La loi de la jungle : la critique du film (2021)

Drame | 1h29min
Note de la rédaction :
6.5/10
6.5
La loi de la jungle, artwork VOD

  • Réalisateur : Max Winkler
  • Acteurs : Jessica Barden, Charlie Hunnam, Jack O’Connell, Jonathan Majors
  • Date de sortie: 25 Mar 2021
  • Année de production : 2019
  • Nationalité : Américain
  • Titre original : Jungleland
  • Titres alternatifs : -
  • Scénaristes : Theodore Bressman, David Branson Smith, Max Winkler
  • Directeur de la photographie : Damián García
  • Monteur : Tomas Vengris
  • Compositeur : Lorne Balfe
  • Producteurs : Jules Daly, Kevin J. Walsh, Ryan Stowell, Brad Feinstein, Ridley Scott (Producteur exécutif)
  • Sociétés de production : Romulus Entertainment, Scott Free Productions
  • Distributeur : Inédit en salle (France) / Paramount Pictures (USA)
  • Editeur vidéo : Paramount Studios (VOD)
  • Date de sortie vidéo : 11 mars 2021 (En achat digital), 25 mars 2021 (VOD)
  • Box-office France / Paris-Périphérie : Inédit
  • Box-office USA / Monde 3 688$ (USA)
  • Budget : Inconnu
  • Classification : Aucune classification officielle
  • Formats : Couleurs - Formats image et sonore originelle non spécifiés
  • Festivals et récompenses : Toronto International Film Festival 2019
  • Illustrateur / Création graphique : © B O N D (affiche américaine), illustrateur français non spécifié. Tous droits réservés - All rights reserved
  • Crédits : © 2019 Jungleland Productions LLC. All Rights Reserved.
Note des spectateurs :

La loi de la jungle explore des relations fraternelles dans leur retranchement. Avec Charlie Hunnam et Jack O’Connell, puissamment virils, le drame social et psychologique est vibrant.

Synopsis : Une terrible défaite sur le ring endette Lion (Jack O’Connell) et son manager et frère Stan (Charlie Hunnam) auprès du criminel local Pepper (Jonathan Majors). Ce dernier accepte d’annuler leur dette s’ils traversent le pays afin que Lion participe à un combat de boxe. Le seul hic, ils doivent également transporter Sky (Jessica Barden), une adolescente en fuite qui doit être déposée à la porte du redouté Yates (John Cullum). Tandis que Stan entraine Lion pour le combat de sa vie, une série d’évènements menace de déchirer les deux frères, mais leur amour fraternel et leur croyance en une vie meilleure les entrainent dans ce drame captivant.

Le déclin de l’empire américain

Critique : Le film de Max Winkler (fils de Henry -Fonzie- Winkler d‘Happy Days dans la vraie vie) n’a pas eu de chance. Présenté à Toronto en octobre, il devait faire sa tournée des festivals tout au long de l’année 2020 pour se bâtir une solide réputation sur le ring. La pandémie en aura décidé autrement et c’est donc logiquement en VOD que le film réunissant les charismatiques Charlie Hunnam et Jack O’Connell a fini par atterrir sur les différents marchés occidentaux.

Charlie Hunnam et Jack O'Conell dans dans La loi de la jungle

© 2019 Jungleland Productions LLC. Paramount Studios. All Rights Reserved.

Film de l’abandon des marginaux par une société américaine où l’on survit davantage que l’on ne vit, La loi de la jungle est d’abord le miroir d’une nation abîmée. Une terre des petits boulots, des sports violents comme gagne-pain, et d’une insupportable corruption qui outrage la femme comme réceptacle à son ignominie.

Le film n’est pas vraiment un divertissement sportif mais plutôt, dans la grande tradition des œuvres sociales, avec en trame de fond les sports de combat, une tragédie naturaliste qui nous plonge dans un état de dépression latente.

Frères de sang

La famille, sujet central de La loi de la Jungle, est déchue ou du moins à l’agonie. Anéanti, réduit à des bondieuseries insupportables, le placenta familial s’illustre à plusieurs niveaux. Le plus beau, le plus fort, vertueux dans sa force indescriptible, est le retranchement sur leur binôme des deux protagonistes principaux, deux frangins abîmés, dans une misère insupportable. Leur drame est autant social que psychologique. C’est celui du chacun pour soi érigé en doctrine nationale. Ces deux personnages sont renversants de beauté dans leurs rapports égratignés, leur personnalité à fleur de peau. Ils sont dès le départ dépeints comme puissamment physiques, mais ils savent que leur force est dépendante d’une jeunesse fuyante. Or la course contre la montre est déclenchée dans une société amorale où les dettes se paient au prix fort. L’aîné (Charlie Hunnam) est déjà passé du côté de l’avarie.

Jack O'Connell et Jessica Bardem dans La loi de la jungle

© 2019 Jungleland Productions LLC. Paramount Studios. All Rights Reserved.

Une femme dans le moteur

La violence intérieure est accentuée par l’arrivée du grain de sel qui va les conduire à l’ultime combat. Celui de la tragédie. De leur propre déchirure aussi, quant à l’interprétation à avoir du drame des autres. Y rester insensible ou tout risquer dans ce qu’il leur reste de concret dans leur existence fragile ? La dissension est proche, quand la confusion des sentiments manipulés vient mettre à mal leur interdépendance.

Contraints de transporter une marchandise humaine, une jeune femme taiseuse qui a bien des secrets à livrer, les deux hommes vont voir leur complicité se fissurer quant à l’issue dramatique que doit prendre ce road trip. La problématique autour de la livraison de l’encombrant paquet, interprété par la toujours déconnectée et formidablement triste Jessica Barden de The End of the F*** World, évoque l’impossibilité de voler de ses propres ailes, de casser le cocon familial qui sert de seul référent. De son côté, la famille de la jeune fille est éloquente quant à son aveuglement. Elle précipite le personnage de Barden dans un monde d’une cruauté totale pour l’irrationalité d’un culte qui lave plus blanc que blanc. Famille, je vous hais.

Jessica Barden dans La loi de la jungle

© 2019 Jungleland Productions LLC. Paramount Studios. All Rights Reserved.

Les trois personnages déracinés, voyageurs contraints de partager la même galère, expriment par leurs corps, leurs visages fatigués, l’autodestruction, le vagabondage, le besoin de fuite en avant et de se soustraire à la réalité dramatique qui les condamne à une forme de mort ou d’asservissement impitoyable.

La loi de la jungle, drame social et amniotique pour spectateurs adultes

Loin du minois lisse qu’il affichait chez Angelina Jolie dans l’académique Invincible, Jack O’Connell, que l’on voit déjà en fin de route physique grâce à l’excellence du maquillage, incarne ostentatoirement l’homme qui a pris cher. Sa virilité faillit à exalter la splendeur de son corps, gravant dans son expérience de vie la réalité douloureuse du hasard. Comment nait-on fortuné ou infortuné, dans tous les sens des deux adjectifs, puisque de chance comme d’argent, ils semblent tous les trois voués à ne pas en avoir ?

Charlie Hunnam et dans La loi de la jungle

© 2019 Jungleland Productions LLC. Paramount Studios. All Rights Reserved.

Avec une réalisation qui n’est pas de la race des seigneurs mais offre un beau grain et des plans tombant à point, La loi de la jungle distille par sa lenteur volontairement amniotique et hors de toute action, le spleen d’une Amérique décidément cinégénique mais inlassablement sordide. Le film est mâture et destiné à public qui attend davantage qu’une succession de combats sur un ring. Le récit et la mise en scène ont beaucoup d’atouts pour signifier des intentions sans se cantonner aux poings et aux armes. Tout cela finira par arriver et La loi de la jungle sait prendre son temps. N’en déplaise à un public plus adolescent qui aurait préféré du hip hop en bande originale plutôt qu’un titre rocailleux de Bruce Springsteen.

La loi de la jungle est donc à découvrir en étant avisé.

Frédéric Mignard

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