Opération peur : la critique du film (1966)

Epouvante-horreur, Fantastique, Gothique | 1h25min
Note de la rédaction :
8/10
8
Opération peur en blu-ray chez ESC

  • Réalisateur : Mario Bava
  • Acteurs : Erika Blanc, Piero Lulli, Giacomo Rossi Stuart, Fabienne Dali, Giovanna Galletti
  • Date de sortie: 19 Août 1966
  • Nationalité : Italien
  • Titre original : Operazione paura
  • Titres alternatifs : Kill, Baby... Kill! (USA) / Curse of the Living Dead (USA, reprise) / Die toten Augen des Dr. Dracula (Allemagne) / Curse of the Dead (UK) / Operación miedo (Espagne) / Operação Medo (Portugal) / Mata, bebé, mata (Mexique) / O Ciclo do Pavor (Brésil)
  • Année de production : 1966
  • Scénariste(s) : Mario Bava, Roberto Natale, Romano Migliorini d'après une histoire de Romano Migliorini, Roberto Natale
  • Directeur de la photographie : Antonio Rinaldi
  • Compositeur : Carlo Rustichelli
  • Société(s) de production : F.U.L. Films
  • Distributeur (1ère sortie) : Film inédit en France. La date ci-dessus est celle de la sortie à Rome.
  • Distributeur (reprise) : -
  • Date de reprise : -
  • Éditeur(s) vidéo : Neo Publishing (DVD, 2005) / ESC Editions (DVD / blu-ray)
  • Date de sortie vidéo : 3 juin 2020 (DVD / Blu-ray)
  • Box-office France / Paris-périphérie : -
  • Box-office nord-américain : -
  • Budget : 50 000 $ (environ 423 000 $ au cours ajusté en 2021)
  • Rentabilité : -
  • Classification : -
  • Formats : 1.85 : 1 / Couleurs / Son : Mono
  • Festivals et récompenses : -
  • Illustrateur / Création graphique : Dark Star (blu-ray)
  • Crédits : © 1966 International Media Films Inc.
Note des spectateurs :

Opération peur est un sommet du film gothique, porté par une mise en scène inspirée et des images de toute beauté. Le script, lui, est moins maîtrisé.

Synopsis : Quelle est la terrible malédiction qui pèse sur ce joli petit village ? C’est ce que doit découvrir le Dr. Eswai appelé à l’aide par l’inspecteur Kruger, impuissant devant une vague de mort frappant les villageois. Aidés par une sorcière, ils vont progressivement comprendre que ces morts atroces sont intimement liées au décès d’une jeune enfant. Entre manipulation et vengeance d’outre-tombe, l’horrible vérité va éclater au grand jour…

Un joyau du cinéma gothique

Critique : Intronisé pape du cinéma gothique transalpin dès son premier film (Le masque du démon en 1960), Mario Bava a œuvré dans tous les genres en vogue dans les années 60, mais ses œuvres les plus marquantes sont toutes liées au film d’horreur. Ainsi, cet Opération peur (1966) est un exemple parfait du savoir-faire imparable de ce maître. Rien ne manque ici : vues plongeantes sur un cimetière embrumé, cris insolites déchirant le silence nocturne, cryptes angoissantes, apparitions de fantômes revanchards, passages secrets et légendes rurales teintées de superstitions païennes sont les artifices déployés par un cinéaste inventif et visiblement amoureux du genre qu’il aborde avec respect et talent.

Opération peur, photo d'exploitation

© 1966 International Media Films Inc / © 2020 ESC Editions. Tous droits réservés.

A partir d’une intrigue basique qui tenait sur une trentaine de pages, Bava a été contraint d’écrire les séquences au fur et à mesure du tournage, souvent aidé de ses comédiens qui ont contribué à étoffer leurs rôles respectifs. En outre, cette toute petite production de la firme indépendante F.U.L. a subi la faillite de son pourvoyeur de fonds en cours de tournage. Le budget a donc chuté de manière drastique. Pourtant, Mario Bava a pu compter sur le soutien de ses acteurs et de son équipe qui ont accepté de terminer le film alors qu’ils savaient qu’ils ne seraient pas payés. Cette absence de moyens explique aussi pourquoi la musique attribuée à Carlo Rustichelli n’est aucunement une création originale, mais bien un patchwork issu de thèmes venus d’autres films. Au total, le cinéaste n’a bénéficié que de 50 000 $ pour réaliser son long-métrage, soit trois fois moins que ses autres créations de la même époque.

L’esthétique au secours d’un script bancal

Pour compenser ces faiblesses, Mario Bava met en place un savant dispositif formel destiné à pallier les manques d’un scénario finalement assez peu développé. Doté de mouvements de caméras parfois époustouflants pour l’époque, ainsi que d’une superbe photographie, Opération peur rend clairement hommage aux films anglais de la firme Hammer, mais aussi aux inventions visuelles d’Alfred Hitchcock et notamment de Sueurs froides (1958). Il s’inspire également des créations picturales de M.C. Escher pour évoquer les dédales de demeures gothiques angoissantes. Enfin, signalons que le métrage bénéficie de nombreux décors naturels, alors que Bava avait l’habitude de tourner en studio. Il confère aux villages médiévaux de Calcata et Faleria, non loin de Rome, des allures sinistres, le tout magnifié par une sublime photographie.

Jouant constamment avec nos nerfs, Bava brouille les cartes en faisant se télescoper les temporalités à l’aide d’un montage particulièrement travaillé. Pris au piège comme le personnage principal, le spectateur enquêteur perd pied et plonge dans un univers proche de la folie. Ce délire permet au metteur en scène d’imprimer dans nos rétines des images très fortes comme cet homme prisonnier d’une gigantesque toile d’araignée. On se souvient également de l’apparition du fantôme de la fillette au ballon, dont l’allure inquiétante marque durablement. Pour la petite histoire, cette gamine est en réalité un petit garçon découvert par hasard par Mario Bava, après avoir passé en revue des centaines de fillettes qui ne faisaient pas l’affaire. Une fois maquillé et affublé d’une perruque blonde avec des nattes, le jeune Valerio Valeri fait non seulement illusion, mais dégage une inquiétante étrangeté qui distille un certain malaise.

Une interprétation inégale pour un film qui tient avant tout du trip visuel

Par contre, l’interprétation de Giacomo Rossi Stuart – père de Kim Rossi Stuart (Romanzo criminale) – est on ne peut plus banale et donne l’impression de regarder une simple série B. Moins abouti que son chef-d’œuvre Le corps et le fouet (1963), Opération peur manque quelque peu de profondeur et de sadisme. Là où le premier déployait l’arsenal traditionnel du film d’horreur au profit d’une histoire psychanalytique d’une belle perversité, celui-ci tourne un peu à vide. D’une très grande efficacité et esthétiquement irréprochable, ce délire sensoriel reste tout de même un excellent moyen de se flanquer une bonne frousse, tout en redécouvrant le talent d’un artisan alors au top niveau.

Dans le livret du DVD / Blu-ray édité par ESC Editions, Marc Toullec précise que le film serait sorti en Italie, mais en ne se maintenant que quatre jours à l’affiche, ce qui en fait donc un énorme échec. De quoi expliquer son absence dans les salles françaises. Il a ainsi fallu attendre les années 90 pour que Jean-Pierre Dionnet diffuse le long-métrage inédit dans le cadre de son Cinéma de quartier sur Canal+. Dans les années 2000, c’est feu l’éditeur Néo Publishing qui a sorti le film gothique en DVD, avant que ESC Editions ne prenne le relais plus récemment au sein de sa collection Mario Bava. Cette parution dispose d’une copie correcte, mais inégale en fonction des séquences, tandis que les suppléments sont quant à eux satisfaisants et éclairants.

Critique de Virgile Dumez

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Opération peur en blu-ray chez ESC

© 1966 International Media Films Inc / © 2020 ESC Editions – Conception graphique : Dark Star. Tous droits réservés.

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Bande-annonce de Opération peur (VO)

Epouvante-horreur, Fantastique, Gothique

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