Les voitures qui ont mangé Paris : la critique du film (1975)

Fantastique, Comédie horrifique | 1h31min
Note de la rédaction :
6/10
6
Les voitures qui ont mangé Paris, cover VOD

  • Réalisateur : Peter Weir
  • Acteurs : Chris Haywood, John Meillon, Terry Camilleri, Kevin Miles, Bruce Spence
  • Date de sortie: 23 Avr 1975
  • Nationalité : Australien
  • Titre original : The Cars That Ate Paris
  • Titres alternatifs : Killing Cars (titre VHS français) / The Cars That Eat People (USA) / Die Killer-Autos von Paris (Allemagne) / Los coches que devoraron París (Espagne) / Os Carros que Devoraram Paris (Portugal) / Le macchine che distrussero Parigi (Italie) / Confusão em Paris (Brésil)
  • Année de production : 1974
  • Scénariste(s) : Peter Weir, Keith Gow, Piers Davies
  • Directeur de la photographie : John R. McLean
  • Compositeur : Bruce Smeaton
  • Société(s) de production : Royce Smeal Film Productions, Salt-Pan, The Australian Film Development Corporation
  • Distributeur (1ère sortie) : U.Z. Diffusion
  • Distributeur (reprise) : -
  • Date de reprise : -
  • Éditeur(s) vidéo : Thorn Emi Vidéo (VHS, 1985) sous le titre Killing Cars / Opening (DVD, 2006)
  • Date de sortie vidéo : 26 octobre 2006 (DVD)
  • Box-office France / Paris-périphérie : 4 715 entrées / 1 871 entrées
  • Box-office nord-américain : -
  • Budget : -
  • Rentabilité : -
  • Classification : Interdit aux moins de 12 ans
  • Formats : 2.39 : 1 / Couleurs / Son : Mono
  • Festivals et récompenses : Présenté au marché du film du Festival de Cannes 1974
  • Illustrateur / Création graphique : © Georges Lacroix
  • Crédits : © 1974 Salt-Pan Films PTY LTD
Note des spectateurs :

Premier film de Peter Weir, Les voitures qui ont mangé Paris est une œuvre étrange et inégale qui reste une date dans l’histoire du cinéma australien. Décalé et original.

Synopsis : Dans une petite ville de l’Australie rurale nommée Paris, les habitants gagnent leur vie en provoquant des accidents de voiture et en récupérant les objets de valeur des épaves. Deux frères, Arthur et George, passent par-là avec leur caravane et sont victimes d’un accident. George est tué sur le coup, mais Arthur survit…

Un film fantastique 100 % australien

Critique : Tourné en Australie à la fin 1973, Les voitures qui ont mangé Paris (1974) peut être considéré comme un film fondateur pour plusieurs raisons. Tout d’abord, il faut rappeler que les structures de production australiennes n’en étaient qu’à leur balbutiement en ce début des années 70. Le pays accueillait souvent des tournages de films étrangers, mais n’était considéré que comme un décor séduisant. Les seuls véritables films australiens étaient des documentaires ou des produits télévisés.

Du coup, lorsque les jumeaux Jim et Hal McElroy s’associent pour financer Les voitures qui ont mangé Paris, il s’agit assurément d’une aventure hors norme. Le jeune réalisateur Peter Weir n’a alors qu’un moyen-métrage (Homesdale, 1971) à son actif et doit donc faire ses preuves avec un budget très serré qui l’empêche d’embaucher l’acteur Donald Pleasence initialement envisagé pour interpréter le rôle du maire. Weir parvient tout de même à tourner le long-métrage au format Scope, ce qui est là encore une nouveauté pour le cinéma australien.

De l’art du décalage permanent

Œuvre de toutes les innovations, ce premier long de Peter Weir initie également une mode qui ne cessera de marquer ce que l’on appelle désormais la ozploitation, à savoir l’utilisation de voitures customisées pour donner une allure étrange et futuriste à un coin perdu de l’Australie rurale.

Dès le départ, le film de Peter Weir se distingue du tout-venant par une atmosphère étrange qui bouscule les habitudes du spectateur. Certains éléments renvoient directement à de la comédie pure et dure (parodie de publicités, personnages grotesques de rednecks comme on en verra beaucoup par la suite dans le cinéma local), tout en instaurant une ambiance décalée qui fait basculer le film dans le fantastique. Ici pas de déchaînements de phénomènes paranormaux, mais une accumulation de petits dérapages par rapport au quotidien qui intriguent et mettent mal à l’aise. Ce style sera ensuite une constante de l’œuvre de Peter Weir, maître dans l’art et la manière d’instaurer un décalage par rapport au réel.

Les voitures qui ont mangé Paris ou la métaphore d’une Australie à l’histoire chahutée ?

Ce premier long-métrage traite également d’une thématique que le réalisateur n’aura de cesse de réactiver, à savoir la description d’une communauté close dans laquelle se glisse un grain de sable (Witness et ses Amish, The Truman Show et son monde virtuel). Ici, Peter Weir transpose le mythe des naufrageurs (que rien n’atteste vraiment sur le plan historique) dans le cadre de l’Australie rurale moderne. En lieu et place de navires que l’on coule pour piller la cargaison, il s’agit d’un village qui provoque volontairement des accidents de la route afin de récupérer les biens des victimes.

Du point de vue purement métaphorique, Peter Weir a sans doute voulu parler de l’Australie à travers ce petit village clos sur lui-même. La bourgade de Paris (rien à voir avec la capitale française, donc) ne doit-elle pas sa survie au crime, comme autrefois l’Australie dont les habitants sont souvent des descendants de bagnards ? La description du pays n’est en tout cas pas forcément à son avantage, ce qui peut sans doute expliquer l’échec commercial du film en Australie.

Une source d’inspiration de George Miller

Au cœur de ce village tenu par un maire directif (excellent John Meillon), le spectateur ne comprendra pas nécessairement tout ce qui se passe, étant ainsi dans la même situation que le personnage principal incarné par le frêle Terry Camilleri. De même, on ne saisira pas beaucoup plus l’intervention de ces voitures customisées qui semblent avoir une forme d’autonomie par rapport à leurs conducteurs que l’on ne voit même plus. En fait, Les voitures qui ont mangé Paris se refuse à donner toutes les clés, ce qui est à la fois sa plus grande qualité (on reste dans l’indécision) et sa principale limite (quel est l’intérêt de tout ceci ?).

Disposant d’une bonne réalisation, d’images soignées et d’une bande originale séduisante, le premier long-métrage de Peter Weir ne se laisse pas appréhender facilement, mais propose au moins un regard neuf et frais sur un genre galvaudé. Il a surtout inspiré d’autres cinéastes et notamment George Miller qui a avoué s’en être inspiré pour Mad Max 2 (1981).

Une bonne affaire au marché du film de Cannes

Refusé en compétition officielle par les sélectionneurs de Cannes à cause de sa trop grande violence, Les voitures qui ont mangé Paris a tout de même été présenté avec succès au marché du film où il a été acheté par un distributeur américain, compensant ainsi les pertes de l’exploitation australienne. Peter Weir a ainsi pu continuer à tourner avec Pique-nique à Hanging Rock (1975) qui a établi définitivement sa réputation de cinéaste à suivre de près.

En l’état, son premier essai est une œuvre foutraque, un peu bordélique, mais qui témoigne d’une vraie liberté créatrice et d’un talent inné ne demandant qu’à être canalisé.

Critique de Virgile Dumez

Les sorties de la semaine du 23 avril 1975

La Ozploitation sur CinéDweller

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Les voitures qui ont mangé Paris, afficheu

© 1974 Salt-Pan Films PTY LTD / Affiche : © Georges Lacroix. Tous droits réservés.

Box-office :

Sorti dans deux cinémas à Paris le 23 avril 1975, au MacMahon et au Studio Logos 46, par le micro distributeur UZ Diffusion, Les voitures qui ont mangé Paris n’a eu que des miettes au box-office. Un total de 1 871 Parisiens ont été dévorés tout cru par l’Ozploitation qui n’était pas alors connu comme tel. Il faut dire que le nombre de nouveautés dévoilées ce mercredi-là était calorique sur Paname : Anthologie du plaisir, Le bougnoul, La concentration, Dialogues d’exilés, L’extradition, Histoire de Wahari, Les nuits sexuelles, Les orgies du Golden Saloon, La papesse, Rosebud, Section spéciale, Soldat Duroc ça va être ta fête, Un ange passe et Winchester Kung Fu et Karaté (alias Deux Chinois dans l’Est) étaient sur les starting blocs pour des soirées sans Netflix, sans VHS, sans internet, et parfois sans mémère, voir même sans bobonne.

Frédéric Mignard 

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