Pastiche habile des films d’Hitchcock, Faux témoin est un thriller malin et efficacement réalisé. La contribution d’Isabelle Huppert s’avère tout à fait satisfaisante.
Synopsis : Terry, un jeune homme beau et élégant, entretient une liaison avec Sylvia, la femme de son patron. Un soir, alors qu’elle se trouve chez son amant, Sylvia assiste à un meurtre depuis la fenêtre de l’immeuble. Elle est la seule à avoir vu le visage du coupable. Mais elle ne peut se résoudre à témoigner car elle mettrait son couple et sa réputation en danger. Terry donne une description à sa place et devient bientôt le suspect numéro 1. Il décide alors de mener l’enquête de son côté…
Un pur pastiche du cinéma d’Hitchcock
Critique : Librement adapté d’un roman d’Anne Holden, Faux témoin est le véritable bébé du cinéaste Curtis Hanson qui y voit enfin l’occasion de sortir de l’ornière de la série B, voire Z, dans laquelle il stagne depuis une grosse décennie. L’artisan rédige lui-même l’adaptation du roman qu’il envisage comme un pur pastiche d’Alfred Hitchcock. Grand admirateur du travail du maître du suspense, Hanson cherche à en retrouver la divine formule en signant une histoire originale, mais qui permettrait de citer en permanence les grands classiques du maître britannique. Après tout, Brian De Palma ne fait rien d’autre depuis plusieurs années et Curtis Hanson se dit qu’il est possible pour lui d’apporter sa pierre à l’édifice.
Là où De Palma est parvenu à développer une thématique personnelle liée notamment à la défiance nécessaire envers toute image filmée, Curtis Hanson se borne à reproduire des situations déjà vues ailleurs pour en livrer une version actualisée et donc modernisée. Rien de bien nouveau donc dans cette histoire de témoin d’une agression qui finira par se retrouver accusé à la place du meurtrier. On a déjà vu des centaines de fois, notamment chez Hitchcock, ces histoires de faux coupable accusé à tort. Toutefois, le long-métrage a l’intelligence de renouveler la situation en plaçant au centre du jeu une histoire d’adultère qui complique passablement la donne.
Une intrigue habilement troussée et bien servie par les acteurs
Adroitement tricotée, l’intrigue prend son temps pour entrelacer sa toile autour du personnage central, le naïf de service incarné avec un beau premier degré par Steve Guttenberg. Victime de son amour pour la belle Isabelle Huppert, le jeune homme se retrouve embarqué dans une aventure qui le dépasse et servira de révélateur de ses faiblesses, mais aussi de ses forces. Unique tentative de l’actrice française de percer à Hollywood, Faux témoin n’a finalement pas été le tremplin escompté pour Isabelle Huppert. Pourtant, elle n’a pas à rougir de sa prestation et son rôle de femme fatale ne dépareille absolument pas dans sa magnifique et exemplaire filmographie.
Elle est ici en concurrence avec Elizabeth McGovern qui compose la première victime, sauvée in extremis des griffes du tueur. Celle-ci est bien plus lisse – ce que nécessite le rôle – et surtout bien moins crédible lorsqu’elle doit aguicher les hommes dans un bar. Son look à l’ancienne, pour ne pas dire un peu vieillot, lui donne un sacré désavantage face à notre Isabelle nationale.
Une réalisation classieuse qui aurait mérité plus d’égards de la part du public
En ce qui concerne la réalisation, Curtis Hanson fait preuve d’une belle maîtrise, avec une caméra très fluide qui sait se faire intrusive lors des nombreuses séquences d’intérieur. L’efficacité est également de mise lors des scènes finales, plus trépidantes. Enfin, une certaine sensualité se dégage des quelques moments plus intimistes entre les personnages. Le tout est aidé par une jolie photographie de Gilbert Taylor (Répulsion, La guerre des étoiles, La malédiction, tout de même) et une bande-son typique des années 80 où se succèdent des titres FM bien pêchus (de Robert Palmer, Ava Cherry ou encore Stevie Ray Vaughan).
Agréable de bout en bout, Faux témoin n’a pourtant pas rencontré le succès initialement envisagé. En France, le long-métrage est même passé totalement inaperçu, au point de se faire doubler la semaine de sa sortie sur Paris par une reprise d’Opération tonnerre, un James Bond vieux de vingt ans. C’est dire l’ampleur du désastre commercial.
Critique du film : Virgile Dumez
Les sorties de la semaine du 6 mai 1987
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