Suite ratée d’un très bon thriller horrifique, Don’t Breathe 2 pâtit d’un scénario absurde et incohérent, ainsi que d’acteurs peu convaincants. Seule la réalisation marque quelques points.
Synopsis : Quelques années après l’effraction mortelle au domicile de Norman Nordstrom, ce dernier vit toujours dans la maison délabrée de Détroit mais cette fois avec une adolescente nommée Phoenix. Elle ne quitte jamais la propriété et maintient un régime strict de travail scolaire et de techniques rigoureuses d’autodéfense. Mais leur vie paisible bascule lorsqu’un groupe obscur de criminels débarque en force et kidnappe la jeune fille. Notre aveugle va alors devoir réveiller ses instincts les plus sombres pour espérer la sauver.
Une suite sans cesse repoussée par la pandémie mondiale
Critique : En 2016, les complices de longue date Fede Alvarez et Rodo Sayagues, respectivement réalisateur et scénariste, dégoupillent le thriller horrifique Don’t Breathe : la maison des ténèbres qui parvient à glaner près de 90 M$ de recettes sur le territoire nord-américain pour un budget minimal de 10 M$. En France, ils furent 320 358 spectateurs à faire le déplacement en salles malgré une lourde interdiction aux moins de 16 ans.
Aussitôt les premiers chiffres tombés, les deux compères ont opté pour l’écriture d’une suite. Le scénario a été finalisé en 2018, mais des contre-temps ont poussé Fede Alvarez vers la sortie, tandis que son complice Rodo Sayagues est resté seul à la barre du projet. Comme le film précédent qui se situait en principe à Detroit, mais qui a été tourné en Hongrie, Don’t Breathe 2 a été cette fois mis en boite en Bulgarie, ce qui a permis de ne pas dépasser le budget serré de 10 M$. Toutefois, le tournage a été maintes fois repoussé à cause de la pandémie de la Covid-19.
Don’t Breathe 2 pousse la suspension d’incrédulité trop loin
Réalisé entre les mois d’août et octobre 2020, Don’t Breathe 2 bénéficie toujours de la présence imposante de Stephen Lang dans le rôle du vieux marine aveugle qui se révèle être une véritable machine à tuer. Malheureusement, les scénaristes ont eu la mauvaise idée de lui coller dans les pattes une adolescente qu’il cherche absolument à protéger. Dès lors, cette suite entre en contradiction avec le précédent opus et tente de faire de l’aveugle un héros, là où il était présenté comme un tueur implacable et un monstre sanguinaire dans le premier volet. Certes, le personnage n’est toujours pas sympathique dans cette suite, mais les auteurs le confrontent à la lie de l’humanité, ce qui tend à édulcorer ses propres fautes.
Rodo Sayagues n’a pas tenté de mettre de l’eau dans son vin puisque l’ambiance générale du film est très sombre et que tous les personnages sont des êtres pervers, uniquement intéressés par la satisfaction immédiate de leurs désirs primaires. Pourtant, il ne suffit pas de collectionner tous les travers de l’humanité pour réaliser un film qui tient la route. Ici, le défaut principal du scénario vient justement de cette accumulation insensée de twists qui finissent par décrire une humanité abjecte.
Une action violente gâchée par un manque de lisibilité
Ainsi, dans Don’t Breathe 2, le spectateur est amené à côtoyer des kidnappeurs d’enfants, qui sont aussi des trafiquants d’organes, tandis que la gamine se livre à un parricide sans que cela semble être extraordinaire. A force d’excès en tous genres, le long-métrage s’effondre de lui-même, d’autant que les retournements de situation en question sont invraisemblables. Le spectateur aura tout loisir de se poser un nombre conséquent de questions sur la crédibilité d’une telle intrigue, sans jamais trouver de réponses.
© 2021 Ghost House Pictures – Bad Hombre – Sony Pictures Worldwide Acquisitions (SPWA). Tous droits réservés.
En ce qui concerne la réalisation, Rodo Sayagues tente d’imiter à plusieurs reprises le style très fluide de son pote Fede Alvarez, notamment dans sa captation de l’espace domestique. Cela donne quelques beaux plans séquences virtuels au cœur de la maison, plutôt en début de métrage. Une fois que l’intrigue diverge et que le film devient avant tout un produit tourné vers l’action, Sayagues semble moins à l’aise, notamment lors du découpage de ses séquences punchy. Certaines cascades ne sont pas bien exploitées et le spectateur est parfois perdu lors des affrontements. Du coup, la fameuse violence typique de la saga se trouve souvent désamorcée par une lisibilité relative.
Don’t Breathe 2, une suite décevante qui n’a pas résisté à la crise post-Covid
Face à Stephen Lang, assez monolithique, on peut regretter le manque de charisme de la jeune Madelyn Grace, tandis que les autres membres du casting semblent inexistants, tout comme la psychologie de leurs personnages. Entièrement voué à une efficacité immédiate qui n’est jamais vraiment atteinte, Don’t Breathe 2 est donc une sacrée déception par rapport à l’original qui se suffisait à lui-même.
Aux Etats-Unis, cette suite a nettement moins performé que le précédent (32,6 M$ contre 90 M$ pour le premier), mais le contexte post-Covid n’a clairement pas favorisé son succès. A Paris, le métrage est sorti fin août 2021 dans 8 salles et ne décroche que 127 entrées lors de sa première séance de 14h. Toutefois, son premier jour est un peu plus valeureux avec 7 557 spectateurs dans 184 cinémas, ce qui lui octroie une bonne moyenne de 41 spectateurs par écran, à une époque où les salles sont désespérément vides. Au bout d’une semaine, le thriller a séduit 54 405 ados, soit moitié moins que son prédécesseur.
Lors de sa deuxième semaine parisienne, Don’t Breathe 2 s’est écroulé de plus de 57% de ses entrées et a fini sa carrière francilienne à 34 122 aveugles. En France, la chute est encore plus marquée avec un effondrement de 60% en deuxième semaine et un total de 95 053 entrées, soit trois fois moins que le premier volet. Outre le contexte de crise du cinéma, le film n’a visiblement pas convaincu les spectateurs. Malgré une scène post-générique qui laisse augurer une suite, on n’est vraiment pas pressé de la découvrir.
Critique de Virgile Dumez
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