Malasaña 32 est un petit film de maison hantée espagnol plutôt efficace, à défaut d’être original, puisqu’on y retrouve des ambiances à la James Wan. Sympathique, grâce à des acteurs de qualité.
Synopsis : Madrid, 1976. La famille Olmedo s’installe dans le quartier de Malasaña. Mais il y a quelque chose que la famille ne sait pas encore : dans l’appartement qu’ils ont acheté, ils ne sont pas seuls.
Un film de maison hanté sous hautes influences
Critique : Après avoir tourné de nombreux courts-métrages et avoir coréalisé le film Matar a Dios (présenté en France au PIFFF en 2017), le cinéaste Albert Pintó est pour la première fois seul aux commandes de Malasaña 32 (2020). S’il n’est aucunement à l’origine du scénario, Pintó a cherché à y insuffler toute sa science de la mise en scène pour créer une atmosphère anxiogène afin d’égaler certains jalons du cinéma horrifique ibérique.
Même si l’intrigue est située à Madrid, l’appartement qui sert de cadre principal ressemble fortement à celui vu dans le très barcelonais [REC] (Balaguero, 2007) et l’on imagine que cette proximité stylistique n’est pas un hasard de la part d’un réalisateur cinéphile. Ainsi, de nombreuses références – volontaires ou non – parsèment ce long-métrage. On songe notamment dès le début à Poltergeist (Hooper, 1982) par l’intervention d’un spectre qui investit la télévision pour mieux séduire le gamin de la famille.
Les œuvres de James Wan dans le viseur
Mais l’ensemble du film ressemble surtout à s’y méprendre aux œuvres plus récentes de James Wan. Très clairement sous l’influence de Conjuring, les dossiers Warren (2013) ou encore d’Insidious (2010), Albert Pintó se plaît à utiliser un certain nombre de jump scares pour effrayer. Mais il est également capable de créer une véritable ambiance tendue lorsqu’il le désire et certains passages se révèlent véritablement terrifiants.
Pour cela, il est parvenu à nous impliquer immédiatement dans la destinée de cette petite famille dont les personnages sont caractérisés de manière claire dès les premières minutes du film. Ainsi, aucun personnage n’est irritant, mais bien au contraire, l’attachement se fait immédiat pour ces ruraux qui tentent de trouver une vie meilleure en ville, et notamment ici dans la capitale madrilène. Il faut préciser que l’intrigue se situe judicieusement en 1976, soit tout juste après la mort du dictateur Franco, à un moment charnière de la vie politique espagnole.
La métaphore de la fin de l’enfermement franquiste
A l’heure où le pays va enfin pouvoir sortir de son isolement, les personnages symbolisent donc l’espoir d’une vie meilleure en ville, loin des mentalités étriquées du village. D’ailleurs, le choix de cette période n’est aucunement fortuit quand l’on connaît la fin du long-métrage (que nous ne révélerons pas bien évidemment). Effectivement, le nerf de l’intrigue repose sur l’oppression exercée par le catholicisme intransigeant déployé durant la dictature franquiste. Finalement, le spectre qui hante les lieux n’est donc qu’une victime de plus d’un régime politique atroce et qui a laissé des traces indélébiles au cœur de la société espagnole.
On peut sans doute regretter que cette métaphore ne soit pas plus approfondie au sein de cette œuvre qui cherche avant tout à faire peur. Ainsi, le réalisateur n’échappe pas toujours à la redite, et parfois le scénario semble tourner dangereusement en rond. De même, on a du mal à comprendre pourquoi les différents membres de la famille qui sont chacun sujet à des agressions surnaturelles n’en parle pas aux autres. Certes, il s’agit ici d’une famille dysfonctionnelle, mais la crédibilité en souffre sérieusement.
Des acteurs impliqués pour un film efficace, mais manquant de personnalité
Malgré ces défauts inhérents au genre de la maison hantée, Malasaña 32 peut compter sur le jeu assuré de l’ensemble des acteurs dont la jeune Begoña Vargas, ainsi que l’imposant Iván Marcos. On peut ajouter la belle prestation du gamin Iván Renedo, à la fois mignon et parfaitement à l’aise pour jouer la peur. Le film dispose d’une belle photographie, d’effets réussis et d’une musique efficace.
Il s’agit donc d’un métrage agréable, qui sera toutefois assez vite oublié car il manque d’une vraie personnalité pour se démarquer du lot des productions vues sur plateforme. Sorti au cinéma dans de nombreux pays d’Asie et en Amérique latine, Malasaña 32 continue la longue tradition de films espagnols restés inédit sur le sol français. StudioCanal a décidé de sortir le métrage directement en VOD et sur sa propre plateforme Canal +. Il faut dire que la crise de la Covid-19 est également passée par-là.
Critique de Virgile Dumez
Voir le film en VOD
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Albert Pintó, Begoña Vargas, Iván Marcos, Bea Segura, Sergio Castellanos, José Luis de Madariaga