Les trois frères, le retour : la critique du film (2014)

Comédie | 1h41min
Note de la rédaction :
5/10
5
Les trois frères, le retour en poster

Note des spectateurs :

En 2014, Les trois frères, le retour marquait le reformation du plus grand trio de comique français des années 90. Un anachronisme qui a tourné à la mauvaise blague.

Synopsis : Ils sont trois,
Ils sont frères,
Ils sont de retour.
15 ans après, Didier, Bernard et Pascal sont enfin réunis… par leur mère…
Cette fois sera peut-être la bonne.

La déception commerciale d’un retour tant attendu

Critique : Avec 2.239.000 entrées, le retour de la plus grande formation comique des années 90, Les Inconnus, n’a pas été le carton attendu alors qu’il s’agissait d’un coup de marketing énorme de ceux, générationnels, propices aux prime times, aux émissions populaires du dimanche après-midi, aux promotions monstres. Certes, le budget n’était pas des plus élevés, mais le sequel pouvait espérer un minimum de 4 millions d’entrées. Après tout, le retour grabataire du Splendid, dix ans plus tôt avec Les Bronzés 3 n’avait-il pas été célébré par plus de 10 millions de spectateurs ? La Vérité si je mens 3! (2012), aussi nulle qu’était cette suite, n’avait-elle pas carburé à 4.6 millions d’entrées, tout en se situant en-deçà des attentes de ses producteurs ?

Les 3 frères le retour : Bourdon, Legitimus et Bernard Campan

© Pan Européenne – Photo : Pamela Duhesme

Coup de vieux sur Les trois frères, le retour

Bref, que s’est-il passé pour les Inconnus ? Le prix à payer pour passer après Les bronzés et La vérité si je mens 3 qui ont déçu tout le monde ? Probablement. Une presse généralement hostile ? Oui mais cela n’a pas empêché de vrais navetons de la comédie de faire bien plus, au-delà même des 5 000 000 d’entrées.

Les Inconnus apparaissaient-ils comme des comiques d’une génération 1.0 dépassés par les exigences des jeunes de l’époque ? Ils ont pourtant su s’infiltrer dans la promo virale à la mode, aux côtés de petits jeunes comme Norman, de “Norman fait des vidéos”… Mais le public lui préféré Babysitting, sorti deux mois plus tard. Mais d’un autre côté, n’omettons pas les 11 millions d’entrées de Qu’est-ce qu’on a fait au Bon Dieu, la même année, qui a triomphé en devenant une comédie intergénérationnelle malgré une tête d’affiche vieillissante (Clavier réalisait un vrai come-back).

Retour sur la gloire de nos héros passés

On dira alors que le retour des Inconnus était peut-être trop attendu pour déplacer les foules qui lui ont préféré la sortie vidéo et surtout la diffusion télévisée. Dans tous les cas, cet avatar d’un humour déguisé d’un autre temps, entre suite et remake de l’original (1995), est certes un peu sclérosé dans sa réalisation, mais distille un charme nostalgique indéniable. On a plutôt souri devant les trois pépères, faute d’être ressorti avec la patate comme ils nous l’avaient mise lorsqu’il étaient au sommet de leur gloire, donc à l’époque où l’on rembobinait la VHS.

Des spectacles épatants, des sketchs télé hilarants, des parodies musicales qui deviennent des tubes au top 50. Les Français les adorent, nous aussi. Au cinéma la comédie Le téléphone sonne toujours deux fois de Jean-Pierre Vergne, – ils étaient alors cinq -, pose les jalons, maladroitement, d’un humour parodique absurde… Le potentiel est là, on sourit déjà. Il faudra attendre fin 1995 et Les trois frères pour découvrir l’ampleur du phénomène. Les trois comiques convient la France à une suite de gags hilarants qui s’avère providentielle pour le cinéma français alors en fin de crise économique : plus de 6,5 millions de spectateurs, c’est le succès de l’année !

Les Trois frère le retour, Campan et Didier Bourdon

© Pan Européenne – Photo : Pamela Duhesme

Ils nous ont tant fait rire

La suite, on la connaît : La Pari (97) est drôle et fait encore marrer la France, L’extra-terrestre (99) est une série Z inénarrable, et Les Rois mages en 2001 partage, mais on y prend un certain plaisir coupable. Séparation, chacun fait son chemin. Légitimus ne connaîtra au cinéma qu’un succès relatif (Antilles sur Seine), Campan change de registre et revêt une belle image d’acteur dramatique (Se souvenir des belles choses) même si beaucoup ne se souviendront que des moins bonnes choses (Le cœur des hommes). Et Bourdon et sa personnalité énorme, désormais habitué à la réalisation, gaspille ses munitions avec Bambou et Madame Irma. 7 ans de Mariage sera son meilleur rejeton post-Inconnus, même s’il nous a agréablement surpris en 2019 dans Nicky Larson et le parfum de Cupidon.

Les trois frères, le retour est beau beauf

En 2014, dans le paysage défoncé de la comédie française où les grands noms populaires riment avec déception (Astérix, Dany Boon…), le come-back des Inconnus attendu par tous devait rimer avec qualité. Mais à ce niveau, Les Inconnus, le retour n’a pas pu satisfaire toutes les audiences et en particulier la plus bobo qui a trouvé ce film très beauf, beauf…

Il faut dire que la mise en place est paresseuse : les vingt premières minutes patinent, la mise en scène est sans parenté, la musique indigne d’une comédie contemporaine. Le personnage de loser campé par Bernard Campan semble un peu grotesque dès sa première apparition et vient immédiatement rafraîchir les ardeurs… Il semblerait que Les Inconnus soient restés figés dans l’époque populo des années 90, où ils étaient à peu près les seuls à nous faire rire en salle. Alors donc, surgit le dilemme : et si l’on n’avait soudainement plus du tout envie d’assister à cette réunion ventrue entre quinquagénaires en mal de médiatisation ? Tellement de comiques de leur époque n’ont jamais pu se relever.

Pascal Légitimus et Didier Bourdon dans Les Trois Frères, le retour

© Pan Européenne – Photo : Pamela Duhesme

Ringard or not ringard ? That was the question

Finalement nous serons tentés par le pas tant que ça… Aussi bedonnants et dégarnis soient-ils, les trois gaillards, niais pour l’un, grincheux pour l’autre, et “banania” pour celui du milieu, ont toujours l’invective facile. Dans un film porté sur le gag social, et l’envie de se moquer du système et des come-back foutage-de-gueule de fausses gloires sur les plateaux de téléréalité, Campan, Bourdon et Légitimus sont là pour raviver la flamme avec un public à qui ils manquent et qui semble leur manquer aussi beaucoup. Moins ringards qu’ils n’y paraissent, dans Les trois frères, le retour, ils s’amusent de la nouvelle génération et de la logorrhée caillera, abusent du verlan, abattent un matraquage anti-bourgeois et s’adonnent volontiers à l’alignement de sketchs percutants, avec cette tendance hilarante aux travestissements. C’est souvent drôle, pas forcément percutant, mais on y trouve encore du plaisir.

Dans le refus du jeunisme et de l’adaptation complaisante aux tendances pour servir un clientélisme en pleine mouvance, Les Inconnus vieillissent en proposant ce qu’ils savent faire de mieux, dégainer leur panoplie d’espiègleries, sardoniques sans être franchement méchants. Ils jouent aux crétins sans être idiots. En 2014, ils avaient quoi qu’il en soit  encore une certaine pertinence, tout en étant conscients qu’ils n’étaient plus essentiels à un paysage cinématographique qui avait bien plus évolué que leur humour.

Les Visiteurs, la Révolution fera pire

Comme le proverbe le dit si bien, ce n’est pas à un vieux singe qu’on apprend à faire des grimaces. Les Inconnus ont compris depuis longtemps que la légitimité de cette réunion familiale devait être dictée par le seul désir de se marrer entre eux, et non par celui de satisfaire les envies commerciales de leurs producteurs. Cette reformation a su rester un “One men show”, car si la nostalgie bienveillante aide à l’indulgence, l’omniprésence et une troisième suite auraient pu nuire à la patience.

En 2016, Christian Clavier et Jean-Marie Poiré seront aux commandes des Visiteurs, la Révolution, un authentique nanar qui tuera le revival des grosses comédies des années 90. La production fera à peu près le même nombre d’entrées, sauf que cette fois-ci, le budget atteignait les 25 millions d’euros. La messe était dite.

Frédéric Mignard

Les sorties de la semaine du 12 février 2014

Les trois frères, le retour en poster

© Pan Européenne

Les affiches de RYSK

Box-office :

Flop malgré un budget raisonnable, Les trois frères, le retour est passé de 1 123 863 spectateurs en première semaine, pendant les vacances d’hiver 2014, et à 70 259  entrées en 5e semaine. En 8e semaine, l’événement médiatique était mort, avec 588 spectateurs dans 20 salles.

Rares sont les déconvenues aussi importantes à cette hauteur. Le sequel des Trois frères, qui avait atteint les 6 671 066 entrées en 1995-96, doublera à peine ses entrées de première semaine, avec au final 2 289 408 spectateurs, malgré une confortable combinaison de 701 écrans.

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