Avec Barbaque, Fabrice Eboué se lance avec talent dans la comédie trash et dénonce l’esprit de chapelle qui pousse à l’extrémisme. A réserver aux amateurs d’humour épicé.
Synopsis : Vincent et Sophie sont bouchers. Leur commerce, tout comme leur couple, est en crise. Mais leur vie va basculer le jour où Vincent tue accidentellement un vegan militant qui a saccagé leur boutique… Pour se débarrasser du corps, il en fait un jambon que sa femme va vendre par mégarde. Jamais jambon n’avait connu un tel succès ! L’idée de recommencer pourrait bien les titiller…
Fabrice Eboué pratique l’humour sans filet
Critique : Après avoir signé plusieurs comédies qui traitaient de questions identitaires avec son complice Thomas Ngijol (dont le beau succès Case départ en 2011), Fabrice Eboué a cherché avec Barbaque (2021) à se diversifier, aussi bien en tant que cinéaste qu’acteur. Effectivement, son film impliquait de suivre les pas d’un couple de serial killers cannibales, tout en ne les détestant pas afin de rester connecté à l’intrigue et surtout d’en rire.
© 2021 Cinéfrance Studios – TF1 Studio – Apollo Films – TF1 Films Production – Chez Félix. All Rights Reserved.
Le long-métrage prend donc comme point de départ une situation devenue malheureusement assez banale, à savoir l’agression d’un boucher par un groupe d’activistes vegans. Dès lors, sa vengeance l’amène à commettre l’irréparable, tandis qu’un quiproquo pousse le couple à vendre de la chair humaine à ses clients, avec un succès non négligeable. Si les spectateurs sont d’abord frappés par le culot du sujet qui s’en prend ouvertement aux dérives de l’activisme actuel – et qui concerne tout le spectre politique, allant des vegans aux féministes ou bien entendu aux nationalistes de tout poil – Barbaque devient également une œuvre plus sentimentale lorsque le couple se rend compte que leurs actes cimentent à nouveau leur relation en perdition.
Le vegan se consomme saignant
Afin de rendre le tout drôle, voire franchement féroce, Fabrice Eboué n’a pas hésité à donner dans la caricature. Clairement destiné à un public qui aime l’esprit Hara-Kiri et l’humour méchant, Barbaque ne cherche jamais à lisser son propos, tout en équilibrant tout de même sa dénonciation. Il se fait clairement plaisir en se moquant des vegans et de leurs dogmes que les plus extrêmes tentent d’imposer aux autres. Pour autant, il ne justifie jamais les actes sanguinaires de ce couple de bouchers qui se découvrent une âme d’équarisseurs d’êtres humains.
Parfois très gore et particulièrement saignant, Barbaque n’est pas fait pour les âmes sensibles et peut donc parfois indisposer par ses excès graphiques et sa description d’un couple totalement psychopathe. Pour autant, il ne pourra que ravir les amoureux d’un humour déjanté comme on pouvait autrefois en trouver dans des films culte comme Bernie (Dupontel, 1996). Ce type d’œuvre jusqu’au-boutiste devient de plus en plus rare à mesure que les esprits se rétrécissent, à cause de chapelles qui ne supportent plus que l’on se moque d’elles.
Des comédiens aux dents affutées
La comédie s’avère donc particulièrement drôle et féroce, notamment par l’alchimie qui se dégage du duo formé par Fabrice Eboué et l’excellente Marina Foïs. Face à eux, les autres acteurs assurent également, dont le couple d’amis insupportables de prétention interprété par Jean-François Cayrey et Virginie Hocq. Enfin, on adore toutes les scènes avec le petit ami vegan joué par Victor Meutelet. Véritable tête à claques, ce personnage incarne à lui tout seul ce que la majorité des gens ne supporte pas chez ces idéologues bornés, condescendants et surtout, donneurs de leçons.
On regrettera d’autant plus le dernier quart d’heure qui démontre un réel essoufflement de la dynamique narrative, tandis que la fin peut paraître abrupte. On sent que Fabrice Eboué n’a pas vraiment su finir son film auquel il manque une chute, ou une conclusion digne de ce nom. C’est assurément dommage car Barbaque constitue sans nul doute le meilleur effort du comédien réalisateur à ce jour.
Trop peu de viandards dans les salles
A sa sortie en octobre 2021, Barbaque est proposé dans une belle combinaison de 330 salles et ne cumule que 123 000 entrées pour sa semaine d’investiture. Un score qui sera à peine doublé en fin de parcours, au bout de sept semaines d’exploitation. Ainsi, malgré un parc de salles plus important en deuxième semaine, les résultats s’effondrent de 52 % pour s’établir à 59 617 viandards supplémentaires. La semaine suivante, la chute est encore sévère, preuve d’un bouche-à-oreille plutôt défavorable, ce qui n’est pas étonnant au vu de la radicalité du film. La comédie saignante a terminé sa carrière avec 239 742 pièces de boucherie vendues. On notera d’ailleurs qu’à Paris où la communauté des vegans est la plus importante, le long-métrage a été un très gros échec avec seulement 54 807 chasseurs dans les salles.
Critique de Virgile Dumez
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