Police : la critique du film d’Anne Fontaine (2020)

Drame, Policier | 1h39min
Note de la rédaction :
6/10
6
Police, l'affiche

  • Réalisateur : Anne Fontaine
  • Acteurs : Omar Sy, Virginie Efira, Grégory Gadebois, Payman Maadi, Saïd Benchnafa
  • Date de sortie: 02 Sep 2020
  • Nationalité : Français, Belge, Chinois
  • Titre original : Police
  • Titres alternatifs : Night Shift (USA) / Nocny konwój (Pologne) / Bis an die Grenze (Allemagne) / Ronda Noturna (Brésil)
  • Année de production : 2020
  • Scénariste(s) : Claire Barré, Anne Fontaine, d'après le roman Police de Hugo Boris
  • Directeur de la photographie : Yves Angelo
  • Compositeur : -
  • Société(s) de production : F Comme Film, Ciné@, StudioCanal, France 2 Cinéma, France 3 Cinéma, Scope Pictures, Korokoro, La Banque Postale Image 13, Bona Film Group
  • Distributeur (1ère sortie) : StudioCanal
  • Distributeur (reprise) : -
  • Date de reprise : -
  • Éditeur(s) vidéo : StudioCanal (DVD et blu-ray)
  • Date de sortie vidéo : 6 janvier 2021 (DVD et blu-ray)
  • Box-office France / Paris-périphérie : 196 781 entrées / 65 285 entrées
  • Box-office nord-américain : -
  • Budget : 10,2 M d'euros
  • Rentabilité : -
  • Classification : Tous publics
  • Formats : 2.39 : 1 / Couleurs / Son : Dolby Digital
  • Festivals et récompenses : Berlinale 2020 : Berlinale spécial / Sélection au Festival de Beaune 2020
  • Illustrateur / Création graphique : Photo (C) F comme Film, Ciné-@ et Thibaut Grabherr
  • Crédits : StudioCanal
Note des spectateurs :

Avec Police, Anne Fontaine livre un film intimiste qui déploie un discours humaniste intéressant, et ceci malgré quelques maladresses d’écriture. Les acteurs sont pour beaucoup dans la réussite de l’entreprise.

Synopsis : Virginie, Erik et Aristide, trois flics parisiens, se voient obligés d’accepter une mission inhabituelle : reconduire un étranger à la frontière. Sur le chemin de l’aéroport, Virginie comprend que leur prisonnier risque la mort s’il rentre dans son pays. Face à cet insoutenable cas de conscience, elle cherche à convaincre ses collègues de le laisser s’échapper…

L’adaptation d’un roman introspectif

Critique : En 2016, le romancier Hugo Boris publie chez Grasset le livre Police que découvre le producteur Jean-Louis Livi. Celui-ci confie l’ouvrage à la réalisatrice Anne Fontaine qui se passionne immédiatement pour cette histoire mettant en scène des policiers dans leur quotidien, tout en posant des questions essentielles sur le respect des droits humains et d’un autre côté l’obéissance aux ordres donnés. Dès le départ, il ne s’agissait donc pas de réaliser un film de genre, mais bien une introspection autour d’une question morale, comme pouvaient le faire autrefois des cinéastes américains comme Richard Brooks.

Police, photo 1

© 2020 StudioCanal – France 2 Cinéma – France 3 Cinéma – Scope Pictures – Korokoro / Photographie : Stéphanie Cornfield. Tous droits réservés.

D’ailleurs Anne Fontaine précise dans le dossier de presse que :

Quand nous le préparions, Yves Angelo et moi, je lui disais en plaisantant : « Ce film c’est Bergman chez les flics. » Que se passe-t-il dans la tête de ces policiers ? Qu’est-ce qu’ils expriment dans leurs regards ? Que nous donnent-ils à penser ?

Des êtres cabossés par l’existence

Afin de donner plus de poids aux scènes suivantes, Anne Fontaine débute son film par la présentation du quotidien des trois policiers incarnés avec beaucoup de justesse par Virginie Efira, Omar Sy et Grégory Gadebois. En utilisant un artifice de montage, elle nous présente donc trois fois les mêmes actions filmées selon les points de vue différents des trois protagonistes. Elle en profite pour effleurer la vie privée de chacun à l’aide de flashback qui sont parfois maladroitement amenés et n’apportent finalement qu’un éclairage limité sur la suite des événements. Effectivement, ces séquences n’ont en réalité qu’un seul but : démontrer s’il en était besoin que les policiers sont des gens comme les autres, empêtrés dans leurs problèmes quotidiens et donc qu’ils ne peuvent en aucun cas être réduits à leur fonction. Ces êtres cabossés par l’existence permettent en tout cas au spectateur de s’y identifier avec plus d’aisance.

Parallèlement, Anne Fontaine évoque le cas d’un réfugié qui doit être reconduit dans son pays par avis d’expulsion. Interprété avec intériorité et force par l’Iranien Payman Maadi, l’homme restera un mystère du début à la fin du film, muré dans un silence qui en dit long sur les souffrances vécues dans son pays (ici le Tadjikistan). La réalisatrice n’explique en rien son parcours et s’interroge même sur la véracité de son histoire personnelle. Mais elle cherche avant tout à donner chair à un migrant que l’on expulse. Elle s’empare donc d’un unique destin qu’elle cherche à retranscrire de la manière la plus humaniste possible.

Derrière les chiffres, une réalité bien humaine

Face à la décision étatique autoritaire, comment vont réagir ces trois policiers chargés de le transporter jusqu’à l’aéroport ? Vont-ils obéir aux ordres servilement ? Vont-ils s’émouvoir de la situation au point de s’affranchir de la décision administrative ? Voilà les questions morales soulevées par Police qui devient un alors un road movie où s’affrontent les positions de chacun des policiers.

Police, photo 2

© 2020 StudioCanal – France 2 Cinéma – France 3 Cinéma – Scope Pictures – Korokoro / Photographie : Thibault Grabherr. Tous droits réservés.

Si ce passage est le plus lent et le plus statique, il comporte toutefois son lot d’interrogations et permet de donner une profondeur humaine à une situation qui ne donne lieu généralement qu’à des comptes-rendus chiffrés dans les médias. Ainsi, les commentateurs évoquent des reconduites à la frontière en donnant des chiffres qui sont finalement abstraits. Police a donc le grand mérite de mettre un visage sur ce phénomène et de le traiter à échelle humaine. Le long-métrage profite également d’une belle ambiance nocturne qui lui donne un cachet supplémentaire, comme une parenthèse dans l’existence de chaque protagoniste.

Police ou l’histoire d’un cuisant échec commercial

Malheureusement, on peut regretter les choix narratifs effectués dans le dernier quart d’heure qui perd fortement en crédibilité, tout en ne résolvant pas vraiment les intrigues personnelles des différents protagonistes. Alors qu’Anne Fontaine avait réussi jusque-là à signer une œuvre épurée et toute en suggestion, elle se fait soudain plus insistante et démonstrative, au risque de s’aliéner une partie du public. C’est d’autant plus dommage que l’ensemble des comédiens joue juste.

D’abord annoncé pour le mois d’avril 2020, Police a vu sa sortie repoussée pour cause de crise sanitaire et de fermeture des cinémas. Il a ensuite été proposé dans les salles à partir du 2 septembre 2020. Toutefois, le long-métrage a fait l’objet d’un véritable rejet de la part du grand public avec une première semaine française à 84 682 spectateurs et une chute spectaculaire des entrées (52 %) lors de sa deuxième semaine (39 985 rescapés dans un réseau de plus de 400 salles). Au final, le long-métrage qui a coûté plus de 10 millions d’euros n’a été vu que par 196 781 curieux, devenant l’un des accidents industriels de l’année 2020. Un résultat plutôt injuste pour une tentative certes inégale mais courageuse de s’affranchir des règles du genre policier.

Critique de Virgile Dumez

Les sorties de la semaine du 2 septembre 2020

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Photo (C) F comme Film, Ciné-@ et Thibaut Grabherr / Copyrights StudioCanal – France 2 Cinéma – France 3 Cinéma – Scope Pictures – Korokoro

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