Film fantastique à la thématique classique, La main du cauchemar bénéficie d’un sous-texte assez intéressant, mais souffre de séquences horrifiques mal maîtrisées, à la lisière du ridicule. Michael Caine, lui, est plutôt bon.
Synopsis : Jon Lansdale est un dessinateur de bandes dessinées. Il perd sa main dans un accident de voiture. Celle-ci est introuvable, mais revient d’elle-même à son propriétaire, et va se débarrasser de toutes les personnes ayant faits du tort à Jon.
Deuxième film d’horreur pour le novice Oliver Stone
Critique : Au cours des années 70, le producteur américain Edward R. Pressman a permis l’éclosion de nombreux talents, dont les plus célèbres demeurent Brian De Palma et Terrence Malick. A l’orée des années 80, il soutient également le scénariste Oliver Stone qui vient de se faire connaître grâce au script de Midnight Express (Parker, 1978). Il lui propose notamment de réaliser un nouveau long-métrage sous l’égide d’Orion Pictures et du studio Warner. Effectivement, à cette époque, Oliver Stone n’a qu’une seule réalisation à son actif, le très indépendant Seizure, la reine du mal, tourné en 1974.
Oliver Stone se retrouve donc pour la première fois à la tête d’une production relativement cossue. Il s’agit d’une adaptation du roman de Marc Brandel intitulé The Lizard’s Tail, sorti à peine un an auparavant. On notera au passage que l’idée principale du livre est très largement reprise des Mains d’Orlac, roman policier de Maurice Renard publié en 1920 et qu’il s’inspire plus ou moins directement du film La Bête aux cinq doigts (Florey, 1946). Autant dire qu’il ne faut pas chercher la moindre originalité dans ce long-métrage qui ne fait que recycler un thème fantastique habituel.
La main qui tue…
Suivant un principe bien connu des amateurs de récit fantastique, l’auteur s’attache à décrire le lent basculement vers la folie d’un dessinateur de BD qui perd sa main droite lors d’un accident de voiture provoqué par sa femme. Désormais amputé de son outil de travail – émasculé de manière purement symbolique – l’homme qui est interprété par un Michael Caine charismatique va peu à peu se laisser dominer par ses pulsions destructrices. Alors qu’il ne peut plus exorciser ses démons intérieurs dans son art (les planches de BD réalisées par Barry Windsor-Smith nous montrent un héros bodybuildé à forte dose de testostérone), Jonathan Lansdale va faire resurgir son ça intérieur à travers la matérialisation de sa main amputée. Celle-ci va ainsi servir d’exutoire et surtout d’exécuteur des basses œuvres d’un homme en proie à la frustration.
Oliver Stone prend son temps au début pour décrire la relation tendue qui existe entre le personnage principal et sa femme désireuse de s’émanciper. C’est sans doute l’aspect le plus intéressant d’un long-métrage qui explore l’air de rien la déstabilisation du mâle en cette fin des années 70 où les revendications féministes ont pris du poids dans la société américaine. Le film orchestre donc à la fois une revanche illusoire des hommes sur les femmes, mais également la défaite de ce machisme d’un autre temps.
Des séquences choc parfois ridicules
Si la thématique développée par Oliver Stone est plutôt intéressante, elle souffre d’un traitement plus problématique du fantastique et de la dimension horrifique du projet. Alors que le réalisateur semble vouloir apporter un supplément d’âme à une histoire passablement classique, il se prend les pieds dans le tapis dès qu’il aborde les séquences choc attendues. Oliver Stone enfourche ses gros sabots en multipliant les meurtres, parfois inutiles, voire grotesques (celui du clochard interprété par Stone lui-même ne sert tout bonnement à rien). Quelques séquences font sourire (le chat hystérique qui traverse la vitre) et le final opposant Michael Caine et Viveca Lindfors sombre dans le ridicule par le cabotinage des comédiens.
Ajoutons enfin quelques erreurs de montage et de continuité (un orage terrible disparaît et réapparaît d’un plan à l’autre) et vous aurez une idée du gâchis opéré sur cette Main du cauchemar qui n’est pourtant pas désagréable à suivre, mais ne semble pas avoir été totalement maîtrisé par un cinéaste encore novice.
Une sortie directement en VHS en France
Malgré l’aspect alimentaire de sa participation, Michael Caine s’en sort plutôt bien (sauf lors du final, peu aidé par une coupe de cheveux improbable) et les autres acteurs sont au diapason. Ils sont pour beaucoup dans le vague intérêt qui tient éveillé le spectateur. On ne sera toutefois pas étonné de l’absence de sortie française au cinéma, au vu de son échec américain et du peu d’intérêt du long-métrage. En France, le film n’est connu que par sa sortie en VHS chez Warner Home Video au cours des années 80. Disparu de la circulation depuis, La main du cauchemar est donc une curiosité à découvrir surtout pour les fans hardcore d’Oliver Stone ou de Michael Caine.
Critique de Virgile Dumez