Les héritiers : la critique du film (2014)

Drame, Comédie dramatique | 1h45min
Note de la rédaction :
7/10
7
Les héritiers, l'affiche

  • Réalisateur : Marie-Castille Mention-Schaar
  • Acteurs : Noémie Merlant, Ahmed Dramé, Ariane Ascaride, Geneviève Mnich
  • Date de sortie: 03 Déc 2014
  • Nationalité : Français
  • Année de production : 2013
  • Scénariste(s) : Marie-Castille Mention-Schaar, Ahmed Dramé
  • Directeur de la photographie : Myriam Vinocour
  • Compositeur : Ludovic Einaudi
  • Société(s) de production : Loma Nasha Films
  • Distributeur : UGC Distribution
  • Éditeur(s) vidéo : TF1 Vidéo
  • Date de sortie vidéo : 1 avril 2015 (DVD & blu-ray)
  • Box-office France / Paris-périphérie : 663 891 entrées /
  • Budget : 3 440 000 €
  • Rentabilité : -
  • Classification : Tous publics
  • Formats : 2.35 : 1 / Couleurs / Son : 5.1
  • Festivals et récompenses : -
  • Illustrateur / Création graphique : Le ciel attendra & Les Héritiers - Le Cercle Noir pour Alamo / Photo Guy Ferrandis
  • Crédits : Loma Nasha Films
Note des spectateurs :

Les héritiers est un film d’utilité publique, inspiré d’une histoire vraie, dont la force de réflexion n’a d’égale que celle des émotions procurées. Un bel hommage à Léon Zyguet, décédé peu après la sortie du film, en janvier 2015.

Synopsis : D’après une histoire vraie.
Lycée Léon Blum de Créteil, une prof décide de faire passer un concours national d’Histoire à sa classe de seconde la plus faible. Cette rencontre va les transformer.

Critique : La productrice Marie-Castille Mention-Schaar a eu la très mauvaise idée de s’adonner deux fois à la réalisation dans le passé. On se souvient encore des très fades Ma première fois et Bowling, deux échecs qui auraient dû stopper toute carrière s’il y avait une justice dans ce bas monde, alors que tant de talents galèrent, mais la productrice a persévéré et, miracle, parvient à faire taire toutes les mauvaises langues, avec une œuvre peu aisée, entre documentaire, réflexion sociale, et bons sentiments qui, s’ils ne rabaissent jamais son dernier long, lui confèrent une place particulière dans les cœurs.

En touchant au thème ardent des banlieues ghettos, des établissements scolaires qui fabriquent l’échec scolaire à la chaîne, au repli communautaire, à la montée de l’intégrisme dans notre société, Marie-Castille Marion-Schaar s’emploie à se battre pour une cause, plus intelligemment que dans Bowling, où l’on sentait déjà poindre la volonté de traiter du social.

Dans Les héritiers, elle a su traiter avec finesse, réalisme et dévotion, des enjeux sociétaux qui dépassent chacun, pour ne plus faire que la Une des chaînes d’infos en continue lors de dérapages.

La renaissance d’une cinéaste

Loin de l’histoire d’amour à l’eau de rose de Ma première fois, elle s’insinue “entre les murs” pour capter la gouaille d’une génération, sans repères, entre incivilités et comportements primaires quand le cadre n’est pas là pour leur signifier intelligemment, non seulement les valeurs de la République, mais l’importance de l’Histoire et du devoir de mémoire pour mieux sortir de l’obscurantisme qui s’installe en coin de rue.

Sous François Hollande ou Emmanuel Macron, la thématique républicaine est actuelle, et passer après La journée de la jupe et Entre les murs n’était sûrement pas une mince affaire non plus. Mais la démarche en retrait de la réalisatrice est exemplaire et lui permet de livrer une œuvre, certes moins intense, mais d’une importance semblable dans le discours.

Marie-Castille Mention-Schaar laisse, sur des images de cinéma plutôt belles, la parole à de jeunes personnalités de différentes origines ethniques, attachantes, parfois hystériques, souvent explosives, mais toujours dans une forme de souffrance qui se manifeste de façon plus ou moins violente à l’adolescence, en fonction de l’environnement social, familial et de l’individualité du jeune.

Les héritiers affronte, confronte avec force et courage

Le sens de l’écoute, la véracité du dialogue, la justesse du regard sur ce public dit difficile, rendent pertinente cette approche qui aurait pu pourtant souffrir d’une volonté de la recherche d’émotions faciles face à une thématique casse-gueule : confronter des jeunes, pour certains de confession musulmane, à la Shoah.

L’évolution des protagonistes, joués par des jeunes gens formidables de vérité, a pour miroir la détermination d’une prof à la foi inébranlable jouée par la toujours solide Ariane Ascaride, plus prof que nature. L’actrice semble être dans son milieu, au milieu d’une jeunesse qu’elle emmène sur les chemins glaçants de l’Holocauste pour une meilleure compréhension du monde contemporain qu’ils réfutent dans leur aveuglement. Mais celui-ci ne leur a-t-il pas été imposé par une société tout aussi sectaire dans son refus de l’ouverture ? N’y a-t-il pas à Paris-même des écoles elles-mêmes composées à plus de 80% de jeunes gens défavorisés alors qu’à 500 mètres on sélectionne pour satisfaire les grandes espérances des parents ?

Les Héritiers, derrière ses valeurs fédératrices, abordent de nombreux thèmes complexes, sans jugement arbitraire, mais toujours avec l’envie d’élever les discussions. Un grand remerciement donc à la réalisatrice qui cherche à démocratiser sereinement le débat, afin qu’il ne se cantonne pas aux plateaux de télévision avec chroniqueurs politiques stériles ou à des discussions de quartier qui semblent perdues d’avance face à l’aveuglement des pouvoirs successifs qui n’ont jamais eu l’audace de proposer de plans banlieues d’envergure, alors que les extrêmes montent de toute part.

Les Héritiers est donc un conte scolaire salvateur qui saura séduire les plus fermés au sujet.

Frédéric Mignard

Sorties de la semaine du 3 décembre 2014

Voir en VOD

 

Le test blu-ray

Beau succès en salle avec plus de 556.000 entrées, Les Héritiers est une œuvre profondément sociale, au discours lumineux, qui participe à la lutte contre l’obscurantisme, celui de l’ignorance nourrie dans les quartiers déshérités. Une œuvre qui aura une longue carrière en DVD, et qui fera l’objet de débats passionnants dans les écoles. L’édition vidéo est pertinente, riche et belle.

Les suppléments : 3.5 / 5

Les Héritiers comportent de très belles scènes supplémentaires, finalisées, sont proposées. On comprend les coupes (16mn tout de même), mais dans le cadre des suppléments, elles apportent beaucoup, approfondissant certains personnages (la vie familiale de la prof jouée par Ascaride).

Le making-of de 25mn propose une belle approche du métier de prof, avec des interventions de l’enseignante qui a servi de modèle à l’histoire. Ascaride est d’une belle sobriété face à de jeunes acteurs qui semblent avoir été touchés par le tournage qui a changé leur vie. La réalisatrice Marie-Castille Mention-Schaar fait montre de détermination, de pédagogie et d’un grand talent dans la direction des comédiens.

Très beau témoignage Léon Zyguel, ancien déporté, survivant des camps de Drancy, qui a participé au film dans son propre rôle. Ce supplément propose son intervention intégrale (32mn). Un bonus bouleversant, ce héros témoin de la barbarie nazie, est décédé peu après la sortie du film, le 29 janvier 2015. Les héritiers, le titre, est donc à lecture plurielle.

L’image :  4 / 5
Très belle image, avec un beau travail sur l’étalonnage. La parcimonie esthétique a été choyée, avec des couleurs chaudes et une volonté de noirs profonds.

Le son : 4 / 5

Une œuvre vocale, à laquelle le DTS HD Master Audio, en 5.1, donne toute l’intensité nécessaire pour les joutes verbales et des instants de collectif costauds. L’ambiance sonore est soignée, avec de touches musicales qui s’inscrivent dans l’équilibre global.

Frédéric Mignard

Les héritiers, l'affiche

Crédit : Le Cercle Noir pour Alamo / Photo Guy Ferrandis

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