Édifiante crétinerie des roublards Golan-Globus, Le justicier de New York se complaît dans l’humour bis. Charles Bronson cachetonne à fond, dans un vigilante aux odeurs acre d’incontinence.
Synopsis : Décidé à se ranger, Paul Kersey arrive à New York pour rendre visite à son ami Charley. Mais les retrouvailles sont de courte durée : Kersey arrive juste à temps pour recueillir les dernières paroles de Charley, attaqué par des voyous. Arrêté par la police, Kersey n’a aucune difficulté à s’identifier mais de lourdes présomptions de culpabilité continuent de peser sur lui. Une fois relâché, Kersey accepte d’aider la police à nettoyer le quartier des délinquants, des gangsters et des drogués.
1986, la Cannon Group : Inc dégaine l’artillerie lourde
Critique : Premier trimestre 1986. Cannon Films ne plaisantait plus. La société israélienne fondée par Golan-Globus annonçait le tournage de King Lear de Jean-Luc Godard, proposait Chuck Norris en tête d’affiche de Invasion USA et Delta Force ; Richard Chamberlain et Sharon Stone batifolaient dans Allan Quatermain et les mines du Roi Salomon, Konchalovsky fonçait à Cannes avec son Runaway Train, Sam Shepard et Kim Basinger étaient Fool for love et les deux nababs de la Cannon sortaient Berlin Affair, de la sulfureuse réalisatrice de Portier de nuit, Liliana Cavani. C’était juste pour le premier semestre…
Au cœur de l’actualité du groupe, on retrouvait aussi un gros morceau, Le justicier de New York. Il s’agissait du troisième épisode de la franchise ultra-violente de vigilantes avec Charles Bronson, succédant au Justicier dans la ville (1974), Un justicier dans la ville n°2. L’idée était de surfer sur la vague de productions punk nihilistes sévissant dans les centre villes des séries B américaines ou ritales, Les guerriers de la nuit de Walter Hill (USA) ou Les guerriers du Bronx d’Enzo G. Castellari (son pendant Z spaghetti).
Œil pour œil, la loi du talion
Bronson qui carbure au flingue à tout va (Le justicier de minuit – qui n’est pas de la franchise des Death Wish -, L’enfer de la violence) y trouve un gros chèque d’1,5 million de dollars quand le réalisateur vétéran Michael Winner, proche de Bronson, y saisit l’occasion d’oublier les naufrages commerciaux de The Wicked Lady et Scream for help… Les deux compères ont des raisons peu artistiques pour rempiler dans la violence gratuite d’une légitime autodéfense faisant l’apologie de la loi du talion.
Le glauque des deux premiers épisodes est vite évacué par le ton léger de ce troisième épisode, ouvertement comique quand il s’agit de mettre en scène les actes de barbarie d’un Bronson de 64 ans qui donne une leçon par l’abjection et l’attirail de guerre à une jeunesse pugnace… La vue baissant dû à l’âge, Paul Kersey ne connaît pas. Il tire juste, fort, là où cela fait le plus mal, sans se soucier de la légalité et de toute éthique… Même le vol est sanctionné par la peine de mort.
Le justicier de New York, un papy qui fait de la résistance
Le personnage culte de Paul Kersey n’agit plus pour des griefs familiaux mais amicaux, puisque l’un de ses meilleurs potes, résidant à New York, vient de se faire assassiner outrageusement. Alors qu’il pensait avoir abandonner pour de bon ses penchants pour l’autodéfense, préférant désormais la bienveillance à la culbute d’exterminateur, Bronson est de surcroît incité par un flic (joué par un Ed Lauter crapuleux), qui n’a pas oublié ses exploits passés, à nettoyer au karcher les quartiers pauvres où les vilains loubards, des punks nihilistes à la bêtise crasse, ont curieusement pris comme cible favorite les plus démunis. La racaille sévit chez les pauvres, et en particulier les personnes âgées, dans une opposition affligeante entre les générations. A l’exception d’une avocate de trente ans plus jeune que Bronson qui curieusement s’est sentimentalement entichée pour cette vieille baderne taciturne, Bronson ne fréquente que les sorties de guinguettes, semblant désormais s’adresser à un public d’une autre génération, conservateur et peu conciliant envers les excès d’une jeunesse qui lui semble venir d’une autre planète.
Appelez-le désormais Un justicier dans la ville 3 !
Avec sa dignité bas du front, Le justicier de New York n’essaie même pas de réfléchir, peut-être pour ne pas causer trop de maux de têtes aux pontes de la Cannon. Le héros tire à vue en lieu et place d’une justice absente de ce charnier urbain, où les décors de ruines donnent un charme d’époque à cette série B très Z qui sera l’ultime collaboration entre Bronson et Michael Winner, mais pas le dernier segment de la saga des Death Wish, puisqu’il faudra compter sur deux autres volets par la suite et même un remake du film originel par Eli Roth, en 2018.
Au moins, que l’on se rassure, (re)voir ce film, désormais intitulé en DVD et Blu-ray Un justicier dans la ville 3 pour sa sortie en 2020 chez Sidonis, provoque une belle hilarité. La comédie involontaire (?) est assurée. Le plaisir est coupable.