Fausse suite de Dernier train pour Busan, Peninsula est un ratage spectaculaire tenant de la bouillie cinématographique à cause d’un script inepte et de CGI abominables.
Synopsis : Quatre ans après Dernier train pour Busan, il ne reste que des zombies dans la péninsule. Un groupe de soldats forcés d’y retourner découvrent que des survivants non contaminés se sont regroupés dans une bande bien plus dangereuse que les zombies…
Peninsula est centré sur l’action badass
Critique : En 2016, le réalisateur spécialisé dans l’animation Yeon Sang-ho passe pour la première fois au long-métrage live avec le film d’infectés Dernier train pour Busan. Si le long-métrage divise notre rédaction, l’auteur de ces lignes fait partie des défenseurs de ce film à l’imparable efficacité. Véritable triomphe en Corée du Sud et acheté dans le monde entier, Dernier train pour Busan est un tel succès que le réalisateur enclenche immédiatement la réalisation d’un préquel animé nommé Seoul Station (2016). Si le dessin animé souffre d’une animation parfois un peu bâclée, l’ensemble constitue une parfaite entrée en matière dans cet univers où une infection transforme la population en zombies très véloces.
Autant dire que l’annonce de la mise en chantier d’une suite pouvait présager du meilleur comme du pire. Malheureusement, Peninsula fait clairement partie des sévères déceptions et s’inscrit même dans ce qui peut se produire de pire actuellement au cinéma. Certes, l’idée de ne reprendre aucun personnage des deux premiers volets n’est pas particulièrement choquante, mais Peninsula n’entretient finalement avec les films précédents que l’idée d’un pays entièrement contrôlé par des zombies affamés et rapides.
Une bouillie de CGI abominables
Fan de John Carpenter et George Miller, Yeon Sang-ho n’a pas cherché à tourner un film d’horreur qui serait effrayant, mais s’oriente ici vers le métrage d’action post-apocalyptique dans le style de New York 1997 ou Mad Max. De manière assez étonnante, il prend comme point de départ un pitch similaire à celui du Army of the Dead (2020) de Zack Snyder. Alors que la péninsule coréenne est entièrement dominée par des zombies, un groupe de réfugiés coréens est engagé par des Hongkongais pour effectuer un casse en plein territoire des infectés. Si l’idée n’est déjà pas bien fameuse en elle-même, Yeon Sang-ho a réussi l’exploit de faire nettement pire que Snyder, dont le métrage bourrin n’est déjà pas fameux.
Si les dix premières minutes font vaguement illusion avec une contamination fulgurante à l’intérieur d’un paquebot, Peninsula se vautre assez rapidement dans la médiocrité dès qu’il aborde le fameux territoire des morts. Défiguré par un trop-plein de CGI qui donnent aux décors un aspect totalement factice, Peninsula offre un panel de personnages tous plus stéréotypés les uns que les autres. Si la nuance est rarement l’une des qualités du cinéma sud-coréen, ici le réalisateur dépasse toutes les bornes et enchaîne les mauvais choix narratifs. Tous les acteurs grimacent de manière grossière, incarnant des clichés – les enfants malins, le vieux sage, le personnage rondouillard amusant, le beau gosse forcément héroïque et la nana badass. Pire, le cinéaste dépasse fréquemment les bornes de l’acceptable en reprenant tous les travers humoristiques et débiles d’un certain cinéma américain, sabordant ainsi ses scènes d’action.
Des personnages caricaturaux et des situations absurdes
Outre un intérêt très contestable d’un script en roue libre, Peninsula offre également ce qui se fait de pire en matière de CGI dégueulasse. Ainsi, les cascades en voiture en deviennent surréalistes au point que l’on songe à plusieurs reprises à Torque (Kahn, 2004), nanar ultime en matière d’action totalement folle. Dans Peninsula, les zombies se résument à des hordes de monstres que les héros dégomment comme des quilles à coups de voiture lancées à folle allure, au point d’en devenir illisible. Le long-métrage atteint même parfois le tréfonds avec un humour Z et des situations tellement mal écrites et grossières qu’elles ne peuvent que déclencher le rire ou la sidération devant tant de mauvais choix artistiques.
Ratage impressionnant, Peninsula n’a pas eu beaucoup de chance puisque le métrage devait être sélectionné au Festival de Cannes en 2020, mais l’édition a été annulée. Prévu pour une sortie en été 2020, le distributeur ARP Sélection a ensuite choisi la date du 21 octobre 2020. Après avoir hésité sur un report au mois de décembre, le distributeur a maintenu cette sortie et donc subi la fermeture des salles une semaine plus tard. Peninsula, dont les premiers échos spectateurs étaient globalement catastrophiques, a terminé sa carrière avec 148 000 infectés en une seule semaine d’exploitation. Depuis, le métrage est sorti en vidéo et VOD. Dire qu’on vous le déconseille fortement semble tomber sous le sens.
Critique de Virgile Dumez