My Fair Lady : la critique du film (1964)

Comédie musicale, drame, classique | 2h40min
Note de la rédaction :
9/10
9
Affiche de la reprise 2017 de My Fair Lady

  • Réalisateur : George Cukor
  • Acteurs : Audrey Hepburn, Rex Harrison, Stanley Holloway
  • Date de sortie: 23 Déc 1964
  • Nationalité : Américain
  • Distributeur :
  • Date de sortie de la dernière reprise :
  • Éditeur vidéo : Paramount Pictures, CBS Home Entertainment
  • Récompenses : Oscars : Meilleur film, Meilleur réalisateur, Meilleur acteur (Rex Harrison) ; Bafta : Meilleur acteur ; Golden Globes : Meilleur film de comédie, Meilleur réalisateur, Meilleur acteur
  • Box-office France / Paris : 3 298 882 entrées / 1 107 341 entrées
Note des spectateurs :

Cukor livre un bonbon délicat et doux, l’une de ces impeccables comédies musicales qui rendent heureux, tout simplement.

Synopsis : Un éminent professeur de phonétique rencontre en 1912, près de Covent Garden à Londres, une fort jolie petite marchande de fleurs. Il décide d’en faire une grande dame.

Cukor et les femmes

Critique : La célèbre comédie musicale, elle-même inspirée de Pygmalion, la pièce de George Bernard Shaw, bénéficie d’une réputation exceptionnelle et passe parfois pour le chef-d’œuvre de Cukor, même si Femmes, Indiscrétions ou Une étoile est née lui font une sérieuse concurrence. On le sait, le cinéaste n’est jamais meilleur que quand il célèbre une actrice, en vrai portraitiste de femmes : et, à son palmarès, de Garbo à Judy Garland, d’Ingrid Bergman à Marilyn Monroe, il ajoute avec My fair Lady Audrey Hepburn. Dire qu’elle illumine le film serait en dessous de la réalité : qu’importe si elle convainc moins en vendeuse de fleurs grossière qu’en dame stylée, le plaisir de la voir se transformer n’en est que plus vif. D’autant que cette faiblesse souligne le fait qu’Higgins, en la métamorphosant, ne réussit qu’à ôter une gangue pour révéler ce que nous savions déjà, l’impeccable classe de la comédienne. Mutine ou colérique, elle incarne le charme féminin, un subtil mélange de délicatesse et de force, exploité ici dans une série de variations réjouissantes. À ses côtés, Rex Harrison ne démérite pas en professeur-linguiste méprisant et aveugle aux sentiments.

Une comédie musicale totale

My fair lady jaquette blu-ray

Crédits : VCBS Home Entertainment – Paramount Pictures

Le film refuse tout réalisme : non content de sacrifier aux conventions du genre, il affiche ses décors comme autant d’artifices exhibés ; la fameuse course d’Ascot se contente de lignes abstraites à dominante blanches, les rues sont d’évidentes reconstitutions en studio. C’est que Cukor se moque d’aérer et de dissimuler l’origine théâtrale, il la clame au contraire, en une recréation d’un monde irréel, propice aux rêveries (Eliza peut ainsi se croire en présence du roi), un monde dans lequel les pauvres chantent et dansent comme les riches, un monde chatoyant où tout peut arriver. Quelque peu acide par moments, le film se moque gentiment des coutumes de la noblesse anglaise, de leur raideur, à laquelle s’oppose la joie de vivre du peuple ; à cet égard les chansons du père (With a Little Bit of Luck, Get me to the church on time) sont particulièrement savoureuses : apologie du plaisir, fût-il immoral, elles débordent de vitalité. En regard, certains des airs d’Higgins, bien qu’agréables, sonnent de manière plus conventionnelle.

La fin de la grande ère des studios hollywoodiens

My fair Lady incarne la grande forme hollywoodienne tardive, presque anachronique : divisé en deux parties séparées par un entracte musical, le film manie l’éclairage et la couleur opulentes, l’image est propre, soyeuse. Alors que la révolution se prépare, puisque Cléopâtre, régulièrement présenté comme la fin de la toute puissance des studios, date de l’année précédente, et que Bonnie and Clyde ou Le Lauréat sortiront en 1967, ce métrage est l’un des derniers feux d’un art qui se prépare à disparaître, tout de légèreté et de savoir-faire : un écran encore protégé de la crasse (Peckinpah a déjà commencé son entreprise de démolition géniale) et du doute. Cukor peut encore raconter une histoire à la fin prévisible, il peut encore faire croire qu’il y a un sens et rassurer son public, au prix d’une pointe de mièvrerie et d’un décalage temporel. Mais d’une certaine manière, My fair Lady signe aussi la fin de sa carrière, puisqu’il ne fera plus que quatre films pour le cinéma, plutôt décevants. Alors, revoir aujourd’hui cette comédie vivace, enlevée, pimpante, stylisée, c’est se replonger dans un bain d’innocence délicieuse. On peut sourire ou s’émouvoir, fredonner sans s’en rendre compte des refrains faits pour marquer, ils sont faits pour ça.

Inutile de résister, le charme est là, et les presque trois heures de ce film cossu passent sans que jamais rien ne pèse. Un pur bonheur.

Disponible en édition blu-ray prestige deux disques chez Paramount Pictures.

Critique : François Bonini

 

Affiche de la reprise 2017 de My Fair Lady

Crédits : CBS Home Entertainment / Park Circus

 

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