / 231 788 entrées
  • Box-office nord-américain : -
  • Budget : 1 300 000 roubles
  • Rentabilité : -
  • Classification : Tous publics
  • Formats : 2.35 : 1 / Noir et Blanc et Couleurs / Son : Mono
  • Festivals et récompenses : Prix FIPRESCI de la Critique internationale au Festival de Cannes 1969 / Prix Léon-Moussinac — 1970
  • Illustrateur / Création graphique : Conception graphique jaquette blu-ray : Bombaliska!. Tous droits réservés.
  • Crédits : © 1966 Mosfilm / © 2017 Potemkine Films - Agnès B Cinéma. Tous droits réservés.
Note des spectateurs :

Andreï Roublev, pur chef d’œuvre d’Andrei Tarkovski est un bijou du cinéma mondial. À voir et revoir inlassablement.

Synopsis : En 1405, le peintre Théophane le Grec demande à Andreï Roublev de venir travailler avec lui à la décoration de l’église de l’Annonciation à Moscou. Quelques années plus tard, bouleversé par la violence de l’époque, Roublev renonce à son art et se mure dans le silence.

Le portrait bouleversant d’un artiste en quête de pureté dans un monde de brutes

Critique : Dès 1962, Andreï Tarkovski s’associe à Andreï Konchalovsky pour évoquer le destin d’un célèbre peintre du Moyen Âge nommé Andreï Roublev. Pourtant, il lui faudra de nombreuses années pour concrétiser sa vision artistique qui nécessitait un budget très élevé. Obligé de couper dans son scénario, Tarkovski finit toutefois par mettre en scène ce faux biopic d’un artiste dont on connait finalement peu de choses sur le plan historique. Ce flou artistique factuel permet au réalisateur une totale liberté qu’il met en application en créant une narration morcelée en plusieurs épisodes. D’une audace folle, le script se permet parfois d’abandonner le personnage principal durant l’intégralité d’un chapitre sans que cela paraisse gênant puisque le cinéaste plie sa logique narrative à l’idée qu’il est en train de développer.

Ici, il dépeint les rapports de l’artiste avec le monde extérieur, le pouvoir et même le divin. Alors qu’Andreï Roublev n’aspire qu’à la pureté de son art, cherchant partout la beauté, il se retrouve rapidement confronté à la violence de son époque – pour mémoire le Moyen Âge russe est particulièrement chaotique, notamment à cause d’incessantes guerres d’invasion. Le réalisateur évoque au passage la forte résistance païenne lors d’une magnifique séquence sur la fête de la Saint-Jean, mais également les incursions et destructions menées par le peuple des Tatars, souvent aidé par des seigneurs russes dans leur marche vers Moscou au début du 15ème siècle.

Andreï Roublev, entre contemplation et violence extrême

Cette extrême violence d’un monde barbare est décrite dans le film avec une puissance peu commune, notamment lors d’une longue séquence centrale d’une vingtaine de minutes qui voit la prise de la ville de Vladimir et le massacre de sa population. Dans cet épisode central, Tarkovski montre pour la première fois sa capacité à diriger des scènes d’action, avec des centaines de figurants. Il y déploie une maestria qui laisse encore aujourd’hui pantois d’admiration. Ne reculant devant aucun obstacle, le cinéaste ose le gore (yeux crevés, cranes fendus), les scènes de torture, la maltraitance d’animaux (simulée) et même de nombreux nus frontaux évoquant le viol.

Nul voyeurisme pourtant puisque le but du réalisateur est bien de dénoncer la violence sous toutes ses formes, qu’elle soit politique ou même religieuse. On peut d’ailleurs y lire une critique à peine voilée du régime soviétique des années 60, ce qui peut expliquer les difficultés rencontrées par le cinéaste pour sortir son film. Effectivement, le cinéphile d’aujourd’hui peut lire Andreï Roublev comme une œuvre autobiographique contant la difficulté d’un artiste tel que Tarkovski à créer une œuvre belle et pure au cœur d’un régime barbare. De même, avec l’épisode du fondeur de cloche, Tarkovski évoque la filiation entre son père poète et lui-même. L’histoire du vrai peintre Andreï Roublev n’est donc qu’un prétexte pour parler du temps présent et des doutes et inquiétudes de Tarkovski, prisonnier d’un régime autoritaire.

Une réalisation d’une beauté à couper le souffle

Avec sa sublime photographie en noir et blanc qui fait souvent référence aux tableaux de Bruegel, ses acteurs inspirés, dont le toujours magnifique Nikolaï Bourliaïev, très émouvant en jeune apprenti, et sa caméra virevoltante qui ose tous les défis lors de plans-séquence démentiels, Andreï Roublev est sans contestation aucune un pur chef d’œuvre, de ceux qui comptent à jamais dans la vie d’un cinéphile. Considéré aujourd’hui comme l’un des plus beaux films de tous les temps, il ne fut pourtant pas beaucoup diffusé à l’époque de sa sortie, trois longues années après sa réalisation. Une injustice largement réparée depuis.

Le test blu-ray :

Andreï Roublev, la jaquette

© 1966 Mosfilm / © 2017 Potemkine Films – Agnès B Cinéma / Conception graphique : Bombaliska!. Tous droits réservés.

Les compléments : 4 / 5

La galette contient comme pour le reste de la collection un passionnant entretien avec Eugénie Zvonkine (24mn) qui rappelle tout d’abord les difficultés rencontrées par Tarkovski pour concrétiser sa vision. Puis, elle choisit d’analyser le métrage à partir de quatre angles d’attaque très pertinents. Ses analyses sont toujours aussi précieuses, claires et là encore sans volonté de sur interpréter l’œuvre étudiée. On apprécie décidément beaucoup ces modules.

Ensuite, on peut suivre un court entretien (4mn) avec l’acteur Youri Nazarov qui livre quelques anecdotes et un module muet (5mn) où l’on peut observer Tarkovski sur le tournage de la séquence guerrière. Mais la cerise sur le gâteau vient de la présence de la version intégrale du film, avant que les autorités soviétiques ne réalisent des coupes. D’une durée de 3h26, cette version (présentée dans une copie moins restaurée) propose donc quelques scènes rallongées, ainsi que des plans gore plus explicites. On voit donc que la censure de l’époque n’a pas beaucoup apprécié l’extrême violence du film.

L’image : 5 / 5

Tout bonnement parfaite, la copie proposée mérite amplement son appellation HD tant elle nous permet de redécouvrir le film dans toute sa splendeur originelle. La profondeur de champ est à couper au rasoir, la précision impeccable et le petit grain argentique est toujours bien présent, respectant scrupuleusement la volonté des auteurs.

Le son : 4 / 5

Deux pistes en DTS HD Master Audio sont disponibles, l’une en mono et l’autre en 5.1 (les deux en VOstf). Peu de différences toutefois puisque la seconde se contente de spatialiser un peu plus les quelques envolées musicales. L’ensemble est de très bonne tenue car aucun souffle n’est à déplorer, ni la moindre saturation.

Critique du film et test blu-ray : Virgile Dumez

Les sorties de la semaine du 19 novembre 1969

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Andreï Roublev, l'affiche du film

© 1966 Mosfilm. Tous droits réservés.

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Andreï Roublev, l'affiche du film

Bande-annonce d'Andreï Roublev (VOsta)

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