Blanche Neige (Mirror Mirror) est l’un des deux projets fratricides autour du conte des frères Grimm, sortis durant le printemps 2012. Flop au box-office, cette comédie exubérante ne manquait pourtant pas de drôlerie.
Synopsis : Lorsque son père, le Roi, meurt, Blanche Neige est en danger. Sa belle-mère, cruelle et avide de pouvoir, l’évince pour s’emparer du trône. Quand la jeune femme attire malgré tout l’attention d’un Prince aussi puissant que séduisant, l’horrible marâtre ne lui laisse aucune chance et la bannit. Blanche Neige se réfugie alors dans la forêt…
Recueillie par une bande de nains hors-la-loi au grand cœur, Blanche Neige va trouver la force de sauver son royaume des griffes de la méchante Reine. Avec l’aide de ses nouveaux amis, elle est décidée à passer à l’action pour reconquérir sa place et le cœur du Prince…
Photo Credit : Jan Thijs © 2012 Relative Media. All Rights Reserved
2012, Blanche Neige attend doublement son prince
Critique : 2012. Deux blockbusters américains rivaux sortent à quelques mois d’intervalle pour célébrer la candide héroïne de Disney, même si, officiellement, il s’agit d’une relecture du conte des frères Grimm. Une version épique et sombre intitulée Blanche Neige et le chasseur débarque en juin, avec Charlize Theron et Kristen Stewart en tête d’affiche, et une comédie, avec Julia Roberts en mégère et Lily Collins en douce princesse, prend les devants en avril, curieusement intitulée, Mirror Mirror contre l’avis du réalisateur Tarsem Singh qui préférait le plus poétique Snow.
Le résultat plus favorable pour Kristen Stewart au box-office (396M$ dans le monde) que pour la future héroïne d’Emily in Paris (183M$) a voué la version de Tarsem Singh aux oubliettes d’Hollywood, ce qui est dommage tant le divertissement est généreux et bitchy.
Une version bitchy et cougar irrésistible
Il est vrai que cette vision humoristique du conte des frères Grimm perd en noirceur et réflexion ce qu’elle gagne en légèreté, puisqu’ici, le scénario s’adonne volontiers dans l’humour cabotin, celui qui amuse les enfants dans les salles sans pour autant crisper les adultes accompagnateurs, tant le propos et la forme sont gracieux et savoureux. Julia Roberts en cougar imbue de sa beauté illumine l’écran et retrouve des forces de jeu qui lui faisaient défaut depuis un certain temps. L’actrice, récalcitrante à se laisser aller dans la fantaisie, s’amuse finalement énormément, parvenant à communiquer aisément sa bonne humeur. Elle s’applique dans les stéréotypes de la femme autoritaire prête à toutes les méchancetés pour satisfaire ses vanités. La voir courtiser le jeune prince (Armie Hammer, pas le plus expressif des acteurs), du haut de son relatif grand âge nous fait sourire. Elle est le grand plaisir de cette farce. Face à elle, Lily Collins, vouée à incarner la beauté immaculée, n’est pas sans second degré non plus, mais nous paraît fade. On s’amusera davantage en compagnie des sept nains, devenus brigands sylvestres ; ils s’affublent d’une tenue en accordéon qui les fait bondir sur les victimes de leur rapine. Une idée géniale qui fait d’eux des nains géants pour des séquences de cape et d’épée irrésistibles. Crado, Glouton, Boucher, Loup, Grimm l’instit, Demi-Pinte et Napoléon ont plus d’un tour dans leur sac, et seront à coup sûr les favoris des bambins. Ils représentent l’antithèse des nains numériques choisis par Disney en 2025 pour Blanche Neige de Marc Webb, vecteurs de malaise global dans une œuvre dépourvue d’originalité.
Affiche : Troïka. © 2012 Relative Media. All Rights Reserved
Une nouvelle vision de Tarsem Singh pas forcément en phase avec le public
Evidemment, la minceur du script pourra décevoir les spectateurs en quête d’action ou d’émotions. Avec Tarsem Singh à la réalisation, c’est plus la quête d’un style propre au conte enchanté qui sert d’atout majeur au métrage. Le réalisateur de The Cell et des Immortels (également produit par l’indépendant Relativity Media et sorti 6 mois plus tôt) et propose plutôt une autopsie de tout ce qui caractérise le conte de fées, avec une propension unique à boursoufler les plans de couleurs fécondes, de formes ahurissantes et de cadrages singuliers. Tout est ici propice à nourrir l’imaginaire enfantin, comme cette forêt enneigée où l’on combat un beau dragon volant, ou la magnificence du château royal, niché sur une improbable corniche, ou encore le saut dans le fantastique bariolé que représente le passage de la sorcière à travers le miroir… Singh continue donc de se voir comme un artisan peintre du septième art, qui, dès le générique d’ouverture, donne dans l’animation traditionnelle sublimée. Il livre une œuvre certes légère, mais resplendissante dans son homogénéité, une fantaisie diaprée qui ravit la rétine et comble les aspirations enfantines. Bref, une relecture satisfaisante d’une histoire qu’on ne connaît que trop bien et qui ne paraît pas trop redondante à l’écran. Presque un exploit, donc quand on assiste au naufrage de la version Disney en 2025.
Les immortels (affiche personnage, Henry Cavill) – Adaptation : Troïka © 2011 Relativity Media. Tous droits réservés
Box-office de Blanche Neige de Tarsem Singh
Six mois après la réception mi-figue mi-raisin des Immortels (75M$ de budget, recettes mondiales de 226M$), le réalisateur Tarsem Singh place une nouvelle fois la société Relativity Media en difficulté avec des recettes américaines élevées à 65M$ et des chiffres mondiaux de 183M$, pour un budget costaud de 85M$, hors frais de marketing qui furent élevés. Il faut dire que le studio indépendant, très présent en ce début de décennie (une vingtaine de longs rien qu’en 2011) commence à connaître de gros soucis financiers qui vont le conduire à faire faillite une première fois en 2015. La société de de Ryan Kavanaugh espérait 25-30M$ pour ce premier tour en salle. Elle fut douchée.
Le week-end du 30 mars, la comédie avec Julia Roberts doit néanmoins affronter la continuation exceptionnelle d’Hunger Games, premier de la franchise, alors en semaine 2, et La Colère des Titans et sa 3D que Warner propulse dans 3 545 salles. Mirror Mirror se contente d’une 3e place, avec seulement 18M$ dans 3 603 cinémas, loin derrière les 58M$ d’Hunger Games et des 33M$ de La Colère des Titans.
Si le week-end férié de Pâques lui permet de se maintenir au-dessus des 10M$ lors de son deuxième week-end, l’adaptation des frères Grimm n’est plus que 7e lors de son 3e week-end. Elle restera néanmoins une vingtaine de semaines à l’affiche.
Dans le monde, Blanche Neige se démarquera au Royaume-Uni (11 908 000$), en Russie (9 700 000$) et au Brésil (9 100 000$). La France sera son 5e marché mondial, en incluant l’Amérique, avec 6 906 000$ de recettes. Il faut évidemment prendre en compte la manne financière de la 3D relief, très en vogue à l’époque.
Les sorties de la semaine du 11 avril 2012
Affiche : Laurent Pons pour Troïka. © 2012 Relative Media. All Rights Reserved
Biographies +
Julia Roberts, Lily Collins, Sean Bean, Armie Hammer, Michael Lerner, Nathan Lane