A partir d’un fait réel impressionnant, 13 jours 13 nuits décrit une opération d’exfiltration à haut risque à la manière d’un thriller. La réalisation de Martin Bourboulon parvient à créer une tension de chaque instant.
Synopsis : Kaboul, 15 août 2021. Alors que les troupes américaines s’apprêtent à quitter le territoire, les Talibans prennent d’assaut la capitale et s’emparent du pouvoir. Au milieu du chaos, des milliers d’afghans tentent de se réfugier dans le dernier lieu encore protégé : l’Ambassade de France.
Seuls, le commandant Mohamed Bida et ses hommes en assurent la sécurité. Pris au piège, il décide de négocier avec les Talibans pour organiser un convoi de la dernière chance avec l’aide d’Eva, une jeune humanitaire franco-afghane. Commence alors une course contre la montre pour évacuer les réfugiés jusqu’à l’aéroport et fuir l’enfer de Kaboul avant qu’il ne soit trop tard.
L’Afghanistan à nouveau sous la coupe des talibans
Critique : En 2021, le président démocrate Joe Biden annonce le retrait total des troupes américaines d’Afghanistan, pays sous contrôle depuis la chute du régime taliban fin 2001 à la suite des attentats du 11 septembre 2001. Vingt longues années d’instabilité ont démontré l’incapacité des Occidentaux à démocratiser cette région du monde. De manière totalement prévisible, le départ précipité des Américains a aussitôt entraîné le retour des talibans (des fondamentalistes islamistes dirigés par Haibatullah Akhundzada) qui se terraient dans des pays comme le Pakistan voisin. En seulement quelques jours, les talibans ont reconquis la quasi-totalité du pays, menaçant la capitale Kaboul dès le mois d’août 2021.
© 2025 Pathé / Photo : Jérôme Prébois. Tous droits réservés.
Dans ce contexte, les ambassades européennes – et donc française également – ont organisé en urgence le départ de leurs ressortissants, ainsi que la destruction de toutes leurs infrastructures pour ne pas les abandonner à l’ennemi. 13 jours 13 nuits raconte donc l’évacuation houleuse de l’ambassade française, ainsi que le sauvetage de quelques milliers de femmes, enfants et dissidents politiques. Le tout est fondé sur le récit autobiographique du commandant Mohamed Bida intitulé 13 jours, 13 nuits dans l’enfer de Kaboul et publié en 2022.
Une reconstitution confondante de réalisme
Certes, le film de Martin Bourboulon adopte pleinement le point de vue de son témoin principal dont il ne remet jamais en question le récit, mais il a tout de même à cœur de reconstituer au mieux les événements sans leur adjoindre des péripéties supplémentaires qui seraient inventées pour l’occasion. Sa seule liberté est d’avoir transformé le personnage d’interprète en une femme, incarnée par Lyna Khoudri.
Reconstituée au Maroc – un tournage sur les lieux étant bien entendu impossible – à l’aide d’un budget conséquent s’élevant à près de 30 millions d’euros, l’histoire du commandant Bida (excellent Roschdy Zem, notamment lorsqu’affleurent ses moments de doute) s’avère exemplaire à plus d’un titre. Tout d’abord, elle prouve que des événements tragiques peuvent révéler en chaque être une part d’ombre, mais aussi de lumière. Ainsi, cet homme qui n’est qu’à quelques jours de sa retraite pourrait s’en tenir aux ordres de l’administration et ne s’occuper que des ressortissants français. Pourtant, il prend sur lui de faire ouvrir les portes de l’ambassade pour sauver plusieurs milliers d’autochtones.
13 jours 13 nuits d’une tension très palpable
Dès lors, le long métrage rappelle avec beaucoup de conviction le rôle positif que peut encore avoir la France à l’étranger, notamment sur le plan humanitaire. Bien entendu, Martin Bourboulon démontre que le temps administratif est toujours trop long par rapport à la réalité du terrain, forçant le commandant à prendre des décisions qui ne sont pas validées par le haut commandement. Toutefois, 13 jours 13 nuits salue avant tout un effort collectif permettant de venir en aide à une population en détresse.
© 2025 Pathé / Photo : Jérôme Prébois. Tous droits réservés.
Tourné à la manière d’un pur thriller, 13 jours 13 nuits bénéficie du savoir-faire de son réalisateur, toujours à l’aise pour tourner en plan séquence ou pour mettre en scène des foules impressionnantes. Par ailleurs, il signe plusieurs séquences de suspense très tendues, notamment lors de l’arrêt du convoi par une milice talibane.
Des personnages souvent trop archétypaux
Dans cette volonté farouche d’avancer pied au plancher, on peut regretter l’absence d’une certaine nuance et la présence de personnages trop archétypaux (l’innocente interprète Lyna Khoudri, la journaliste courageuse jouée par Sidse Babett Knudsen). Cependant, on est totalement en accord avec le cinéaste quant à sa description sans concession des talibans, ces extrémistes qui n’accordent aucune valeur à la vie de ceux qu’ils considèrent comme mécréants et qui suppriment toute liberté aux femmes qu’ils jugent impures par nature.
Si le long métrage est la description d’une opération réussie, il n’en oublie pas d’évoquer le terrorisme à travers une séquence terminale très impressionnante qui assombrit la tonalité d’ensemble. Ainsi, 13 jours 13 nuits se termine dans une ambiance lourde qui démontre que son réalisateur semble dépassé par les horreurs qui se déroulent actuellement dans le monde entier, bien au-delà de l’Afghanistan. Cette fin amère fait donc oublier le caractère quelque peu cocardier d’une œuvre qui tente de fédérer le public français autour d’une action de gloire, à l’heure où certains se complaisent dans l’idée du déclin de la France.
Une sortie calquée sur celle du Comte de Monte-Cristo
Présenté en exclusivité et hors compétition au Festival de Cannes 2025, 13 jours 13 nuits a été positionné par Pathé dans les salles le vendredi 27 juin, soit tout juste un an après Le comte de Monte-Cristo (Alexandre de la Patellière et Matthieu Delaporte, 2024) dont le succès fut phénoménal. Il faut dire qu’une fois de plus la société joue gros avec un budget conséquent estimé à 30 M d’euros. Toutefois, on peut légitimement douter d’un impact similaire auprès du grand public avec cette histoire, bien moins patrimoniale que l’adaptation d’Alexandre Dumas.
Critique de Virgile Dumez
Les sorties de la semaine du 25 juin 2025
© 2025 Pathé / Affiche : RYSK ; photos : Jérôme Prébois. Tous droits réservés.
Biographies +
Martin Bourboulon, Roschdy Zem, Lyna Khoudri, Grégoire Leprince-Ringuet, Sidse Babett Knudsen, Christophe Montenez
Mots clés
Cinéma français, Pathé Distribution, L’Afghanistan au cinéma, Le terrorisme au cinéma, Les attentats au cinéma
