Giallo érotique particulièrement sadique, Le sexe en délire (Delirio caldo) appartient à un cinéma d’exploitation décomplexé typique d’une époque révolue. L’ensemble, inégal et interprété de manière approximative, est hallucinant à découvrir de nos jours. Une curiosité pour tous les bisseux.
Synopsis : Psychiatre criminologue de profession, Herbert Lyutak mène une double vie. Tueur en série psychopathe souffrant d’impuissance, il assassine des jeunes femmes, tout en collaborant avec la police chargée de retrouver le tueur. Lorsque Marzia, son épouse, fouille dans ses affaires, un linge taché de sang lui confirme les soupçons qu’elle avait déjà…
Polselli producteur cherche succès de scandale
Critique : Réalisateur prolifique spécialisé dans le cinéma populaire italien, Renato Polselli s’est fait remarquer dans les années 60 grâce à trois films qui ont connu une jolie réputation : La Maîtresse du vampire (1960), Aux mains des SS (1962) et surtout L’orgie des vampires (1964). Ce dernier était marqué par une hystérie généralisée et une surenchère dans l’exposition de chairs féminines, ce qui lui a valu un statut plutôt mérité de film culte.
A partir de 1969, Renato Polselli devient son propre producteur et profite du relâchement généralisé de la censure pour tourner des œuvres à fortes connotations sadiques et érotiques. Parfois, le bonhomme a également tâté de la pornographie, signe d’un certain intérêt pour les choses du sexe. Lorsque le giallo devient un genre très en vogue, l’opportuniste qu’il est devenu se lance dans le filon avec Le sexe en délire / Au-delà du désir (ou encore Delirium chez nos amis britanniques et Delirio caldo en version originale). Toutefois, Polselli n’abandonne pas pour autant ses obsessions et livre avec ce giallo une œuvre atypique qui s’insinue de la manière la plus putassière possible dans le cinéma d’exploitation.
Un tueur peut en cacher un autre…
Assez proche par son sujet du récent Une hache pour la lune de miel (Mario Bava, 1970), Delirio caldo ose prendre à revers le sous-genre du whodunit en nous indiquant dès la première scène l’identité du meurtrier sadique, à savoir un Mickey Hargitay en mode inexpressif. Celui qui fut autrefois l’époux de Jayne Mansfield n’a jamais été un grand comédien et il prouve une fois de plus ses limites dans le rôle de ce docteur en psychiatrie aussi dérangé que ses patients.
© Minerva / Jaquette : Le Chat qui Fume – Frhead. fr. Tous droits réservés.
Afin de susciter l’intérêt du spectateur, le scénariste Polselli fait intervenir plusieurs meurtres au couteau qui se déroulent tandis que le serial-killer est occupé ailleurs, le disculpant donc de ces nouveaux méfaits. Ainsi, un certain mystère entoure ces assassinats, même si le spectateur féru du genre trouvera assez rapidement l’identité du coupable, tant le nombre de protagonistes est limité.
Delirio caldo ou la surenchère dans la cruauté envers les femmes
Thriller dont le script est donc tout ce qu’il y a de plus classique, Delirio caldo se distingue de la masse des produits de l’époque par un style hystérique qui rejoint celui de L’orgie des vampires (1964), particulièrement sadique dès qu’il s’agit d’infliger les pires sévices à la gent féminine. Autant dire que les nombreuses scènes de viol et autres outrages proférés peuvent indisposer les âmes les plus sensibles. Pourtant, cela contribue également à faire de Le sexe en délire une œuvre hallucinante qui ne pourrait clairement plus être réalisée de nos jours. Elle interroge assurément sur l’état d’esprit du cinéaste tant la misogynie est étalée ici avec une complaisance quasiment maladive.
Pour autant, le tout est réalisé avec un sens assez remarquable de l’efficacité, des images aux couleurs bariolées qui évoquent les créations de Mario Bava et surtout une bande originale très rock de Gian-Franco Reverberi. Le gros point faible du giallo demeure l’interprétation, globalement médiocre si l’on excepte la prestation honorable de Rita Calderoni en femme follement amoureuse de son serial-killer de mari.
Une multitude de montages et de titres pour un film étonnant
Difficilement recommandable par ses excès sadiques et sa propension à maltraiter les femmes, Delirio caldo n’en demeure pas moins un film à découvrir pour tous les amateurs de cinéma bis car son statut de film culte n’est aucunement usurpé. Tourné en 1972 durant la période la plus faste du giallo, le long métrage n’est arrivé en France qu’en 1976 dans une version agrémentée de quelques plans plus explicites – visiblement tournés par Polselli lui-même – sous le titre très putassier de Le sexe en délire.
Par la suite, plusieurs éditeurs VHS se sont emparés de cette copie pour la diffuser en vidéo-club sous le titre plus passe-partout d’Au-delà du désir. Connu à l’étranger sous le titre Delirium, le giallo est édité à la fin de l’année 2024 par Le Chat qui Fume sous son titre original de Delirio caldo, avec plusieurs bonus passionnants, dont les cinq minutes plus hard rajoutées à la version française en 1976. Un incontournable pour les fans de film d’exploitation, même si le film n’est clairement pas à mettre devant tous les yeux.
Les visuels internationaux de Delirio Caldo © Minerva
Critique de Virgile Dumez
Box-office Le Sexe en délire
Exploité la semaine 18 février 1976, Le sexe en délire a connu une sortie parisienne dans cinq cinémas qui n’avaient pas froid aux yeux : le Gramont, le Cinevog, le Midi Minuit, le Maine Rive Gauche et le Scarlett. Au seul Midi Minuit, il surprend 6 005 spectateurs pas forcément conscient du délire morbide auquel ils allaient assister. Au total, après une première journée à 2 673 spectateurs, ce sont 16 615 spectateurs qui se sont précipités lors d’une semaine dégainant Le frère le plus fûté de Sherlock Holmes (46 025 entrées), Le roi du kung-fu (2 340), Les 101 positions de Eric-Jeffrey et Haims Donn Greer (31 548), Les archives secrètes des maisons closes (7 626).
Le sexe en délire ne restera qu’une seule semaine à l’affiche sur la capitale avant de partir en tournée française.
Toutes les éditions VHS qui suivront joueront la carte de la pornographie, détournant le film de sa réalité giallesque.
Les sorties de la semaine du 18 février 1976
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Jaquette VHS d’Au-delà du désir (Delirio Caldo) © Minerva
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Renato Polselli, Mickey Hargitay, Tano Cimarosa, Rita Calderoni, Raul Lovecchio
Mots clés
Cinéma bis italien, La violence faite aux femmes, Le viol au cinéma, Le sadomasochisme au cinéma, Giallo