Sangraal, film d’heroic fantasy sans saveur, avec Sabrina Siani et Pietro Torrisi, est l’un des premiers sous Conan le barbare italiens, de ceux qui pullulaient entre 1982 et 1985.
Synopsis : Les aventures de Sangraal, l’épée de feu, le fils du roi Ator, rescapé du massacre de sa famille royale et de son peuple.
Critique : Le succès de Conan le Barbare avec Arnold Schwarzenegger est colossal en 1982 et impose l’heroic fantasy comme le genre définitif pour ce début de décennies.
A peine l’épopée de John Milius arrivée sur les écrans italiens en mars 1982, que les producteurs locaux s’affairent à multiplier les ersatz. C’est ainsi que Gunan le guerrier de Francesco Prosperi naît dans la précipitation, avec dans le rôle du barbare principal Pietro Torrisi, sous le pseudo anglophone de Peter Mc Coy.
Dans la course à la concurrence, l’avatar éhonté de Prosperi devance miraculeusement d’un mois la sortie d’Ator l’invincible de Joe d’Amato, qui sévissait sous le pseudo de David Hills, nanar du maître improvisé sur l’autel de l’opportunisme avec Miles O’Keefe, Sabrina Siani et sa muse, Laura Gemser dans les rôles principaux.
Alors que les Américains eux-mêmes exploitent ces épopées héroïques en terres de flammes et de magie noire (Dar l’invincible de Don Coscarelli ; L’épée sauvage d’Albert Pyun), une suite à Gunan le guerrier apparaît en Italie, deux mois après la sortie du premier opus. Il s’agit de Sangraal, la spada di fuoco de Michele-Massimo Tarantini (travesti pour l’occasion en pseudo Michael E. Lemick). Pietro Torrisi est bien de retour, mais cette fois-ci, il incarne Sangraal, l’engeance du souverain glorieux Ator, décimé avec son peuple. Le bellâtre inexpressif part en quête d’une terre avec sa bien-aimée, Lena, et d’autres fidèles, fascinés par sa musculature virile.
L’épée sauvage, réedition VHS chez Antares Vidéo. D’après le visuel de © 1982 Group One Films / Illustrateur : Peter Andrew Jones. Tous droits réservés.
Il ne faut pas compter sur le réalisateur d’A nous les lycéennes, La prof du bahut, La prof connaît la musique et La flic chez les poulets pour livrer une œuvre rocambolesque. Habitué des tournages en série où la direction d’acteur n’est pas une option, Michele-Massimo Tarantini filme plat et enchaîne les saynètes de combat où les décors de poussières et de grottes ainsi que les fourrures pelucheuses servent de couleur locale inhérente au genre. Les effets spéciaux sont peu nombreux et le fantastique, à base de sorcellerie et de créatures aveugles, démontrent l’impossibilité de mettre en place un quelconque scénario en si peu de temps de préproduction. L’improvisation est le mot d’ordre.
Design © Enzo Sciotti
Dans le néant, avec son générique sentencieux dans sa narration et ses chœurs sombres, le film déroule une intrigue qui a au moins le charme du doublage ringard et de l’inattendu (l’introduction d’un personnage asiatique, joué par le jeune Hal Yamanouchi, sous le pseudo Al Huang) pour nous faire esquisser quelques sourires. La musique épique de Franco Campanino pare les images d’un atout évident. Le musicien collaborera à nouveau avec Tarantini deux ans plus tard sur le plus nanardesque Prisonnières de la vallée des dinosaures qui sortira dans la honte en Italie en 1985. La fin d’une époque où le concept de long métrage n’avait plus aucun sens, car tué par la télévision et l’exploitation au rabais de catalogues désormais limités à la vidéocassette.
Jaquette vidéo de Sangraal. Illutsrateur © Enzo Sciotti.
Sangraal est sorti en France tardivement, en avril 1985, soit deux ans et demi après sa sortie italienne (Sangraal, la spada di fuoco, novembre 1982). Entre temps, le film est passé par de nombreux marchés européens comme l’Allemagne, le Portugal ou l’Espagne, et même par les Etats-Unis.
Les Français doivent sa sortie au gourou de Metropolitan FilmExport, le regretté Samuel Hadida, qui, dans ses nombreux achats de films bis, comptait énormément sur la province pour marchander des fonds de catalogues qu’il vendait à travers des affiches toujours explosives.
Jaquette de L’épée de feu (Le retour du barbare au cinéma) – Editée par Delta Vidéo. Droits Réservés.
A Paris, ce sont deux cinémas de quartier, le Gaîté Boulevard et le Gaîté Rochechouart qui programment son rejeton, pour un total de 5 851 spectateurs. En 2e semaine, l’italo-fantasy trouve refuge dans un autre cinéma populaire, le Paris Ciné, et génère 1 288 entrées supplémentaires. Le film proposé à une époque où la mode est presque déjà passée (Conan le destructeur est sorti en 1984), endort au final 7 139 spectateurs sur la capitale, avant de partir sévir en province où ses chiffres sont inconnus.
Canal Vidéo proposera le métrage en vidéocassette, mais il est important de ne pas la confondre avec la VHS de L’Epée de feu (Delta Vidéo) de Francesco Prosperi. Malgré la présence commune de Pietro Torrisi et Sabrina Siani, il ne s’agissait pas du même film. Ce dernier cachait en fait le troisième épisode de la trilogie (non-officielle) initiée par Gunan le guerrier/Gunan il guerriero. Au cinéma, L’Epée de feu avait été exploité sous le titre du Retour du barbare, et en Italie sous l’appellation d’Il Trono di Fuoco.
Affiche cinéma originale de Sangraal Illutsrateur © Enzo Sciotti. Distributeur : Metropolitan FilmExport.
Michele Massimo Tarantini, Hal Yamanouchi, Mario Novelli, Pietro Torrisi, Sabrina Siani