S’inscrivant dans la droite ligne de L’homme tranquille de Ford, Le grand McLintock n’en possède ni le charme, ni la finesse. La comédie de l’Ouest se révèle souvent indigeste, pour ne pas dire profondément ennuyeuse.
Synopsis : George Washington McLintock, propriétaire du plus grand ranch de la région, est riche, respecté et craint par tout le monde sauf par sa femme Katherine qui revient après deux ans d’absence pour demander le divorce et obtenir la garde de leur fille Rebecca. Mais aucun des deux n’entend capituler au profit de l’autre.
Critique : Lorsque John Wayne initie ce nouveau projet, il l’envisage comme un western familial, dans tous les sens du terme. Non seulement il souhaite que l’ensemble soit pétillant et inoffensif, mais il veut également être entouré de collaborateurs fidèles et de proches. Ainsi, on retrouve son fils Patrick Wayne dans un rôle important, ainsi que sa fille Aissa Wayne dans une apparition. Il comptait initialement confier la réalisation à un cinéaste plus expérimenté (on parle d’Henry Hathaway), mais opte finalement pour Andrew V. McLaglen, fils de l’acteur fordien Victor McLaglen. Choix pas forcément judicieux puisque le réalisateur n’a jamais su se détacher de l’écrasante influence de Ford – qui aurait d’ailleurs tourné quelques plans de ce McLintock pour dépanner.
Le Grand McLintock en DVD et Blu-ray en France © 1963 Barjac Productions, Inc.
Si certains évoquent l’influence de La mégère apprivoisée de Shakespeare, les cinéphiles y verront plutôt un démarquage flagrant de L’homme tranquille. La volonté du Duke semble donc d’avoir voulu faire une suite non officielle à cette œuvre considérée par beaucoup comme un chef d’œuvre. Malheureusement, tout ce qui faisait le charme et la finesse de ce coup de maître de John Ford s’est évaporé sous la houlette du médiocre Mc Laglen. Le script de James Edward Grant ne devait déjà pas être fameux – on cherche en vain un début d’intrigue durant les deux longues heures de projection – mais le cinéaste se révèle incapable de faire passer l’humour et l’espièglerie qu’il devait contenir à l’origine. En lieu et place, on doit assister à un duel insipide entre John Wayne et la sublime Maureen O’Hara, dont il s’agit de l’un des derniers grands rôles, sans que cela n’éveille le moindre intérêt. Tout juste peut-on sauver la fameuse séquence de bagarre dans la boue, plutôt amusante, ainsi que l’ultime scène qui voit Wayne administrer une formidable fessée à sa dulcinée. Deux scènes qui ont du mal à compenser le nombre conséquent de gags qui tombent à l’eau.
À cela, il faut ajouter un discours réactionnaire typique de Big John durant les années 60. La femme doit respecter l’homme, modèle de virilité. Si les Indiens sont présentés comme inoffensifs, ils sont également décrits comme des alcooliques un peu stupides. Un traitement similaire est appliqué au personnage asiatique. Pas de quoi être très indulgent envers ce western comique pas vraiment drôle et surtout profondément ennuyeux.
Critique de Virgile Dumez
Avec 14 500 000$ au box-office américain, Le grand McLintock a été un petit succès pour Les Artistes Associés qui a distribué le film le 13 novembre 1963. John Wayne rebondissait après la petite déception de La Taverne de l’Irlandais de John Ford, qui n’avait pas dépassé les 6.7M$. McLintock! se permettait même de dépasser les recettes récentes d’Hatari! (12.9M$, 1962). Pour Maureen O’Hara qui sortait du très gros succès américain de La fiancée du papa (25M$ en 1961), il s’agira de son ultime gros film, la comédienne décidant de prendre sa retraite peu après.
En France, Le grand McLintock achèvera sa carrière à 1 676 794 entrées. Il s’agira de l’un des 15 films de John Wayne à avoir franchi le million d’entrées sur l’Hexagone dans les années 60. Certes, l’acteur est loin des 3 600 000 entrées de La conquête de l’Ouest (1962), de Rio Bravo (1959) et de L’homme tranquille (1952), mais le résultat est perçu positivement par le distributeur.
McLintock!, apprécié par les fans de John Wayne, connaîtra de très nombreuses éditions vidéo en France et même un blu-ray en 2014 chez Sidonis.
© 1963 Barjac Productions, Inc. Affiche : Mascii
Vingt petites minutes partagées entre Patrick Brion et Yves Boisset qui reviennent tous les deux sur le long-métrage. Le premier nous apporte son lot d’anecdotes croustillantes, tout en prouvant que John Ford a bien tourné quelques plans du film. On le sent par contre plus dubitatif quant au résultat final. Yves Boisset, par contre, tente de défendre une œuvre qu’il trouve fort sympathique. On n’est pas forcément d’accord avec lui lorsqu’il évoque un film antiraciste, tant le ton employé dans le métrage pour décrire les Indiens est teinté de condescendance. Enfin, on termine ce petit tour par quelques photos et affiches.
Tombé depuis longtemps dans le domaine public, le film a souvent été édité dans des conditions scandaleuses avec copies délavées et recadrées. Sidonis reprend les choses en main avec une copie au bon format et dotée d’une image parfaitement définie. Les couleurs sont resplendissantes et la luminosité parfaite. Peut-être manque-t-il un brin de netteté dans la définition. Défaut qui doit certainement disparaître sur la galette blu-ray.
Beaucoup de puristes attendaient la réédition du film afin de disposer enfin de la version française d’époque jusque-là indisponible. C’est chose faite, même si certains passages manquent à l’appel, ce qui entraîne l’intrusion de scènes en VO à l’intérieur du long-métrage. Ce désagrément mineur disparaît forcément en VOSTF, piste plus naturelle et plus ouverte dans son rendu des ambiances.
Test dvd de Virgile Dumez
Création graphique : Dark Star. Editeur : Sidonus Calysta. © 1963 Barjac Productions, Inc.
Andrew V. McLaglen,John Wayne, Edgar Buchanan, Patrick Wayne, Stefanie Powers, Perry Lopez, Maureen O’Hara