Seize printemps offre une réflexion tendre mais inaboutie autour des amours d’une adolescente en décalage avec les filles de son âge.
Synopsis : Suzanne a seize ans. Elle s’ennuie avec les gens de son âge. Tous les jours pour aller au lycée, elle passe devant un théâtre. Elle y rencontre un homme plus vieux qu’elle qui devient son obsession. Grâce à leur différence d’âge, ils pensent ne plus s’ennuyer ensemble et tombent amoureux. Mais Suzanne sent qu’elle risque de passer à côté de sa vie, celle de ses seize ans qu’elle avait tant de mal à vivre comme les autres.
Critique : En revêtant la triple casquette de scénariste, réalisatrice et actrice principale, la fille de Vincent Lindon et Sandrine Kiberlain fait preuve d’une belle d’ambition mais sans doute aussi d’une certaine forme de maladresse juvénile. Car si l’on peut lui reconnaître un réel talent de mise en scène, la narration s’étire dans des circonvolutions alanguies qui peinent à convaincre.
Suzanne, 16 ans, grandit harmonieusement entre des parents attentifs et décontractés (Florence Viala et Frédéric Pierrot impeccables d’authenticité) et une grande sœur protectrice (Rebecca Marder) dans un quartier aisé de la capitale. Elle rejoint souvent ses camarades de classe pour des discussions autour des soubresauts du monde ou des premiers émois amoureux. Pourtant, tiraillée entre son statut de jeune fille bien sous tous rapports et son désir naissant d’évasion, elle se détache peu à peu de cette jeunesse futile et légère pour jeter son dévolu sur un jeune comédien d’une trentaine d’années (Arnaud Valois) dont la retenue et la maturité correspondent davantage à ses attentes.
Se démarquant des récentes comédies adolescentes, virevoltantes et souvent dotées d’une connotation sociale ou psychologique, Seize printemps se réfugie dans une atmosphère minimaliste toute de pudeur, d’ellipses et de suggestions. Dans une quasi-absence de dialogues se succèdent alors frémissement des âmes, cour discrète et questionnements incessants de deux êtres qui, malgré leur différence d’âge, s’étonnent et se réjouissent de cette osmose intellectuelle inespérée. Un parcours répétitif et languissant dont certains admireront la fraîcheur poétique tandis que d’autres n’en retiendront que l’indolence assumée et néanmoins soporifique, de celle qui laisse peu de chance au spectateur de se laisser emporter par un trop-plein d’émotions.
La jeune réalisatrice révèle cependant une parfaite capacité à ménager des parenthèses et à varier ainsi son mode de communication. Son univers à la fois contemporain et anachronique s’enrichit de références théâtrales, chorégraphiques et musicales. Quelques notes de Vivaldi et plusieurs titres du regretté Christophe alternent avec la musique de Vincent Delerm qui accompagne les meilleures scènes du film, pendant que se multiplient les clins d’œil en direction des œuvres cinématographiques qui ont nourri, depuis son enfance, l’imaginaire de notre cinéaste en herbe. Diabolo Menthe, L’effrontée, (dans lequel on se surprend même à retrouver sous les traits de notre jeune héroïne le minois boudeur de Charlotte Gainsbourg). A nos amours s’invitent fort à propos au cœur de ces rêveries énamourées.
Une intrigue trop peu développée et le jeu quelque peu incertain de son personnage principal empêchent cette première œuvre d’accéder au rang de réussite. En revanche, une mise en scène fluide et inventive laisse entrevoir tout le potentiel de cette réalisatrice prometteuse.
Critique : Claudine Levanneur