Exorcisme Tragique (Les Monstres se mettent à table) – la critique + le test blu-ray (1975)

Giallo | 1h32min
Note de la rédaction :
7/10
7
Exorcisme tragique, affiche

  • Réalisateur : Romano Scavolini
  • Acteurs : Luigi Pistilli, Pilar Velázquez, Evelyn Stewart (Ida Galli), Ivan Rassimov, Ezio Marano
  • Date de sortie: 09 Avr 1975
  • Année de production : 1972
  • Nationalité : Italien
  • Titre original : Un bianco vestito per Marialé
  • Titres alternatifs : Paranoïa (France), Tragisch exorcisme (Flamand), Spirits of Death (Royaume-Uni), Beyaz Gelinlik (Turquie), La orgía de la sangre (Espagne),
  • Autres acteurs :
  • Scénaristes : Remigio Del Grosso, Giuseppe Mangione
  • Monteur : Francesco Bertuccioli
  • Directeur de la photographie : Romano Scavolini
  • Compositeur : Fiorenzo Carpi
  • Chef Maquilleur :
  • Producteurs : Franca Luciani
  • Sociétés de production :
  • Distributeur : Sofradis Telemondial
  • Distributeur reprise :
  • Date de sortie reprise :
  • Editeur vidéo : VIP Vidéocassette Diffusion (VHS), Ciné Loisirs (VHS), Le Chat qui fume (DVD, Blu-ray)
  • Date de sortie vidéo : Avril 2016 (Le chat qui fume)
  • Budget :
  • Box-office France / Paris-Périphérie :
  • Box-office nord-américain / monde :
  • Rentabilité :
  • Classification :
  • Formats : 2.35 : 1 / Couleur (35 mm, Telecolor, Colorscope) / Mono
  • Illustrateur/Création graphique : © Tous droits réservés / All rights reserved
  • Crédits : © Copyrights : KMG Cinema, Rewind Film. Tous droits réservés / All rights reserved
Note des spectateurs :

Cluedo horrifique à forte inspiration du giallo, Exorcisme Tragique n’a rien d’une production méphistophélique induite par son titre trompeur, post Friedkin.

Synopsis : A l’âge de huit ans, Marialé assiste aux meurtres de sa mère et de son amant par son père. Adulte, elle vit recluse dans un château avec Paolo, son mari. Sans l’en avertir, et pour briser la monotonie dans laquelle elle se confine, elle décide d’inviter plusieurs amis à passer un week-end festif. Revêtant la robe blanche et tachée de sang que sa mère portait à sa mort, Marialé décide d’affronter les démons de son passé, tandis que les occupants du château meurent un par un autour d’elle.

Point de possession diabolique, mais une transe psychanalitique

Critique :  De Romano Scavolini en France, on se souvient surtout de Cauchemars à Daytona Beach (disponible en blu-ray chez Pulse Vidéo), l’un de ces nasty movies, interdit en Grande Bretagne dans sa version intégrale, et sorti en France en 1981 avec une superbe affiche dessinée de Landi, accompagné d’une interdiction lourde aux moins de 18 ans. Le reste de sa carrière, un peu plus d’une douzaine de longs métrages, est quelque peu passé inaperçu, et n’était d’ailleurs pas orienté sur l’horreur et le gore.

Exorcisme TragiqueSpirits of Death en anglais, Un bianco vestito per Marialè (en version originale), sort en 1975 en France, 8 mois après le phénoménal film de William Friedkin, L’Exorcisme. La confusion dans les titres est donc volontaire, la mode étant soudainement aux diaboliques machinations du Malin sur le grand écran, or des démons et des incantations religieuses dans le film de Scavolini, il n’y en a point, mais on évoquera en revanche un exorcisme psychanalytique qui donne davantage de profondeur au titre hexagonal, à condition d’aller au-delà de sa dimension d’exploitation.

Exorcisme tragique, un temps fort chez Romano Scavolini, bisseux malgré lui

De retour du Vietnam où le cinéaste, intéressé par les documentaires et les implications géopolitiques des grands événements du monde, a pu s’adonner à sa rigueur journalistique de photographe de guerre, Scavolini démarre une carrière nouvelle avec ce cluedo à l’anglaise, dans l’intrigue, mais traité avec toute la ferveur artistique du cinéma italien de la décennie. Pourtant, loin d’un traitement poussiéreux propre aux adaptations des Agatha Christie à l’écran, l’auteur emprunte la direction à la mode dans son pays d’origine du giallo, d’un cinéma d’esthète où chaque plan est composé. La photographie, signée par le cinéaste en personne, pour faire honneur à l’une de ses formations principales, est sublimée ; elle est particulièrement mise en valeur par les afféteries de style, notamment dans le montage complexe qui ose décliner à peu près tous les abus du genre, hypnotisant le regard du spectateur, pour une projection psyché-psycho-ésotérique qui ravit toujours l’œil du spectateur contemporain, face à un tel amour de la technique cinématographique et de l’art du macabre.

Les prémices de Cauchemars à Daytona Beach

Le sujet n’est pas des plus originaux, et sera repris d’une certaine façon dans Cauchemars à Daytona Beach, à savoir le trauma d’une enfant, témoin de l’assassinat de sa mère et de l’amant de celle-ci, par son père, durant l’acte sexuel, avec toutes les traces subversives et névrotiques que laissera l’incident mal sous tous rapports. Dans Nightmares, il s’agissait d’un enfant qui agissait lui-même à la hache, témoin des batifolages excessifs de ses géniteurs, en plein acte.

La complexité narrative tient évidemment de l‘usage de l’ellipse et du flashback, puisque l’intrigue, après une introduction en forme de double homicide, quelques décennies plus tard, s’attarde sur la jeune fille, devenue bourgeoise, tristement mariée, et adultère à son tour.

Tout le style et l’art de la réalisation du giallo

Dans un magnifique décor austère de demeure loin de tout modernisme, où la beauté gothique est systématiquement exaltée, l’auteur multiplie les personnages qui vont tomber les uns après les autres, au cœur d’une étrangeté d’atmosphère baroque, d’effets et de contexte, celui d’une soirée mondaine, cynique, perverse, ouvertement décadente, jusque dans les dialogues, où la femme noire est décrite par l’un des personnages comme tout juste tombée de son arbre (sic). On partouze, légèrement, on se caresse entre femmes, c’est les années 70, mais on se prend aussi quelques belles balles ici et là…

Le giallo s’adonne aux tics oniriques d’une époque pour le plus grand plaisir des amateurs, venus là pour un savoureux mélange de bravoure artistique, d’érotisme fécond et de violence érigée en art morbide, dans des décors sibyllins.

D’une VHS tronquée à un blu-ray d’exception chez Le Chat qui Fume

Proposé dans une copie formidable de fraicheur en blu-ray, dans une version intégrale rare, après des versions tronquées en VHS, notamment chez VIP, ce grand bal des maudits, où la critique sociale des classes ira jusqu’au bout de son assaut sanglant, est aussi l’occasion de revoir Ida Gall (Evelyn Stewart sur l’affiche), égérie magnifique d’un cinéma bis, que l’on avait pourtant croisée dans Le Guépard, de Visconti, 10 ans auparavant, et deux acteurs bien-connus des amateurs de séries B italiennes, tels que Luigi Pistilli (La Baie Sanglante, de Bava, Ton vice est une chambre close dont moi seul ai la clé , de Sergio Martino) et Ivan Rassimov (Le vice dans la peau, de Joe D’Amato, Les 7 berets rouges, de Mario Siciliano).

Au final, le film est un tour de force somptueux inhérent à un cinéma italien regorgeant de raretés que l’on aime découvrir encore aujourd’hui.

Frédéric Mignard

Exorcisme tragique, affiche

Copyrights : KMG Cinema, Rewind Film. All Rights Reserved

Test Blu-ray d‘Exorcisme tragique


L’éditeur Le Chat qui Fume rivalise d’ingéniosité pour s’immiscer parmi les grands éditeurs européens de films bis méconnus, à l’image d’Arrow Films au Royaume Uni. Packaging digipack bordé d’affiches, dont la française de 1975, picture discs, fourreau luxueux… L’emballage devrait faire réfléchir les éditeurs blasés.

Compléments  et  packaging : 5 / 5

C’est beau la passion mise en œuvre par l’éditeur pour garnir un maximum son bébé. La retraitée Ida Galli revient dans un document maison de plus de 50mn, en VOSTF et en HD, sur son illustre carrière, tout un pan du cinéma italien évoqué avec dévotion.

Ésotérique et Cryptique livre le point de vue du cinéaste, âgé désormais de 76 ans, lors d’une interview passionnante de 37 min. Une carrière à part à laquelle il donne beaucoup de chair dans ce document rare.

Il est intéressant d’avoir en complément le point de vue d’un journaliste de Culturopoing, Olivier Rossignot, sur le cinéaste qui aime à décrire en particulier l’aspect contestataire et anarchique du cinéaste, tout en analysant l’aspect giallo du film.

Très bon entretien Jean-François Rauger pour évoquer le contexte italien de l’époque, la signification du titre…
On notera quelques scènes supplémentaires, amputées du son, dépourvues, évidemment, de tout doublage français, et la présence de quelques bandes annonces alléchantes de titres de l’éditeur.
Ceux qui voudront revoir le film dans les conditions de la VHS des années 80, seront ravis de la présence du Mode VHS, une excentricité propre à l’éditeur que l’on adore !

On ose le dire, tous ces compléments sont complets et passionnants.

• Histoire d’Ida, entretien avec Ida Galli (53 mn)
• Ésotérique et Cryptique, entretien avec le réalisateur, Romano Scavolini (37 mn)
• L’exorcisme de Marialé par Jean-François Rauger (13 mn)
• Scavolini l’anarchiste par Olivier Rossignot (12 mn)
• Scènes inédites
• Exorcisme Tragique en mode vhs
• Films annonces

Image : 4 / 5

Très léger grain élégant, contraste affirmé pour faire ressortir une colorimétrie élégante, lumière assidue, noirs souvent profonds, la copie est visuellement d’une grande splendeur.

Son : 3/5

La VF est plus pêchue dans son DTS HD MONO, mais la VO l’emporte dans la précision des voix et du contexte sonore. Rien de bien exaltant cependant.

Frédéric Mignard

Exorcisme tragique en blu-ray chez le Chat qui fume (2016)

Adaptation visuel : Frédéric Domont © Copyrights : KMG Cinema, Rewind Film. Tous droits réservés / All rights reserved

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Romano Scavolini, Luigi Pistilli, Pilar Velázquez, Evelyn Stewart (Ida Galli), Ivan Rassimov, Ezio Marano

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