Le bateau phare : la critique du film et le test blu-ray (1986)

Drame, Thriller | 1h29min
Note de la rédaction :
8/10
8
Le bateau phare, l'affiche

  • Réalisateur : Jerzy Skolimowski
  • Acteurs : Robert Duvall, Klaus Maria Brandauer, Arliss Howard, William Forsythe, Tom Bower
  • Date de sortie: 19 Fév 1986
  • Nationalité : Américain
  • Titre original : The Lightship
  • Musique : Stanley Myers, jouée par Hans Zimmer
  • Distributeur : Gaumont
  • Distributeur de la reprise : Malavida
  • Date de la reprise cinéma : 10 avril 2019
  • Editeur vidéo (blu-ray) : L’Atelier d’images / Malavida
  • Sortie vidéo (blu-ray) : Le 2 juillet 2019
  • Box-office France : 114 614 entrées / 62 591 entrées
  • Festival : Prix spécial du jury : Le Bateau phare de Jerzy Skolimowski
Note des spectateurs :

Faux thriller, mais vrai film d’auteur exigeant, Le bateau phare confirme le talent de Jerzy Skolimowski pour créer des ambiances vaporeuses vaguement étranges. Lent, mais passionnant par sa complexité même.

Synopsis : Le capitaine Miller, récupère son fils adolescent, Alex, des mains de la police. De retour sur le Hatteras, un bateau-phare ancré au large des côtes de Virginie, l’équipage recueille trois hommes dérivant dans leur canot endommagé…

Skolimowski débarque à Hollywood

Critique : Au début des années 80, le cinéaste polonais Jerzy Skolimowski commence à jouir d’une certaine reconnaissance de ses pairs. Il vient notamment d’étonner avec l’excellent Travail au noir (1982) qui a révélé le talent de Jeremy Irons et a enchaîné avec Le succès à tout prix (1984) qui traite des difficiles relations père-fils. Le réalisateur est alors approché par l’éphémère compagnie américaine CBS Theatrical Films (1981-1985) pour tourner son premier film hollywoodien.

Il s’agit de l’adaptation d’un récit publié en 1960 par Siegfried Lenz, intitulé Das Feuerschiff, soit Le bateau phare. Si le script de William Mai et David Taylor tente bien de faire de ce récit sur un conflit entre un père et son fils un thriller commercial, la patte de Jerzy Skolimowski change fortement la donne. Le réalisateur est un habitué des œuvres étranges qui semblent d’abord se conformer à un moule préétabli, avant de s’en éloigner et de désarçonner le spectateur.

Le bateau phare, photo d'exploitation 1

© 1985 CBS Inc. / © 2019 L’Atelier d’images et Malavida Films. Tous droits réservés.

Un oxymore cinématographique

Le titre lui-même est un oxymore qui s’avère particulièrement programmatique. Ainsi, le terme de bateau suggère le voyage et le déplacement, tandis que le phare incarne la stabilité face à une nature hostile. Le long-métrage va ainsi épouser cette figure de style contradictoire en isolant les personnages sur un bateau dont la fonction de phare l’oblige à rester ancré au même endroit durant plusieurs mois. S’ouvre alors une vaste métaphore de nos existences qui se doivent de garder un cap malgré les aléas et les tempêtes de la vie. Au cœur de ce bateau-monde se joue une autre métaphore, psychanalytique cette fois-ci, entre un père et son fils qui va devoir symboliquement tuer ce dernier pour pouvoir s’affranchir.

Au milieu de ce monde désespérément immobile, un trio de gangsters débarque et prend l’ensemble du rafiot en otage. Débute alors une autre opposition entre le chef des gangsters, une sorte de dandy extravagant interprété avec maestria par Robert Duvall, et le capitaine du navire joué avec solidité et sobriété par Klaus Maria Brandauer. Si le premier semble être un homme d’honneur, il n’en est pas moins dangereux et déterminé, tandis que le second paraît lâche, mais non dépourvu d’un certain sens du devoir.

Une ambiance tendue particulièrement séduisante

Tous ces êtres commencent par cohabiter dans un climat de suspicion, avant que la violence ne se mette de la partie et détruise peu à peu ce petit univers clos. Alors que Skolimowski dresse lentement le portrait de ces êtres, il n’hésite pas à créer une atmosphère vaporeuse du meilleur effet, grâce à une excellente gestion du climat ambiant (brume, pluie, orage), mais aussi à une excellente partition musicale de Stanley Myers, agrémentée des boucles électroniques d’un certain Hans Zimmer, un débutant appelé à un bel avenir à Hollywood.

Le bateau phare, photo d'exploitation 2

© 1985 CBS Inc. / © 2019 L’Atelier d’images et Malavida Films. Tous droits réservés.

Quand la violence commence à se déchaîner, le réalisateur fait montre d’une réelle efficacité. On adore par exemple la scène où le cuistot noir décide de se venger en exécutant un gangster de manière très théâtrale. Dans ces moments, Le bateau phare acquiert une puissance d’évocation qui en fait une œuvre passionnante. On y retrouve alors des accents littéraires proches à la fois de Joseph Conrad (Au cœur des ténèbres), d’Herman Melville (Moby Dick), ainsi qu’une accointance avec l’œuvre cinématographique de John Huston.

Le film doit toutefois être redécouvert par les cinéphiles, malgré ses quelques défauts

Malheureusement, tout n’est pas du même niveau et le film connaît également quelques chutes de rythme. On n’est pas vraiment convaincu par la prestation du jeune Michal Skolimowski (Michael Lyndon au générique) qui surjoue un peu trop le jeune homme buté. Ses poses à la James Dean n’apportent absolument rien au film, si ce n’est une référence trop explicite.

Présenté avec succès au Festival de Venise en 1985, Le bateau phare a obtenu le Prix Spécial du Jury, tandis que Robert Duvall a été récompensé pour sa prestation par des prix annexes. Sur le plan commercial par contre, le long-métrage a été un échec, avec seulement 114 614 spectateurs sur tout le territoire français en février 1986. Aux Etats-Unis, le film est sorti dans une combinaison très restreinte de salles, entraînant la disparition de la branche cinéma de CBS.

Reste aujourd’hui à redécouvrir une œuvre étonnante et ambitieuse qui ne peut laisser indifférent.

Le bateau phare, la jaquette blu-ray

© 1985 CBS Inc. / © 2019 L’Atelier d’images et Malavida Films. Tous droits réservés.

Le test blu-ray :

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Compléments & packaging : 3/5

Le film est proposé dans un packaging traditionnel, entouré d’un fourreau classique. Sur le plan des suppléments, l’éditeur propose une introduction du film par le réalisateur (5min) où celui-ci explique que les rôles initialement distribués à Robert Duvall et Klaus Maria Brandauer ont été intervertis au dernier moment, ce qui a déclenché la fureur du second.

Un autre entretien avec Skolimowski (10min) permet au réalisateur de revenir sur son conflit permanent avec Brandauer, comédien difficile et caractériel, mais aussi sur sa bonne entente avec Robert Duvall qu’il qualifie de grand homme. On peut regretter le manque d’analyse de la part d’un réalisateur qui ne se livre que par bribes.

Enfin, une série de bandes6annonces de l’éditeur vient clore cette section.

L’image : 4/5

La restauration effectuée pour la reprise du film en salles est plutôt réussie, d’autant qu’il était difficile de retranscrire au mieux une image volontairement vaporeuse. Les nombreuses scènes se déroulant dans la brume ne facilitent pas le travail de compression, mais l’ensemble tient plutôt bien la route, avec des contrastes corrects et une colorimétrie chatoyante.

Le son : 3/5

Deux pistes sonores disponibles ici. On commence par la version originale en anglais sous-titré proposé en DTS HD Master Audio 5.1. Celle-ci est plutôt naturelle, mais pâtit d’un volume sonore peu percutant. Il faut vraiment monter le son très fort pour obtenir un rendu convaincant. Les voix semblent quelque peu étouffées par les ambiances. Seule la musique s’en sort avec les honneurs, mais sans ébouriffer.

En ce qui concerne la version française en DTS HD Master Audio en mono, elle accentue la puissance vocale des doubleurs (pas au top), mais étouffe un peu plus les ambiances.

Critique et test blu-ray : Virgile Dumez

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Le bateau phare, l'affiche

© 1985 CBS Inc. / Illustrateur : Michel Prat. Tous droits réservés.

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