Toy Story 4 délivre forcément un final émouvant, mais bien trop balisé pour être au niveau de ses prédécesseurs. C’est que cette saga sur trois décennies peine aujourd’hui à nous surprendre.
Synopsis : Woody a toujours privilégié la joie et le bien-être de ses jeunes propriétaires – Andy puis Bonnie – et de ses compagnons, n’hésitant pas à prendre tous les risques pour eux, aussi inconsidérés soient-ils. L’arrivée de Forky un nouveau jouet qui ne veut pas en être un dans la chambre de Bonnie met toute la petite bande en émoi. C’est le début d’une grande aventure et d’un extraordinaire voyage pour Woody et ses amis. Le cowboy va découvrir à quel point le monde peut être vaste pour un jouet…
Une logique logistique
Critique : Après Le monde de Nemo 2, Cars 3 et Les Indestructibles 2, voici Toy Story 4. Chez Pixar, les numéros l’affirment, il n’est plus question ici de démarche essentiellement créative, mais plutôt d’une logique logistique, qui, si elle peut irriter, n’est pas forcément pour nous déplaire. Les trois premiers Toy Story ont été chacun, à leur façon et à leur époque, des chefs d’oeuvre qui ont marqué le cinéma d’animation. Le troisième Toy Story est même le meilleur film Pixar de la dernière décade. Une éblouissante réussite.
Une oeuvre d’émotion qui arrive après Coco
On est moins convaincu par le pourtant très honorable, mais pas vénérable, Toy Story 4. Parce que ce chapitre final joue beaucoup sur l’émotion avec ses routes qui se séparent et des projets de vie qui, forcément, après trois décennies à croiser nos propres destinées, reflètent beaucoup nos propres existences. Néanmoins, Toy Story 4 et son émotion de série, à la fois évidente et attendue, passe après la profondeur de Vice-Versa et de Coco, les deux derniers authentiques chefs d’oeuvre du studio Pixar qui, de par leurs thématiques adultes, leur rapport pour l’un à la nostalgie et au deuil pour le second, revêtaient un caractère universel bouleversant.
A middle-class Toy Story
Toy Story 4, de par son décor très américain assez terre-à-terre, loin du déballage visuel fantastique offert par le troisième volet (la scène de la décharge reste encore dans bien des esprits), fait moins rêver, malgré la séquence de la fête foraine très chargée. L’esprit middle-class qui habite ce segment, pour toucher avec générosité à l’affect de l’Américain moyen, y est pour quelque chose. Les personnages humains qui ponctuent le film en sont la démonstration et à vrai dire, l’on ne ressent rien pour eux, même pour la petite Bonnie qui succède à Andy, gamine trognonne qui s’est entichée d’une fourchette en plastique comme nouveau jouet (le personnage de Forky est la vraie bonne idée du film !), car l’on ne se retrouve jamais en eux. Un océan Atlantique s’étale entre eux et nous, coupant un peu l’exercice d’appropriation des émotions.
A la recherche du doudou perdu
Evidemment, tout se situe à hauteur de jouet. Mais là encore, les trois films précédents ont déjà tout dit. Les modes qui passent, les modèles qui tournent vintage, les jouets qui se cassent et dont on se sépare, le sentiment d’abandon et la nécessité de transmission, la perte du jouet perdu… On retrouve tout cela dans ce road-trip enjoué qui finit par planter ses ressorts dans un magasin d’antiquité (forcément), où une poupée va fomenter un plan pour s’approprier la voix de fabrication de Woody. Lui est à la recherche du doudou de la petite Bonnie, cette insolite petite fourchette en plastique qui cherche par tous les moyens à regagner la boîte à ordures la plus proche, puisque dans son ADN de couvert jetable, elle se voit comme un déchet et non un jouet. Dépression, quand tu nous gagnes…
Le cowboy et sa bergère vous transmettent leur message d’adieu
Avec l’aide de la bergère en porcelaine du second volet, qui fait un come-back remarqué au premier plan du casting jouet, affublée d’un nouveau look et d’une personnalité plus forte, de Buzz l’éclair et de quelques joyeux drilles latinos, Woody voit son rôle évoluer, devenant plus un passeur, paternel et philosophe, dans un exercice de transmission, qu’un vrai premier rôle tonitruant, avec le panache des premiers films.
Il faut que jeunesse se passe. Et effectivement, elle est passée. Pour eux, pour nous. L’on retiendra donc volontiers le message du film et l’on passera à autre-chose pour éviter le recyclage, tout en conseillant avidement le spectacle aux plus jeunes des spectateurs, qui y trouveront le savoir-faire évident des animateurs Pixar, puisque, malgré nos réserves, le film n’en demeure pas moins brillant dans son art.
Critique : Frédéric Mignard