Persona non grata est un thriller âpre et viril solidement ancré dans la réalité sociale contemporaine, néanmoins parasité par l’irruption d’un personnage aux contours mal définis.
Synopsis : José Nunes et Maxime Charasse sont amis et associés minoritaires dans une entreprise de BTP en difficulté. Devant la nécessité de protéger leurs intérêts, ils prennent une décision radicale et se retrouvent liés par un sombre secret.
Alors qu’ils commencent à entrevoir un avenir meilleur, un étrange personnage fait irruption dans leurs vies, leur rappelant que rien ne peut complètement s’effacer.
Critique : Après quelques comédies et drames plutôt réussis tels que Omar m’a tuer ou Chocolat entre autres, le comédien-réalisateur Roschdy Zem s’essaie à un nouveau genre pour sa cinquième réalisation , inspirée du film brésilien O Invasor. S’il continue de scruter avec toujours la même acuité à la fois les inégalités sociales et l’ambiguïté de l’être humain, il fait fi de l’émotion qui avait jusqu’à présent enrichi ses œuvres et nous livre cette fois un drame à la noirceur déstabilisante.
© 2019 Bizibi – Mars Films. Tous droits réservés.
A travers le parcours de deux hommes ordinaires, (Nicolas Duvauchelle et Raphaël Personnaz) apparemment bien sous tous rapports, qui, poussés par l’appât du gain et la soif de reconnaissance, voient leur vie basculer du mauvais côté, il esquisse sans état d’âme une étude psychologique autour des faiblesses et des travers inhérents à l’être humain et de ses conséquences. La complexité des personnages dont les caractéristiques ne sont révélées qu’à petites touches, associée à un décor de contrates entre terre et mer qu’éclaire le soleil métallique de ce coin de Languedoc laisse augurer d’ un suspense captivant.
José (Nicolas Duvauchelle), tiraillé entre ses valeurs morales et la réalité de la vie, est envahi par les regrets et la peur tandis que Maxime (Raphaël Personnaz), sûr de cette ligne de conduite qui le pousse à accumuler les biens en gage de réussite, tente mollement de nous convaincre de sa force de résistance face à ces magouilles qui le dépassent. Ils n’auront guère le temps de s’appesantir sur leurs états d’âme, puisqu’un coup de caméra brutal les met face à un personnage mi-diable, mi-amuseur public, méchant reflet de leur conscience.
La belle amorce du thriller de départ est stoppée nette pour ne se concentrer que sur ce manipulateur caricatural et grotesque à qui Roschdy Zem prête ses traits avec un enthousiasme si peu partagé qu’il suscite la gêne. Et ce n’est pas le vague saupoudrage autour d’une justice sociale toujours prompte à écraser les plus faibles pour ne leur laisser que les miettes qu’ils accommoderont comme ils pourront, quitte à franchir le seuil de l’immoralité qui relance l’intérêt de l’intrigue.
Reste une mise en scène à la vigueur certaine, qui grâce à une caméra perpétuellement en mouvement, se révèle tout aussi capable de capter les jeux d’ombre et de lumière de scènes rythmées que de restituer avec précision les différentes expressions des visages de ses héros. Néanmoins, il en faudrait un peu plus pour permettre à Persona non grata de se hisser parmi les meilleurs crus des films noirs à la française.
Critique : Claudine Levanneur
© 2019 Bizibi – Mars Films. Tous droits réservés.