Le terroriste : la critique du film et le test du blu-ray (1964)

Drame, Historique | 1h35min
Note de la rédaction :
8/10
8
Le terroriste, affiche reprise 2024

  • Réalisateur : Gianfranco De Bosio
  • Acteurs : Anouk Aimée, Gian Maria Volonté, José Quaglio, Carlo Bagno, Philippe Leroy, Raffaella Carrà
  • Date de sortie: 27 Mai 1964
  • Année de production : 1963
  • Nationalité : Italien, Français
  • Titre original : Il terrorista
  • Titres alternatifs : The Terrorist (titre international) / El terrorista (Espagne) / Zamachowiec (Pologne)
  • Autres acteurs : Giulio Bosetti, Roberto Seveso, Cesarino Miceli Picardi, Mario Valgoi, Tino Carraro, Gabriele Fautuzzi, Giuseppe Soriani, Neri Pozza, Franco Graziosi, Rina Tadiello, Carlo Cabrini
  • Scénaristes : Gianfranco De Bosio, Luigi Squarzina
  • Monteuse : Carla Colombo
  • Directeurs de la photographie : Lamberto Caimi, Alfio Contini
  • Compositeur : Piero Piccioni
  • Chef Maquilleur : Franco Titi
  • Chef décorateur : Mischa Scandella
  • Directeur artistique :
  • Producteurs : Tullio Kezich, Alberto Soffientini
  • Producteurs exécutifs :
  • Sociétés de production : 22 Dicembre, Galatea Film, Societé Cinématographique Lyre
  • Distributeur : Rank
  • Distributeur reprise : Les Acacias
  • Date de sortie reprise : 27 novembre 2024
  • Editeurs vidéo : Editions Montparnasse (VHS, 1993) / Rimini Editions (DVD et blu-ray, 2025)
  • Dates de sortie vidéo : 1993 (VHS) / 4 juin 2025 (DVD et blu-ray)
  • Budget :
  • Box-office France / Paris-Périphérie :
  • Box-office nord-américain / monde :
  • Rentabilité :
  • Classification : Tous publics
  • Formats : 1.85 : 1 / Noir et Blanc / Son : Mono
  • Festivals : Festival de Venise 1963 en section parallèle
  • Nominations :
  • Récompenses : Festival de Venise 1963 : Prix de la critique italienne, Prix de la ville de Venise
  • Illustrateur/Création graphique : © Xarrié (affiche 1964) ; Vincent Wild Design (affiche reprise) ; Rimini Editions (package blu-ray). Tous droits réservés / All rights reserved
  • Crédits : © Editoriale Cinematografica 22 Dicembre, Cinématographique Lyre. Tous droits réservés / All rights reserved
  • Attachés de presse :
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Note des spectateurs :

Film d’une belle sobriété, Le terroriste s’interroge avec pertinence sur l’action politique en temps de guerre et bat en brèche l’idée d’une population italienne favorable à la résistance au nazisme. Il s’agit donc d’une œuvre importante sur le plan historique.

Synopsis : Venise, hiver 1943. La Résistance italienne prépare une attaque contre le siège de la Kommandantur. Un homme, surnommé l’Ingénieur, joue un rôle central dans ce plan.

Un premier film aux accents autobiographiques

Critique : Au début des années 60, le metteur en scène de théâtre Gianfranco De Bosio est déjà une pointure dans son domaine. Il a notamment mis en scène pour la première fois en Italie des pièces de Brecht et pratique donc un théâtre qui marie à la perfection innovation et classicisme. Vers 1960, le producteur Tullio Kezich crée avec Ermanno Olmi sa propre compagnie nommée 22 Dicembre et propose à De Bosio d’écrire un scénario tiré de son expérience dans la Résistance durant la Seconde Guerre mondiale, s’engageant à le produire. Une fois le script de Le terroriste (1963) validé, une coproduction est montée avec la France – d’où la présence au générique de Philippe Leroy et d’Anouk Aimée – afin de parvenir à tourner dans une relative aisance dans les rues et canaux de Venise, lieux principaux de l’action.

Effectivement, dans Le terroriste, le cinéaste a mélangé plusieurs éléments réels, mais en déplaçant parfois les lieux afin de ne pas se livrer à une pure  autobiographie. Ainsi, alors qu’il a été membre du CNL ou Comité de Libération Nationale situé à Vérone, il a préféré déplacer l’action à Venise et évoquer ainsi l’attentat de Ca’ Giustinian intervenu en juillet 1944 auquel il n’a pas personnellement participé.

Une œuvre plus réaliste sur la résistance, et donc à rebours de son temps

En fait, à l’époque de la production du Terroriste, le cinéma italien commençait tout juste à évoquer la dure période du fascisme, et surtout celle de l’invasion nazie du nord du pays à partir de juillet 1943 (qui a donné lieu à la création de la République fantoche de Salò). Mais contrairement au film de De Bosio, les productions d’alors mettaient toujours l’accent sur l’esprit de résistance du petit peuple, tout en chargeant de tous les maux les chemises brunes et les nazis. Pour son premier long métrage, Gianfranco De Bosio ose se placer à un autre niveau, ce qui n’a pas été du tout compris par le grand public de l’époque qui en a fait un cuisant échec commercial.

Le terroriste, affiche reprise 2024

© 1963 Editoriale Cinematografica 22 Dicembre, Cinématographique Lyre / Affiche : Vincent Wild Design. Tous droits réservés.

Certes, Le terroriste démarre comme un classique film de guerre, avec la réalisation d’un attentat et même un certain suspense pour savoir si les résistants menés par Philippe Leroy vont parvenir à faire sauter la Kommandantur située dans un palais vénitien. Mais après ce premier quart d’heure, le film semble abandonner les personnages pour pénétrer au cœur des négociations politiques entre les différentes factions du CNL. Dès lors, Le terroriste montre sa vraie nature de film d’auteur uniquement intéressé par son propos politique et non par une quelconque émotion primitive destinée au grand public.

Une plongée passionnante au cœur des tractations entre résistants

Pour peu que l’on s’intéresse à l’histoire italienne, mais aussi aux tractations politiques, Le terroriste est une œuvre gonflée et passionnante qui tend à déconstruire la vision idéalisée de la Résistance italienne. Tout d’abord, le cinéaste insiste sur le fait que les membres actifs sont finalement peu nombreux au cœur d’une Italie grandement gagnée au fascisme. Ensuite, il démontre avec brio qu’il était très difficile pour les différentes formations politiques de s’entendre sur la méthode à employer pour se débarrasser des nazis et du fascisme.

Nous sommes ici témoins des tractations entre les plus modérés (les Démocrates Chrétiens) et les plus radicaux (le Parti communiste). Mais le cinéaste se pose également une question morale importante : est-ce que l’on peut légitimement avoir recours au terrorisme pour se débarrasser d’un tyran ou est-ce que la vie d’innocents compte davantage ? Si le cinéaste ne répond pas vraiment à la question, on sent qu’il se sent finalement très proche de l’électron libre qu’est le terroriste.

Et si le fascisme était définitivement de retour ?

Outre cette entorse à la morale chrétienne, Gianfranco De Bosio ose montrer la Résistance comme une organisation complexe, pleine de contradictions, à l’image de celle que l’on a connu en France. Pour interpréter son personnage principal, De Bosio a eu l’excellente idée d’engager le comédien très engagé à gauche Gian Maria Volonté qui n’était pas encore connu du grand public. Ce dernier est d’une parfaite sobriété et incarne à la perfection cet esprit de résistance qui semble inflexible, mais qui ne cesse de douter de son action.

Lors d’une très belle scène intimiste avec Anouk Aimée, le personnage délivre même un message qui semble directement s’adresser au public italien du début des années 60 et qui les prévient du retour insidieux du fascisme. Une prédiction qui prend encore plus de valeur en 2025 lorsque l’on sait qui est à la tête de la péninsule actuellement.

Réalisé avec beaucoup de rigueur par un Gianfranco De Bosio qui n’est pas là pour en mettre plein la vue, Le terroriste est avant tout l’œuvre d’un intellectuel qui réfléchit sur ce que veut dire l’action politique en temps de guerre. Il le fait avec pudeur, un beau sens du cadre et un noir et blanc tout à fait séduisant. D’ailleurs, le long métrage a reçu le Prix de la critique lors de sa présentation à la Mostra de Venise en 1963. Malheureusement, le public italien n’était pas disposé à entendre la vérité historique brute et le film a été un cuisant échec commercial.

Le terroriste, un film passé inaperçu un peu partout en son temps

En France, il est sorti en toute discrétion le 27 mai 1964, mais il ne semble guère avoir suscité de réactions. Il n’y a guère eu que la critique pour saluer ce long métrage comme nous l’indique celle de La Saison Cinématographique 1965 où Hubert Arnault écrit ces lignes très justes :

Le style de De Bosio a une intense sobriété dans l’agencement de l’action. Son récit accapare l’attention et ménage temps forts et temps faibles avec un habile dosage. Ce premier long métrage annonce un nouveau grand cinéaste italien.

N’ayant fait l’objet que d’une unique sortie en VHS aux Editions Montparnasse en 1993, le film est resté longtemps dans l’oubli avant une magnifique restauration 4K intervenue vers 2020. C’est cette version qui a été reprise en salles dès le 27 novembre 2024, avant d’être proposée dans une superbe édition DVD / Blu-ray par Rimini au mois de juin 2025.

Critique de Virgile Dumez

Les sorties de la semaine du 27 mai 1964

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Le terroriste, l'affiche

© 1963 Editoriale Cinematografica 22 Dicembre, Cinématographique Lyre / Affiche : Xarrié. Tous droits réservés.

Biographies +

Gianfranco De Bosio, Anouk Aimée, Gian Maria Volonté, José Quaglio, Carlo Bagno, Philippe Leroy, Raffaella Carrà

Mots clés

Cinéma franco-italien, La Seconde Guerre mondiale au cinéma, Le terrorisme au cinéma, Restauration 4K

 

Le test du blu-ray

Rimini Editions remet à l’honneur une œuvre longtemps oubliée qui mérite largement un achat pour les cinéphiles pointus et férus d’histoire. Test réalisé à partir du produit finalisé.

Compléments & packaging : 5 / 5

Tout d’abord, il faut signaler la beauté de l’objet en question avec un fourreau qui renferme un digipack qui s’ouvre en trois volets (un pour le DVD, un autre pour le blu-ray et un troisième contenant le livret). Sur le plan visuel, l’ensemble est très cohérent. Le livret de 30 pages contient une analyse toujours aussi pertinente de Jean-Baptiste Thoret, mais aussi un précieux entretien avec Gianfranco De Bosio datant de 1964. Enfin, tout un passage est consacré à la restauration du film.

Sur le blu-ray lui-même, on trouve d’abord un long entretien (44 min) avec le fils du réalisateur nommé Stefano De Bosio qui a repris la tradition familiale en devenant à son tour avocat. Il détaille toute la vie de son père avec beaucoup de précision. Il insiste évidemment sur ses faits d’armes en tant que résistant, puis évoque sa brillante carrière théâtrale. Ensuite, il passe à la genèse du film, mais parle sans filtre de l’échec commercial qui a poussé son père vers la télévision.

Ensuite, un documentaire de 23 minutes nous permet de revenir sur les lieux principaux du tournage du film. Les auteurs expliquent également les différences qui existent entre les véritables lieux des faits historiques et ceux du tournage (souvent par commodité). Passionnant et d’une totale rigueur historique.

Enfin, seulement présent sur le blu-ray, on peut retrouver un passionnant entretien avec Daniela Curro (27 min) qui reprend des éléments déjà entendus, mais en y ajoutant d’autres précisions. Rien ne peut donc vous échapper dans la connaissance de cette œuvre rare.

L’image du blu-ray : 5 / 5

La restauration de l’image en 4K est tout bonnement splendide. On a vraiment le sentiment de visionner une œuvre récente tant les impuretés ont été bannies. On note la présence d’un léger grain cinéma qui fait tout le charme de ce type d’image, tandis que la définition est à couper au rasoir et que la fluidité est absolument parfaite.

Le son du blu-ray : 4 / 5

Les deux pistes sonores en DTS-HD Dual Mono sont équivalentes en termes de puissance et de qualité d’écoute. La version italienne paraît plus naturelle – même si tout était postsynchronisé à l’époque – grâce à des voix bien charpentées et qui collent parfaitement aux comédiens, même ceux d’origine française. En version française, le doublage s’avère tout à fait convaincant et l’on notera un passage en version originale sous-titrée car une scène de dialogue avait été écourtée par le distributeur français de l’époque.

Test blu-ray : Virgile Dumez

Le terroriste, jaquette du blu-ray

© 1963 Editoriale Cinematografica 22 Dicembre, Cinématographique Lyre / Affiche : Vincent Wild Design / Package Design : Rimini Editions. Tous droits réservés.

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Le terroriste, affiche reprise 2024

Bande-annonce de la reprise 2024 de Le terroriste (VOstf)

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