Amants est un thriller domestique qui ne parvient pas à convaincre pleinement à cause d’un script où coïncidences et hasards servent de béquilles à une intrigue peu crédible. Les comédiens, eux, sont tous formidables.

Synopsis : Lisa et Simon s’aiment passionnément depuis leur adolescence et mènent la vie urbaine et nocturne des gens de leur âge. À la suite d’une soirée qui tourne mal et dont l’issue n’est autre que la prison pour Simon, il décide de fuir. Lisa attend alors des nouvelles de Simon qui ne viendront jamais. Trois ans plus tard, dans l’Océan Indien, elle est mariée à Léo quand leurs destins se croisent à nouveau…

Nicole Garcia à la barre d’un thriller au scénario divisé en trois parties

Critique : Alors que Nicole Garcia est en recherche d’un sujet pour un nouveau long-métrage après l’intéressant Mal de pierres (2016), son coscénariste habituel Jacques Fieschi lui soumet une idée qu’il envisageait initialement de développer sous forme de roman. Ainsi démarre l’aventure d’Amants que Nicole Garcia envisage comme un moyen d’aborder un genre qu’elle affectionne, à savoir le thriller. Toutefois, avec l’aide de son scénariste, elle y ajoute un certain nombre de ses préoccupations personnelles comme cette fascination / répulsion pour le monde de l’argent que la réalisatrice a déjà abordé dans le célèbre Place Vendôme (1998) avec Catherine Deneuve.

Dans Amants, le chiffre qui organise l’intégralité du long-métrage est le trois. Divisé en trois chapitres qui correspondent à trois lieux différents et mettant en scène l’histoire de trois personnages, Amants fait donc preuve d’une grande rigueur dans la construction narrative et l’élaboration de son concept. Toutefois, nous verrons plus loin que cette qualité peut également se retourner contre le film lui-même.

Deux premiers segments qui ouvrent de belles perspectives

Effectivement, le premier segment parisien nous invite à suivre l’histoire d’amour de deux jeunes gens – Pierre Niney, égal à lui-même dans les moments de tension, et Stacy Martin, plutôt juste en amoureuse transie – dont l’ordinaire est toutefois constitué d’un petit trafic de drogues. Dès le départ, Amants pose ses personnages comme étant des victimes consentantes d’un système capitaliste qui vend du rêve aux ambitieux. Cela ne rend d’ailleurs pas forcément les protagonistes très attachants, mais ne dérange pas trop au sein de l’univers du thriller. Une fois les personnages posés, le drame initial est plutôt bien amené et entraîne donc le spectateur dans une histoire qui ouvre de nombreuses perspectives.

© 2021 Les Films Pelléas – Mars Films – Mars Cinéma – France 3 Cinéma – Impala – Pauline’s Angel / Photo Roger Arpajou. Tous droits réservés / All rights reserved

Cette partie parisienne réussie est suivie par une ellipse temporelle et spatiale et l’on retrouve l’héroïne à l’île Maurice, cette fois-ci mariée à un magnat des assurances incarné avec beaucoup d’autorité par Benoît Magimel. Là encore, le spectateur saisit assez rapidement les fêlures qui font de ce couple un binôme bancal. L’homme est ici clairement dans une position sociale dominante et la jeune femme y a trouvé un certain confort matériel, même si l’amour n’est pas vraiment au rendez-vous. Intervient alors la première des coïncidences d’une trop longue série, puisque son jeune amoureux en fuite a justement refait sa vie sur cette île. Nicole Garcia met donc en place un énième triangle amoureux comme on a pu en voir des milliers au cœur d’un certain cinéma français bourgeois.

Une dernière partie décevante par excès de coïncidences peu crédibles

Mais le pire intervient lors de la troisième partie qui se déroule dans le cadre aseptisé de Genève. Dans ce segment où tous les fils doivent se nouer, les auteurs ont eu à nouveau recours à des coïncidences auxquelles on a bien du mal à croire. De même, les réactions de certains personnages ne semblent pas crédibles. Certes, Nicole Garcia évite une fin trop sensationnaliste qui serait trop attendue, mais sa conclusion n’est pas pour autant convaincante. Dans cette partie, le montage apparaît nettement moins fluide, avec parfois des ellipses étranges ou au contraire des scènes qui paraissent inutiles ou redondantes.

Enfin, sa critique d’un monde froid fondé uniquement sur des rapports d’argent, de pouvoir et de possession n’est en rien nouvelle et ne nous apporte donc pas grand-chose, alors que le thriller se délite scène après scène.

Les acteurs sauvent en partie les meubles

Bien entendu, il y a des choses positives dans Amants, comme l’interprétation impeccable de l’ensemble du casting, avec mention spéciale pour Magimel ou, dans des rôles plus secondaires, Grégoire Colin et Christophe Montenez. Enfin, il faut saluer la jolie musique composée par Grégoire Hetzel qui enrichit bon nombre de scènes par ailleurs filmées un peu platement.

Sans être un ratage intégral, Amants est donc une déception de la part d’une actrice et réalisatrice dont on estime généralement le travail, mais qui a livré ici un film quelque peu bancal, desservi par des personnages auxquels il est bien difficile de s’identifier.

Critique de Virgile Dumez

Les sorties de la semaine du 17 novembre 2021

© 2021 Les Films Pelléas – Mars Films – Mars Cinéma – France 3 Cinéma – Impala – Pauline’s Angel / Affiche : Le Cercle Noir pour Silenzio. Photo Roger Arpajou. Tous droits réservés / All rights reserved