Line of Fire (Only the Brave) est un drame sur l’héroïsme pompeux et mélodramatique, trop américain dans le ton pour émouvoir. Le réalisateur de Tron l’héritage s’est trompé de genre pour laisser sa réalisation briller.
Synopsis : Inspiré d’une histoire vraie. Juin 2013. Comme chaque année l’Arizona est ravagé par les incendies de forêt qui déciment la région. Seuls les pompiers certifiés « hotshots » ont la possibilité de se rendre au plus près de l’ennemi pour le combattre. Eric Marsh, chef d’une caserne locale, et son équipe font tout ce qu’ils peuvent pour obtenir cette qualification qui pourra leur permettre de protéger la ville de Prescott et leurs familles. A force de persévérance ils obtiennent leur certification et vont devoir affronter l’incendie le plus gigantesque que la région ait connue. Au péril de leur vie, ils vont tenter d’éteindre ce brasier impitoyable. Alors que les flammes progressent inexorablement, leur temps est compté…
La mauvaise passe de Joseph Kosinski
Critique : C’est en e-cinéma que Line of Fire débarque en France, après un petit coup de promo à Deauville en 2017. Le film mettant en scène l’héroïsme de soldats du feu américains, est tiré d’une tragédie qui a coûté la vie à une escadrille de pompiers, dans l’Arizona. On pouvait s’attendre initialement à une sortie en salle, avec notamment la présence de Joseph Kosinski derrière la caméra, mais le réalisateur stylé de Tron l’héritage et Oblivion n’aura pas réussi à tirer son épingle du jeu, voyant ses efforts partir en fumée au box-office américain, en 2017, où le film, pourtant apprécié par la presse, n’a grappillé que 18M$.
Le feu au cinéma
Exit donc la science-fiction à gros budget pour Kosinski, il a choisi un drame social plus intimiste, moins sensationnel, moins visionnaire dans la réalisation, avec une volonté de diriger plus d’acteurs en un film que sur les deux précédents réunis. Même la musique de son compère Joseph Trapanese a pris un virage pantouflard, oubliant ses boucles et emphases électroniques. Line of Fire n’est pas sans rappeler des œuvres comme En pleine tempête, avec George Clooney, mais désormais les flammes ont remplacé les vagues, séchant au passage toute émotion.
Line of Fire, à vrai dire, n’est pas un mauvais bougre, et on ne le comparera pas au raté d’Oliver Stone, le Wall Trade Center movie, qui avait tout du nanar idéologue. Le mélodrame héroïne adopte une architecture narrative et psychologique qui semble avoir été conçue pour le seul public américain. Aussi, même si celui-ci ne s’est pas montré très nombreux dans les salles étasuniennes, le film s’est distingué par des critiques solides et surtout un avis du public très favorable.
Line of Fire, de l’héroïsme pompeux à l’Américaine
Que pourrons-nous lui reprocher de notre France profond(ément cynique) ? L’approche stéréotypée de personnages virils joués par des géants qui en font des tonnes (Josh Brolin, Jeff Bridges, quasi identiques, le jeune Miles Teller de Whiplash, ou encore Taylor Kitsch)? L’académisme d’un film illustratif? Le manque d’idées de cinéma?
Les personnages pâtissent d’une psychologie sociale assez sommaire. L’exemple même des femmes, forcément périphériques, démontrent cette caractérisation insignifiante. Elles sont patientes, aimantes, et dans l’attente du drame, rien de plus. Les personnages féminins principaux reviennent à Jennifer Connelly, solide, et à Andie MacDowell, dans un rôle fade que l’on offre volontiers aux actrices has-been dont les agents ne savent plus trop quoi faire.
Les hommes, pour leur part, affrontent leur destin très tardivement (il faut attendre bien plus d’une heure, à vrai dire…), avec un grand brasier bien moins époustouflant que le laisse supposer une promo prompte à l’action. Ce n’est vraiment pas le Backdraft de Ron Howard, en 1990, où les baroudeurs avaient pour noms Kurt Russell et De Niro.
D’ailleurs, Backdraft était-il un bon film ? Sûrement pas, mais au moins avait-il cassé la baraque dans le monde entier, quand Line of Fire s’assure à peine une sortie de DTV à l’international.
De la part de Joseph Kosinski, le retour de flammes est douloureux. Heureusement, depuis, le cinéaste a repris les commandes dans un genre qui lui sied bien, le blockbuster fulgurant nourri aux effets spéciaux ; il pilote le sequel tardif de Top Gun, avec de nouveau Jennifer Connelly et Miles Teller dans le casting, mais surtout Tom Cruise à qui il avait offert l’un de ses meilleurs trips S.F., dans le sous-estimé Oblivion. Top Gun Maverick a ressuscité l’intérêt pour sa vision d’un cinéma fluide et majestueux qui nous faisait rêver de par ses audaces visuelles à l’époque de Tron l’héritage.
Avec Line of Fire, on éteint son poste de télévision peu ému et désolé. On aurait aimé trembler pour ces soldats du feu au destin aussi funeste.
Box-office :
Only the Brave a été un échec intégral au box-office malgré un bouche-à-oreille réel aux USA. Ainsi le drame est resté plus de 20 semaines à l’affiche voyageant dans différents états pour aller chercher son public, mais son démarrage à 6M$ était trop bas. La carrière de Line of Fire s’éteindra aux Etats-Unis à 18M$, loin des 38M$ de budget.
Mais c’est à l’international que la tragédie s’est vraiment produite. Le film de Kosinski a réalisé un total de 8M$ sur plus de 40 marchés qui l’ont programmé sur le grand écran. La Chine, qui en a diffusé une version courte, s’en est sorti le mieux avec à peine 1 383 937$ et une petite 9e place lors de sa programmation, le 8 décembre 2017.
Line of Fire : un flop mondial
Au Royaume-Uni le film entre péniblement en 7e place avec 354 413$ dans 332 cinémas en fin d’incendie, quand l’Allemagne pleure ses 348 673$ de recettes dans 171 cinémas. La Russie déploiera 615 sites pour un résultat médiocre de 250 000$…
Dans ce contexte, aucun distributeur ne programmera cette déception sur le grand écran français où l’héroïsme pompier au sens propre et figuré n’est pas dans l’ADN cinématographique du pays. TF1 Studio s’essaie à la VOD de luxe, à l’époque fraichement appelé E-cinéma. On est le 15 septembre 2018, quasiment un an après la sortie américaine. L’éditeur vidéo réussira à obtenir pour sa promo une sélection à Deauville.
La Finlande, la Suède, le Mexique, l’Argentine, et l’Inde exploiteront également en VOD et éventuellement en DVD cette déception sur toute la ligne de feu.