Le retour de la panthère rose initie le cycle des années 70 par une folie burlesque qui emporte tout sur son passage. Cette tornade comique s’appelle Peter Sellers.
Synopsis : La Panthère rose, c’est le plus gros diamant du monde volé par un mystérieux personnage vêtu de noir. L’inspecteur Clouseau est à nouveau sur les dents.
Critique : Au milieu des années 70, le cinéaste Blake Edwards et l’acteur Peter Sellers traversent tous les deux une phase délicate, marquée notamment par un certain nombre d’échecs commerciaux. De quoi motiver le retour de l’inspecteur Clouseau dans la première vraie suite de La panthère rose (1963) tourné plus de dix ans auparavant. Effectivement, rappelons que le deuxième volet intitulé Quand l’inspecteur s’emmêle (1964) était en réalité l’adaptation d’une pièce de théâtre dans laquelle Blake Edwards avait glissé le personnage de Clouseau au dernier moment. Donc, Le retour de la panthère rose (1975), bien que considéré aujourd’hui comme le troisième volet de la saga, prend bien la suite directe du premier épisode, auquel il fait d’ailleurs référence.
© 1975 United Artists Corporation / © Universal Pictures France. Tous droits réservés.
D’ailleurs, le réalisateur était dans une telle impasse à cette époque qu’il a été contraint de trouver un investisseur britannique du nom de Lew Grade pour pouvoir financer ce nouvel épisode. La firme United Artists s’est effectivement contentée des droits de distribution cinéma par peur d’un flop. Autre élément qui montre le peu d’intérêt des artistes pour cette série, l’acteur David Niven n’a pas fait beaucoup d’effort pour reprendre son rôle de Charles Litton qu’il abandonne ici à Christopher Plummer. Certes, l’acteur britannique avait alors un planning chargé, mais il n’avait surtout pas vraiment envie de reprendre un rôle qu’il trouvait trop en retrait par rapport à celui de Peter Sellers.
Rien ne pouvait préparer les spectateurs à la bourrasque burlesque qui allait s’abattre sur ce troisième volet qui fait partie des meilleurs de la saga. Alors que Blake Edwards parodie de manière évidente le film Topkapi (Dassin, 1964) dont il reprend le cadre exotique, il a l’intelligence de laisser le comique Peter Sellers improviser.
Cela donne lieu à des séquences complètement délirantes où l’inspecteur gaffeur détruit consciencieusement l’intégralité du mobilier d’un bureau, sans même s’en rendre compte (scènes qui ont servi de modèle aux ZAZ pour Y a-t-il un flic pour sauver la reine ?). Totalement incapable d’interagir avec son environnement immédiat, Clouseau est une arme de destruction massive qui s’ignore.
Perpétuant la meilleure tradition burlesque, Peter Sellers apporte l’anarchie partout où il se rend, alors qu’il est censé représenter l’ordre en tant que fonctionnaire de police. Là où il passe, le mobilier trépasse, ainsi que l’ordre bourgeois. Le tout est magnifié par un acteur au meilleur de sa forme. D’une belle agilité, Peter Sellers investit le rôle avec un tel premier degré qu’il en devient hilarant. Cette tornade comique emporte tout sur son passage, à tel point que le film souffre inévitablement de passages à vide quand il n’est pas à l’écran.
Heureusement, Blake Edwards a compensé ces nécessaires respirations par la présence assez délirante d’Herbert Lom en commissaire Dreyfus qui devient complètement fou en cours de film. Face à Peter Sellers, la jolie Catherine Schell a eu tellement de mal à garder son sérieux que Blake Edwards a fini par garder ses sourires complices à l’écran.
Dire que l’on se contrefiche comme d’une guigne de l’histoire racontée est un euphémisme. On préfère se souvenir de plusieurs séquences culte comme les affrontements entre Clouseau et son serviteur asiatique Cato, la destruction du bureau mentionnée plus haut, ou encore la scène d’un quart d’heure se déroulant dans la chambre d’hôtel de miss Litton. Autant de passages gagnés par la folie d’un acteur furieux, filmés consciencieusement par un réalisateur en pleine possession de ses moyens.
Alors que la France est encore une fois restée insensible à cette proposition comique avec seulement 262 907 entrées sur tout le territoire, les Etats-Unis ont fait un véritable triomphe à cette suite que personne n’attendait. Sorti d’abord dans une petite combinaison de salles, l’excellence des chiffres a poussé le distributeur à élargir la diffusion du film au point de cumuler la somme de 41,8 millions de dollars de recettes pour un budget initial de 5 millions. Après un tel succès, il était certain de retrouver rapidement une nouvelle suite sur les écrans, ce qui arriva dès l’année suivante avec Quand la panthère rose s’emmêle.
Critique de Virgile Dumez
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