Les voyages de Gulliver : la critique du film (1960)

Aventures, Fantastique | 1h39min
Note de la rédaction :
7/10
7
Les voyages de Gulliver, l'affiche

  • Réalisateur : Jack Sher
  • Acteurs : Kerwin Mathews, Jo Morrow, June Thorburn, Grégoire Aslan, Basil Sydney
  • Date de sortie: 23 Déc 1960
  • Nationalité : Britannique, Américain
  • Titre original : The 3 Worlds of Gulliver
  • Scénaristes : Arthur A. Ross, Jack Sher, d'après le roman de Jonathan Swift, Les Voyages de Gulliver
  • Directeur de la photographie : Wilkie Cooper
  • Compositeur : Bernard Herrmann
  • Réalisateur des effets spéciaux visuels : Ray Harryhausen
  • Distributeur : Columbia
  • Editeur vidéo : GCR (VHS) / Sidonis Calysta (DVD / Blu-ray)
  • Sortie vidéo (Mediabook) : 15 novembre 2019
  • Box-office France / Paris-périphérie : 736 296 entrées / 105 058 entrées
  • Format : 1.37 : 1 / Son : Mono
  • Crédits affiche : © 1960 Columbia Pictures Industries Inc. Tous droits réservés.
Note des spectateurs :

Porté par des effets spéciaux de Ray Harryhausen, Les voyages de Gulliver s’impose comme l’une des meilleures adaptations live du roman de Jonathan Swift. Ceci au prix d’une édulcoration inévitable.

Synopsis : Humble médecin dans une petite ville d’Angleterre, Gulliver rêve de découvrir le vaste monde. Quand, enfin, il peut le faire en embarquant sur un bateau à destination des Indes, une tempête le jette par-dessus bord. Quand il se réveille, c’est dans un étrange royaume, Lilliput, dont les habitants sont si petits qu’il pourrait leur marcher dessus. Petits, mais toujours prêts à en découdre avec leurs voisins de Blefuscu…

Gulliver revient sur les écrans après vingt ans d’absence

Critique : Alors que les cinémas muet et d’animation se sont rapidement emparés du livre de Jonathan Swift intitulé Les voyages de Gulliver (écrit en 1721 et publié en 1726), le bouquin n’est plus adapté au cours des années 40 et 50. Il paraît alors trop compliqué de transposer une telle œuvre en prises de vue réelles à cause des effets spéciaux nécessaires à l’entreprise.

Pourtant, après vingt ans de mise en sommeil, Gulliver intéresse à nouveau les producteurs vers 1958.

Les voyages de Gulliver, la jaquette du Mediabook

© 1960 Columbia Pictures Industries Inc. / © 2019 Sidonis Calysta. Conception graphique : Dark Star. Tous droits réservés.

Un projet complexe à mettre sur pied

Le scénariste Arthur Ross commence par livrer un premier script pour la firme Universal qui trouve le projet trop ambitieux et infaisable avec un budget raisonnable. Le réalisateur et scénariste Jack Sher se dit pourtant intéressé par la réalisation d’un tel film, même s’il faut réduire considérablement le nombre de voyages du célèbre médecin britannique. Finalement, le projet passe à la Columbia qui accepte l’aventure selon les termes définis par Jack Sher, ce dernier se retrouvant, de facto, promu réalisateur. Au sein de la Columbia, c’est le producteur Charles H. Schneer qui reprend la direction du projet, lui qui est devenu le spécialiste du film d’aventures depuis le triomphe du Septième voyage de Sinbad (Juran, 1958).

A partir de ce moment, les habituels collaborateurs de Schneer sont greffés au projet, à savoir Ray Harryhausen aux effets spéciaux et Kerwin Mathews dans le rôle principal. Il est alors convenu de limiter les fameux voyages au nombre de deux, l’un à Lilliput et l’autre à Brobdingnag. Dans le premier, Gulliver se retrouve géant au milieu d’une population minuscule, tandis que la situation s’inverse à Brobdingnag. Dans les deux cas pourtant, le médecin désireux d’apporter la raison et la science va se retrouver confronté à la médiocrité de l’être humain.

Un texte édulcoré, mais dont la portée politique est globalement conservée

Certes, les scénaristes ont très largement édulcoré le texte de Swift qui est particulièrement rageur et misanthrope, mais ils ont toutefois conservé de nombreux éléments d’ordre politique, ce qui enrichit considérablement ce divertissement familial. Lorsque Gulliver arrive à Lilliput, il pourrait abuser du pouvoir que lui confère sa taille, mais préfère laisser les institutions impériales en place. Adepte au départ de la non-intervention, il tente ensuite de rapprocher les deux peuplades en conflit pour une broutille – on sent ici la référence à la situation de la guerre froide, dans tous les esprits en 1960. Malgré sa bonne volonté, Gulliver ne parvient pas à raisonner cette population où s’exprime l’avidité, la jalousie et les luttes de pouvoir typique de notre condition humaine.

Arrivé à Brobdingnag, Gulliver est réduit à l’état d’esclave de luxe dans ce pays de géant. Cette fois-ci, sa science est contestée par les élites en place qui voient d’un mauvais œil l’audace d’un homme cherchant à s’élever au-dessus de sa condition. Lors de ce passage, les auteurs réfléchissent sur la servitude volontaire face à un pouvoir autoritaire et arbitraire. Là encore, la raison et l’intelligence se fracassent sur le mur de l’ignorance, et, pire, sur celui de la jalousie et de l’envie.

L’aspect picaresque remplacé par une romance plus conforme au goût du public

La plus importante concession opérée par les scénaristes est d’avoir introduit le personnage de la fiancée de Gulliver (incarnée avec talent par June Thorburn) qui n’existe tout bonnement pas dans le livre et permet de finir le film sur une note d’espoir, avec un enfant qui naîtra dans l’amour d’un foyer. Toutefois, ces tentatives de normaliser le texte d’origine n’effacent pas totalement l’impression d’amertume qui ressort de ces voyages décidément peu valorisants pour l’être humain.

Des effets spéciaux impeccables de Ray Harryhausen

Intéressant sur le plan thématique, Les voyages de Gulliver peut également être apprécié en tant que simple divertissement grâce à de très belles images (aux éclairages kitsch et bariolés), une musique ample de Bernard Herrmann et surtout les effets spéciaux de Ray Harryhausen. Si celui-ci a mis la pédale douce sur les créatures animées image par image (on compte ici un écureuil et un alligator, ce dernier particulièrement réussi), il s’est surtout concentré sur les effets de transparence qui sont quasiment de chaque plan. Ils s’avèrent particulièrement probants et demeurent encore efficaces aujourd’hui, même si certains détourages se voient un peu trop. On aime particulièrement tous les jeux d’échelle. On notera d’ailleurs que Kerwin Mathews, pourtant acteur au jeu limité, est plutôt à l’aise avec ces contraintes matérielles.

Sorti avec un certain succès partout dans le monde pour Noël 1960, Les voyages de Gulliver a attiré 736 296 spectateurs en France, ce qui le place tout de même en retrait par rapport au Septième voyage de Sinbad (1958). Le film demeure l’une des meilleures adaptations live de l’ouvrage de Jonathan Swift, et ceci malgré les libertés prises par rapport au texte d’origine.

Critique de Virgile Dumez

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