Christophe Blanc revient dans Just Kids sur son enfance marquée par le deuil de ses parents, avec beaucoup de sensibilité. Le film est porté par un duo d’acteurs absolument formidable.
Synopsis : Jack, dix-neuf ans, Lisa, dix-sept ans, et Mathis, dix ans, se retrouvent brutalement orphelins. Chacun réagit à sa façon à la catastrophe familiale. Lisa prend ses distances, Jack, tout juste majeur, se voit confier la garde de Mathis. Une nouvelle vie commence. Mais comment être responsable d’un enfant quand on est soi-même à peine sorti de l’adolescence ? Et comment se construire un avenir quand le passé devient une obsession dangereuse ? La force et l’énergie de la jeunesse peuvent faire des miracles…
Un drame personnel à l’origine du projet
Critique : Après l’échec commercial de son polar Blanc comme neige (2010) avec François Cluzet, Christophe Blanc a d’abord réalisé un téléfilm, puis a décidé de se lancer dans l’écriture d’un scénario très personnel qui allait donner Just Kids (2020). Il s’agissait pour le cinéaste de revenir sur sa propre expérience puisqu’il a lui-même été orphelin très jeune. Ainsi, l’écriture du film devait lui servir d’exutoire, tout en se voulant une œuvre forte sur la capacité de résilience de l’être humain. Il a fallu plusieurs versions pour parvenir à trouver la bonne dynamique et décider notamment que son expérience personnelle serait ici partagée entre deux frères, ce qui permettait d’observer des réactions différentes en fonction de l’âge.
Ainsi, le plus grand frère, incarné avec beaucoup de puissance par l’excellent Kacey Mottet Klein, déjà largement apprécié dans les films d’André Téchiné, doit grandir d’un seul coup, sans prévenir. Il devient effectivement le tuteur légal de son petit frère, le préadolescent Mathis, joué avec un beau naturel par Andrea Maggiulli. Le cinéaste paraît moins à l’aise avec le personnage de Lisa, la sœur de dix-sept ans interprétée par Anamaria Vartolomei, dont on parvient moins à saisir la psychologie tant elle passe en coup de vent dans le film. Il est davantage inspiré avec la petite amie du grand frère, servie par une Angelina Woreth visiblement très à l’aise dans l’intensité dramatique.
Un drame intense qui repose entièrement sur ses jeunes acteurs
Nous sommes donc invités à suivre le destin cruel de ces jeunes gens confrontés à la disparition de leurs deux parents. Pour parvenir à maintenir l’intensité dramatique, le cinéaste a eu l’idée de mener ses personnages sur les traces de la vie cachée de leur paternel en Espagne. Si le film semble un temps basculer dans le polar, Christophe Blanc n’en fait finalement rien et préfère rester concentré sur le drame humain vécu par ses personnages. Il ajoute à cela quelques scènes de rêves particulièrement réussies, ainsi que quelques métaphores animalières qui donnent au long-métrage sa petite singularité.
Réalisé avec talent, Just Kids marque surtout le spectateur par l’intensité du jeu des deux acteurs principaux, vraiment formidables. On s’attache vraiment à ces deux frères qui ne réagissent pas du tout de la même manière aux événements. Si le plus jeune est attachant par sa douleur sourde, mais bien réelle, le plus grand touche par le poids énorme qui pèse désormais sur ses épaules encore trop fragiles. On adore notamment les séquences où Kacey Mottet Klein fend l’armure et montre par une larme à quel point il est désarçonné face à cette situation. Et que dire de ces séquences où le cinéaste utilise une superbe musique orchestrale visant à faire ressentir le désarroi des protagonistes ?
Un mélodrame assumé qui est sorti au cœur de la crise sanitaire
Décrit comme un pur mélodrame par son réalisateur – qui en assume donc les excès et l’utilisation d’une musique soulignant les émotions – Just Kids est effectivement intense, tout en offrant à ses personnages une porte de sortie. Dès lors, le long-métrage peut être vu comme un très beau film sur la résilience et cette capacité de l’être humain à surpasser les plus grands drames pour parvenir à une forme d’équilibre, même précaire.
Sorti au mois d’août 2020 durant la crise sanitaire du coronavirus, Just Kids n’a pas eu l’écho qu’il méritait auprès des spectateurs. Il s’est contenté de 5 172 entrées sur toute la France, malgré des papiers globalement favorables dans la presse. Depuis, le métrage est disponible uniquement en DVD, et bien entendu en VOD. On ne peut que le conseiller aux amateurs de drames intenses et justes.
Critique de Virgile Dumez