Liste noire : la critique du film (1984)

Action, Thriller | 1h23min
Note de la rédaction :
6/10
6
Liste Noire avec Annie Girardot d'Alain Bonnot s'affiche

Note des spectateurs :

Dernier film en vedette d’Annie Girardot, Liste noire mérite mieux que sa mauvaise réputation. Il s’agit d’une série B carrée, bien ficelée et réalisée avec talent. L’actrice y est d’ailleurs formidable.

Synopsis : Rendue folle de désespoir par la mort de sa fille au cours d’un braquage de banque auquel elle participait, une mère retrouve les complices et les commanditaires du coup.

Un vigilante movie à la française

Critique : Au début des années 80, le cinéma français se lance à corps perdu dans la conception de polars urbains qui cherchent à capter une certaine forme de modernité. Les cinéastes se font ainsi les témoins d’une mutation urbaine qui inquiète, tout en surfant sur la vague des thrillers américains marqués par une violence de plus en plus crue.

Avec Liste noire (1984), le cinéaste Alain Bonnot, auteur d’Une sale affaire (1981) avec Victor Lanoux et Marlène Jobert, cherche à reprendre la thématique du vigilante movie alors très en vogue en le replaçant dans un contexte français. Il reprend donc les grandes lignes de ces œuvres généralement réactionnaires et souvent incarnées par l’acteur Charles Bronson. Toutefois, en lieu et place du célèbre moustachu, il propose le rôle du vigilante à Annie Girardot. Un choix a priori incongru puisque l’actrice est davantage connue pour ses rôles comiques, et occasionnellement pour des drames psychologiques.

Annie Girardot en plein polar très noir

Représentante d’un certain cinéma français à l’ancienne (celui des années 60-70), la star semble donc être en décalage par rapport au genre du polar hard boiled considéré alors comme plus moderne. Hormis la présence de Paul Crauchet, elle est d’ailleurs ici exclusivement entourée de jeunes espoirs du cinéma français d’alors. On songe notamment à Bernard Brieux, Sandrine Dumas ou encore Pascal Tedes. François Marthouret, plus chevronné, confirme également sa belle présence à l’écran en inspecteur compatissant.

Considéré à l’époque par les critiques comme un sommet du film réactionnaire, Liste noire peut être revu aujourd’hui avec davantage de sérénité. Certes, le film suit les mésaventures d’une femme qui venge la mort de sa fille de manière radicale, mais il ne se fait pas pour autant porte-étendard d’une idéologie sécuritaire. Il préfère opter pour la folie meurtrière d’une femme brisée qui, d’ailleurs, s’avère plutôt maladroite dans son élimination progressive des truands ayant trucidé sa progéniture. Sans doute conscients des limites physiques d’Annie Girardot, les auteurs ont privilégié des assassinats crédibles pour une dame mûre affrontant des gangsters aguerris.

Une série B dégraissée jusqu’à l’os

Alors que de nombreux nanars s’invitaient sur les écrans français, Liste noire fait plutôt figure de bonne surprise. Il possède une ambiance sombre bien maîtrisée, une musique synthétique d’Alain Wisniak plutôt intéressante et surtout une réalisation vraiment efficace de la part d’Alain Bonnot. Dégraissée jusqu’à l’os, cette série B rend finalement hommage aux films américains de l’époque, sans être trop ridicule. Tout d’abord, le scénario tient correctement la route, les scènes d’action sont assez nombreuses et tournées avec talent, tandis que le rythme ne faiblit jamais. Chose rare pour les films de cette période, le spectateur ne s’ennuie jamais durant Liste noire.

Bien évidemment, quelques éléments peuvent faire sourire de temps à autre, comme par exemple cette tenue en skaï portée en permanence par Girardot dès l’instant où elle devient une vengeresse. Du véritable cuir aurait fait un autre effet à l’écran, c’est certain. On peut aussi trouver la description des jeunes loubards un peu naïve, mais cela fait également partie du charme de ces productions du début des années 80.

Annie Girardot ou le grand retour avorté

Quoi qu’il en soit, le long-métrage d’Alain Bonnot possède un indéniable charme et tous les amoureux de polars urbains français doivent le reconsidérer de nos jours, d’autant qu’il est porté par une actrice formidable. Annie Girardot se consume littéralement à l’écran, joue la naissance de la folie avec une belle conviction et s’impose une fois de plus comme une personnalité terriblement attachante du cinéma français.

Arrivant après une pause de trois ans dans sa carrière, Liste noire était son grand retour sur les écrans en vedette, mais l’échec du film sur Paris (compensé en partie par des résultats provinciaux plus favorables) a douché ses espoirs de reconquête du public populaire. Une page était en train de se tourner, et malheureusement sans elle. Si l’actrice allait revenir régulièrement au cinéma, ce serait généralement dans des seconds rôles. Liste noire peut donc être considéré comme son chant du cygne cinématographique et sa prestation vraiment remarquable n’en possède que plus de valeur à nos yeux.

Voir la fiche film sur le site Unifrance

Critique de Virgile Dumez

Bandeau Liste Noire avec Annie Girardot

© 1984 Hachette-Fox Productions – NEF Diffusion / Affiche : Michel Landi © ADAGP Paris, 2019 / Claude Genet (photographe). Tous droits réservés.

Box-office & carrière :

Sorti en plein milieu de l’été 1984, un 8 août, le polar Liste noire était une grosse machine commerciale, balancée sur 41 écrans sur la capitale et sa périphérie, où le film allait finir en première position lors de sa semaine d’investiture, avec 84 668 entrées, devant La Triche de Yannick Bellon, un autre polar, et une belle surprise, avec 71 466 spectateurs dans seulement 29 salles.

Où voir Liste noire sur Paris ?

Liste noire était alors présent dans les cinémas suivants : George V, Marignan Pathé, Wepler Pathé, Montparnasse Pathé, Français Pathé, Victor Hugo Pathé, Quintette Pathé, Bastille, Nation, Gaumont Convention, Paramount Maillot, Paramount Galaxie, Mistral, Forum Cinémas, Saint-Lazare Pasquier, Athéna, Fauvette, 14 juillet Beaugrenelle et le Maxéville. Une belle combinaison sur Paname qui couvrait tous les quartiers, et surtout un retour en force pour Girardot, le flingue au point.

La star française, malgré son âge, était donc plus sexy qu’Histoire d’O numéro 2 qui bénéficiait aussi d’une combinaison sur P.P. de 41 écrans, mais réalisait 44 789 entrées… En fait, seuls les coquins de Strasbourgeois allaient placer le film érotique en tête des films de la semaine !

En province, Liste noire réussit un raz-de-marée. Le polar urbain s’accapare de la première place dans toutes les grandes villes du pays, à l’exception de Grenoble, Nice, Nantes et Toulouse où A la poursuite du diamant vert domine encore en 5e semaine. A Rouen, Les Seigneurs de la route, reprise d’une série B avec Stallone, roulait des mécaniques en première place.

Suite et fin de carrière

En 2e semaine, Liste noire s’effrite, malgré 4 salles en plus sur la capitale et sa périphérie, passant honorablement à 54 049 entrées. La comédie Frankenstein 90 avec Eddie Mitchell ouvre en tête… En 3e semaine, Liste noire passe derrière La Triche, avec 40 897 entrées. Avec 22 328 entrées, en 4e semaine, Annie Girardot est certes encore derrière le polar La triche, mais cette fois-ci devant Frankenstein 90 de Jessua qui s’est écroulé.

12 365 (5e), 6 439 (6e), 2 129 (7e), 1 445 (8e), 912 (9e), 866 (10e)… Le vigilante à la française passe dans un cinéma de quartier populaire, le Gaîté Boulevard, en 11e semaine, et réussit ainsi un sursaut à 2 282 spectateurs sur cette salle. Un seul écran, L’Épée de bois, en 12e semaine qui ne lui réussit pas, de nouveau un cinéma de quartier, le Paris Cinéma en 13e semaine, qui le pare de 1 778 spectateurs en plus… La production française réussit à franchir les 230 000 spectateurs, mais le gros de son succès se fera en province où il profitera d’un très haut coefficient Paris-Province, avec un final de 955 398 entrées. Succès estival réussi.

Les polars urbains français des années 80

Les sorties de la semaine du 8 août 1984

Liste Noire avec Annie Girardot d'Alain Bonnot s'affiche

© 1984 Hachette-Fox Productions – NEF Diffusion / Affiche : Michel Landi © ADAGP Paris, 2019 / Claude Genet (photographe). Tous droits réservés.

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