James Wan livre avec Malignant un film complètement barré qui déclenche le rire au lieu des frissons attendus. Attention, il s’agit d’un pur nanar, assez sympathique grâce à une dernière demi-heure délirante.
Synopsis : La vie de Madison Mitchell est perturbée lorsque de terribles visions viennent la hanter. Quelle est cette créature malveillante qui la poursuit et commet ces meurtres atroces ?
Retour à l’horreur pour James Wan
Critique : Si James Wan n’a jamais vraiment abandonné l’univers du film d’horreur, il a ressenti ces dernières années l’envie d’explorer d’autres horizons comme le film d’action (Fast and Furious 7) et le film de super-héros avec le très bis Aquaman (2018), dont il tourne d’ailleurs actuellement la suite. Aussi l’annonce de la sortie de Malignant (2021) a eu de quoi intriguer, d’autant que la bande-annonce apparue depuis quelques semaines est d’une redoutable efficacité. Même si nous n’avons pas du tout été convaincus par son précédent effort dans le domaine de l’horreur avec l’insipide Conjuring 2 : Le Cas Enfield (2016), nous sommes toujours ravis de découvrir ses travaux, d’autant que le réalisateur a toujours fait montre de maestria dans sa réalisation.
D’ailleurs, Malignant commence plutôt bien avec une entame tonitruante où la caméra du bonhomme s’infiltre partout où elle le peut, arpentant sols et plafonds avec dextérité. Le générique rend ensuite clairement hommage aux films de serial-killers post-Seven, avec une musique induse qui semble directement issue de la franchise Saw. Là encore, nous sommes preneurs de ce type d’ambiances, même si cela sent le réchauffé. Nous faisons alors connaissance avec le personnage féminin principal, incarné par Annabelle Wallis, dont le jeu sera alternativement bon et médiocre en fonction des situations. Là, James Wan semble faire un appel du pied au mouvement #MeToo en évoquant le cas d’une femme battue. Toutefois, cette dimension du script ne débouche sur rien de véritablement intéressant.
© 2021 Warner Bros. Entertainment Inc. / Photographie : Matt Kennedy. Tous droits réservés.
Une première heure répétitive dans ses effets
Effectivement, très rapidement, James Wan se désintéresse de ses personnages – tous des enveloppes vides et lisses, défaut récurrent de bon nombre de ses films – et préfère faire joujou avec le spectateur en multipliant à l’envi les scènes d’angoisse, comme dans ses grandes réussites des années 2000. Sauf que la sauce ne prend pas vraiment ici, la faute à un procédé qui devient trop systématique. Le réalisateur adore filmer une pièce sombre, plongée dans le silence, et faire ensuite sursauter à l’aide d’un élément incongru. Cela est efficace au premier coup, mais devient lassant à la dixième scène identique. On se dit alors que James Wan bégaie et qu’il est incapable de renouveler son approche de l’horreur.
Durant la première heure, Malignant aligne donc les scènes de frousse pas franchement réussies, le tout au service d’une intrigue volontairement alambiquée pour éviter de dévoiler un twist qui arrivera bien plus tard. Durant cette première grosse partie, le cinéaste réussit quelques belles scènes grâce à sa virtuosité technique – on aime les changements d’environnement autour de l’héroïne par la grâce du morphing numérique. Malheureusement, le réalisateur est capable de prendre des décisions malheureuses, comme l’emploi d’une musique parfois en décalage avec les images, et quelques notations humoristiques déplacées (que nous appellerons l’effet Insidious). Mais le pire vient d’acteurs pas toujours charismatiques, la palme revenant à George Young, dont le personnage de flic est totalement transparent à l’écran.
Une dernière demi-heure grotesque et en roue libre
Au bout d’un moment, l’ennui commence à pointer le bout de son museau et James Wan finit par dégoupiller le fameux twist qu’il cherchait tant à dissimuler. Si l’idée est plutôt originale, elle n’est pas pleinement convaincante, d’autant qu’elle est ruinée par les décisions artistiques prises par le cinéaste qui se lâche totalement dans la dernière demi-heure du film. Certes, Malignant possédait déjà des touches esthétiques qui rattachaient le métrage au cinéma bis européen des années 70, mais la dernière demi-heure confirme grandement cet attachement du metteur en scène à un cinéma déviant complètement fou.
Cela démarre en fanfare par une scène déjà culte se situant dans une cellule où des femmes sont détenues. La référence au sous-genre du WIP (Women in prison) est évidente. Alors que le métrage était jusque-là très sérieux, James Wan signe une scène totalement bis qui ne peut que déclencher l’hilarité générale. Toute la fin est à l’avenant, avec un boogeyman qui virevolte de manière particulièrement ridicule. La séquence entière dans le commissariat est à mourir de rire, tant le cinéaste multiplie les excès – dont quelques plans gore – et les sorties de route bis. Malignant part désormais en roue libre et finit par devenir sympathique, pour peu que l’on aime un cinéma totalement foutraque. Ceux qui venaient chercher l’effroi en seront pour leurs frais puisque le film ne fait jamais froid dans le dos, si ce n’est par la capacité du cinéaste à se tirer une balle dans le pied.
© 2021 Warner Bros. Entertainment Inc. / Photographie : Matt Kennedy. Tous droits réservés.
Un nanar finalement sympathique par ses excès
Malignant devait initialement sortir aux États-Unis au mois d’août, mais la crise de la Covid a retardé son exploitation au point que la France a eu la primeur d’une sortie mondiale. La publicité n’a pourtant pas été imposante et le film n’a guère été montré à la presse. Sans doute car le studio et les distributeurs n’avaient pas confiance dans leur produit. Il s’agit en effet d’un sacré nanar qui finit par être sympathique malgré tout. Vous voilà prévenus !
Critique de Virgile Dumez
Les sorties de la semaine du 1er septembre 2021
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