Descente aux enfers : la critique du film (1986)

Drame, Thriller | 1h28min
Note de la rédaction :
5/10
5
Descente aux enfers, l'affiche

  • Réalisateur : Francis Girod
  • Acteurs : Sophie Marceau, Claude Brasseur, Hippolyte Girardot, Betsy Blair, Marie Dubois
  • Date de sortie: 05 Nov 1986
  • Nationalité : Français
  • Scénario : Francis Girod et Jean-Loup Dabadie d'après un roman de David Goodis
  • Compositeur : Georges Delerue
  • Producteur : Ariel Zeitoun
  • Distributeur : AAA
  • Éditeur vidéo : Proserpine (VHS) / Studiocanal (DVD)
  • Box-office France / Paris-périphérie : 1 039 234 entrées / 250 462 entrées
  • Budget : 27 millions de francs
  • Crédits affiche : © 1986 Studiocanal / Affiche : Philippe. Tous droits réservés.
Note des spectateurs :

Assez ennuyeux, Descente aux enfers est un thriller sensuel qui ne parvient jamais à trouver son sujet. Heureusement que le charme de Sophie Marceau agit.

Synopsis : Un couple formé par un ancien écrivain de quarante ans qui a sombré dans l’alcoolisme, et une belle jeune femme de vingt ans sa cadette, bat de l’aile. Ils se retrouveront après un événement dramatique, survenu lors d’un séjour à Haïti.

L’adaptation très polar très sombre de David Goodis

Critique : Sur le papier, Descente aux enfers (1986) avait toutes les chances de devenir un polar de référence. Tout d’abord, il s’agit de l’adaptation d’un roman noir de David Goodis datant de 1955 et intitulé The Wounded and the Slain, traduit en français à partir de 1977. L’auteur, par sa noirceur absolue, n’a eu de cesse d’attirer les cinéastes, sans qu’aucun ne parvienne vraiment à retranscrire l’atmosphère de ses écrits.

Au vu de son passé en matière de films sombres et grinçants (Le trio infernal, René la canne, L’état sauvage), le réalisateur Francis Girod semblait le candidat idéal pour donner enfin une vraie dimension cinématographique à l’univers torturé de l’écrivain. Il est aidé ici par Jean-Loup Dabadie qui n’est pas non plus un novice. Enfin, au casting, Girod dispose de deux stars de l’époque, un Claude Brasseur au sommet de sa carrière, et une Sophie Marceau qui s’est imposée en seulement quelques rôles marquants.

Un couple de stars qui a fait jaser

A l’époque, beaucoup soulignèrent toutefois l’incongruité de retrouver la juvénile Sophie Marceau dans les bras de Brasseur, d’autant que les deux complices ont été père et fille dans La Boum 1 et 2 (Pinoteau, 1980-1982). Mais peu importe finalement puisque les deux œuvres sont radicalement différentes et que l’écart d’âge entre les deux protagonistes principaux fait partie intégrante de l’intrigue.

Nous suivons donc ici l’errance touristique d’un couple dans l’île d’Haïti. Outre le décalage évident entre les deux amants, on nous suggère assez rapidement que l’homme est rongé par l’alcool, tandis que la jeune femme s’avère frigide. Pourtant, le réalisateur ne cesse de s’attarder sur les formes généreuses d’une Sophie Marceau à la beauté incandescente. Elle ne peut que déclencher le désir auprès des hommes qui les entoure.

Le meurtre, meilleur ciment d’un couple ?

Toutefois, l’intrigue tourne essentiellement autour du meurtre commis par Claude Brasseur sur un autochtone agressif. Ce crime sanglant (qui symboliquement macule le costume blanc de Brasseur) va déclencher une spirale infernale, avec notamment du chantage, mais aussi des révélations sur le passé de Marceau. Dès lors, le fossé qui séparait le couple va se combler peu à peu et le meurtre sera un ciment inattendu pour ces deux êtres à la dérive.

Si l’histoire est en elle-même plutôt correcte, elle ne bénéficie pas d’une réalisation suffisamment dynamique pour passionner. Même si tout le monde semble impliqué dans le projet, quelque chose ne fonctionne pas dans ce long-métrage assez ennuyeux, comme touché par la torpeur liée à la chaleur haïtienne. Sans doute conscient que l’ensemble du film ne tiendrait qu’à son atmosphère, Girod insiste beaucoup sur la chaleur, sur l’envers de la carte postale – il n’hésite pas à filmer les bas-fonds moins touristiques – mais pour autant, on a le sentiment de suivre les malheurs de privilégiés au cœur d’un pays qui connaît réellement la souffrance et la misère.

Plusieurs sujets effleurés, aucun réellement traité

Sorte de version ratée des Orgueilleux (Allégret, 1953), Descente aux enfers reste systématiquement en surface de son sujet. Ni franche critique du néo-colonialisme économique, ni film noir intense, ni analyse profonde des problèmes de couple, le long-métrage navigue entre ces différentes thématiques sans jamais en creuser aucune.

Cela n’a pourtant pas empêché le film de franchir la barre symbolique du million d’entrées sur tout le territoire, confirmant le pouvoir d’attraction des deux vedettes principales. Il s’agit en tout état de cause du dernier film de Francis Girod à tutoyer les sommets, avant une fin de carrière nettement plus décevante. En ce sens, Descente aux enfers peut être vu comme la fin d’une époque pour le cinéma français.

Box-office

Sorti le 5 novembre 1986, Descente aux enfers était un film important pour le distributeur AAA (Highlander, Tenue de soirée, 3 hommes et un couffin, Fort Saganne, La Balance, Les compères). L’année 86 avait été périlleuse pour le distributeur qui avait subi des échecs importants : Mort un dimanche de pluie, Sauve-toi Lola, La femme secrète, L’unique, L’amant magnifique

Avec 15 835 entrées dans 42 salles, le thriller sensuel n’avait aucune concurrence face à lui, profitant d’une semaine durant laquelle aucune autre nouveauté n’était programmée. Il arrive donc largement en tête, avec 125 507 entrées sur Paname. Le film profitait d’un mardi férié, mais la crise du cinéma qui s’accentuait n’en faisait pas un succès évident. En deuxième semaine, la production d’Ariel Zeitoun décrochait de 50%, avec 67 000 tickets pour le couple sulfureux Marceau/Brasseur. Faute d’un bon bouche à oreille, il dégringolait à 33 000 spectateurs la semaine suivante. 16 976 entrées en 4e semaine… En 7e semaine, il en était réduit à 1 717 entrées sur deux écrans parisiens (UGC Normandie, Paramount Opéra), pour un total de 250 462 entrées. La province lui sera plus clément puisqu’il parviendra à dépasser de justesse le million.

Pour les curieux, Descente aux enfers était présent dans 19 cinémas, sur Paris intra-muros en première semaine : le Marignan Pathé, l’UGC Normandie, le Fauvette, Le Galaxie, le Forum Cinémas, le Ciné Beaubourg, l’UGC Gare de Lyon, le 3 Secrétan, le Mistral, le Convention St. Charles, Paramount Opéra, l’UGC Montparnasse/Danton, le Rex, Les Maillots, le Nation, le Wepler Pathé, le Montparnasse Pathé, l’Impérial Pathé.

Quant à la situation financière de AAA, elle s’améliorera en fin d’année avec Mauvais sang de Carax, avec Juliette Binoche, et surtout Le nom de la rose d’Annaud, qui sera un triomphe avec 4 959 000 spectateurs.

Voir le film en VOD

Critique de Virgile Dumez

Les sorties de la semaine du 5 novembre 1986

Descente aux enfers, l'affiche

© 1986 Studiocanal / Affiche : Philippe. Tous droits réservés.

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