Sitcom : la critique du film (1998)

Comédie, Trash | 1h25min
Note de la rédaction :
7,5/10
7,5
Sitcom, l'affiche du François Ozon

  • Réalisateur : François Ozon
  • Acteurs : François Marthouret, Lucia Sanchez, Jean Douchet, Évelyne Dandry, Marina de Van, Adrien de Van, Stéphane Rideau
  • Date de sortie: 27 Mai 1998
  • Nationalité : Français
  • Scénariste : François Ozon
  • Directeur de la photographie : Yorick Le Saux
  • Compositeur : Éric Neveux
  • Distributeur : Mars Films
  • Editeur vidéo : Le Studio Canal + (VHS) / Film Office (DVD édition 2001) / StudioCanal (DVD édition 2016 et Blu-ray)
  • Sortie vidéo (blu-ray) : 1er mars 2020
  • Budget : 650 000 euros (5e fiction française la plus rentable de 1998)
  • Box-office France / Paris-périphérie : 200 221 entrées / 70 262 entrées
  • Rentabilité : 95%
  • Classification : Interdit aux moins de 12 ans
  • Format : 1.66 : 1 / Son : Stéréo Dolby SR
  • Festivals et prix : Semaine de la critique, Cannes 1998 / Prix de la meilleure actrice pour Evelyne Dandry au festival de Sitges 1998 / Prix de la meilleure actrice pour Evelyne Dandry et prix de la meilleure contribution artistique pour Yorick Le Saux au festival de Namur 1998.
  • Crédits affiche : © 1998 Fidélité Productions - Le Studio Canal + / Affiche : Jean-Claude Moireau (photographe) - SKT7 (agence). Tous droits réservés.
Note des spectateurs :

Premier long de François Ozon, Sitcom est une furieuse comédie trash qui ose absolument tout sans aucun filtre. Définitivement culte, malgré quelques défauts.

Synopsis : Le père est ingénieur, la mère partage son temps entre ses cours de gym et ses séances de psychothérapie, le fils est un étudiant en droit fort sérieux, la fille est artiste et la femme de ménage un peu fofolle. Bref, une famille ordinaire. Toute cette apparente harmonie va éclater avec l’arrivée d’un personnage inattendu : un rat.

Un premier film trash sur les traces de John Waters et Almodóvar

Critique : Sorti en 1994 de la Femis, François Ozon enchaîne les années suivantes les courts et moyens-métrages, produits par la toute jeune société Fidélité Productions dirigée par Olivier Delbosc et Marc Missonnier. Ils parviennent même à sortir dans les salles le moyen-métrage Regarde la mer (1997) avec Marina de Van, pourtant handicapé par une durée inhabituelle de 52 minutes. Cela préparait pourtant le terrain pour le premier vrai long-métrage du jeune réalisateur, la comédie trash Sitcom (1998) qui permettait à l’auteur de retrouver La Semaine de la critique à Cannes, deux ans après la diffusion de son court métrage Une robe d’été , une édition de la Semaine particulièrement trash puisqu’aux côtés de Sitcom figuraient Seul contre tous de Gaspar Noé et le premier Torrente de Santiago Segura

Sitcom, la jaquette du blu-ray

© 1998 Fidélité Productions – Le Studio Canal + / Affiche : Jean-Claude Moireau (photographe) – SKT7 (agence). Tous droits réservés.

Homosexuel déclaré, François Ozon s’inscrit avec ce premier long dans la mouvance d’un certain cinéma gay à forte tendance trash. On pense bien évidemment aux outrages de John Waters, aux premières œuvres de Pedro Almodóvar, ou encore aux excès d’un certain Rainer Werner Fassbinder. De ses maîtres à filmer, Ozon reprend une esthétique fondée sur des couleurs violentes, volontairement kitsch, et sur une mise en scène assez basique afin d’évoquer les fameuses sitcoms du titre.

Ozon ou l’art d’exploser toutes les conventions

Tout comme dans ce genre télévisuel qui décrit généralement les petits problèmes quotidiens de personnages issus de la bourgeoisie, François Ozon semble se lover dans les stéréotypes durant le premier quart d’heure du film. Il nous présente une petite famille qui semble initialement bien sous tous rapports. Toutefois, on sent déjà planer comme une ombre sur cet univers terriblement corseté, visiblement prêt à imploser.

Ozon suit alors les préceptes de Pier Paolo Pasolini et de son Théorème (1968) en introduisant un grain de sable dans cette formidable mécanique de précision. Ici, il s’agit d’un simple petit rat qui va cristalliser toutes les tensions internes de la famille et déclencher un tourbillon de réactions imprévisibles. La mécanique comique se met en branle avec le coming-out du jeune fils incarné avec talent par Adrien de Van. Au sein de cette famille bourgeoise, l’homosexualité n’est pas nécessairement mal considérée, mais elle fait ressortir toutes les frustrations sexuelles de l’entourage du jeune garçon.

Un festival de situations trash hilarantes

Dès lors, tous les personnages vont se livrer aux pires turpitudes sexuelles dans un grand bain de libération qui emporte toutes les valeurs morales sur son passage. Ozon ose tout dans ce premier long : l’homosexualité, les parties fines à plusieurs, la pédophilie, le sadomasochisme, la zoophilie et même une séquence d’inceste assez hallucinante où la mère de famille tente de remettre son fiston sur le droit chemin (entendez par-là l’hétérosexualité).

Dans ce grand défouloir général, le spectateur ouvert d’esprit ne pourra que rire aux éclats face à un tel déballage. Bien entendu, les autres risquent fort d’être indisposés devant cette volonté d’explorer les tréfonds de l’âme humaine par le trash.

Une partition exécutée au cordeau par tous les acteurs

Toutefois, l’air de rien, François Ozon évoque en filigrane le manque d’amour au sein des familles traditionnelles, la frustration sexuelle qui peut se nicher au cœur des vieux couples hétérosexuels (surtout si le patriarche réprime ses tendances gays) et la puissance de répression d’une société normée qui refuse la différence.

Tout ceci ne serait pas aussi drôle sans la partition impeccable jouée par tous les acteurs. On adore notamment le personnage borderline interprété par Marina de Van. Stéphane Rideau n’hésite pas à se mettre en danger en apparaissant dans une tenue SM improbable. Enfin, Évelyne Dandry s’impose comme une très grande actrice dans le rôle délicat de la mère angoissée et frustrée.

Sitcom apparaît donc aujourd’hui comme un premier film assez enthousiasmant, et ceci malgré une fin un peu précipitée qui n’est pas totalement convaincante. Il s’agissait en tout cas d’un film osé qu’il est bon de revisiter en ces jours de cinéma formaté où l’humour trash semble désormais banni de l’espace public pour cause de bienveillance institutionnalisée.

Critique du film : Virgile Dumez

Les sorties de la semaine du 27 mai 1998

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Sitcom, l'affiche du François Ozon

© 1998 Fidélité Productions – Le Studio Canal + / Affiche : Jean-Claude Moireau (photographe) – SKT7 (agence). Tous droits réservés.

Box-office :

Sorti sur 9 salles par Mars Films le 27 mai 1998, Sitcom démarrait à 2 629 spectateurs pour son premier jour parisien, soit autant  que Sophie Marceau dans Firelight, gros échec avec 2 957 fans sur 26 écrans. Ce mercredi était assez moribond, Deep Impact manquait de punch avec 15 277 entrées dans 45 cinémas. Kundun de Scorsese était à la recherche de son public (5 952 entrées dans 27 cinémas) et la série B Columbia TriStar, Un tueur pour cible traquait pour son premier jour parisien 4 106 spectateurs sur 25 sites.

A l’issue de sa première semaine, le micro budget de François Ozon sera une excellente affaire : 45 908 entrées dans 45 cinémas, dont 21 267 franciliens dans 9 cinémas qui faisaient salles pleines : l’UGC George V/Ciné-Cité les Halles, le Gaumont Opéra Premier, les 5 Caumartin, le MK2 Odéon/Bastille, les Parnassiens, l’Escurial Panorama.

Alors que la comédie trash grimpe à 53 spectateurs sur la France et 10 à Paris, les entrées baissent de 45% en 2e semaine, pour se stabiliser magnifiquement en 3e semaine (-4%), durant laquelle la tuerie de Ozon détournait encore 26 904 Français et se hissait au-dessus des 100 000 amateurs de curiosités underground.

Au final, Sitcom et son rat maléfique sera célébré par 200 221 spectateurs. Sur Paris, l’UGC Ciné Cité les Halles le gardera 11 semaines à domicile, avant de le renvoyer dans les enfers de l’UGC Orient Express pour deux petites semaines, où il finit à 338 spectateurs. D’autres cinémas à séances hebdomadaires uniques convoqueront son délire. Au total, il restera 20 semaines à l’affiche sur paname, lâché par le Lucernaire quand celui-ci ne rassemblera plus qu’une trentaine de spectateurs sur cette semaine-là (total de  70 232).

Frédéric Mignard

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