Benvenuta : la critique du film (1983)

Drame, Romance | 1h45min
Note de la rédaction :
7,5/10
7,5
Benvenuta, l'affiche

  • Réalisateur : André Delvaux
  • Acteurs : Fanny Ardant, Vittorio Gassman, Françoise Fabian, Mathieu Carrière, Claire Wauthion
  • Date de sortie: 07 Sep 1983
  • Nationalité : Belge, Français, Italien
  • Titre original : Benvenuta
  • Titres alternatifs : Das anonyme Bekenntnis (Allemagne) / Cartas de Amor (Portugal, Brésil)
  • Année de production : 1983
  • Autres acteurs : Philippe Geluck, Anne Chappuis, Armando Marra, Renato Scarpa, Franco Trevisi, Turi Giuffrida, Goddart, Franco Angrisano, Tamara Triffez, Beatrice Palme
  • Scénariste : André Delvaux d'après le roman de Suzanne Lilar
  • Directeur de la photographie : Charles Van Damme
  • Compositeur : Frédéric Devreese
  • Monteur : Albert Jurgenson
  • Producteur : Jean-Claude Batz
  • Sociétés de production : UGC, Europe 1, FR3 Cinéma, La Nouvelle Imagerie, Opera Film Produzione, Ministère de la Communauté française de Belgique
  • Distributeur : Europe 1 – UGC
  • Éditeur vidéo : UGC Vidéo (VHS) La Vie est Belle (DVD, 2011)
  • Date de sortie vidéo : 3 mai 2011 (DVD)
  • Box-office France / Paris-périphérie : 118 756 entrées / 67 777 entrées
  • Box-office nord-américain / monde : -
  • Budget : -
  • Classification : Tous publics
  • Formats : 1.66 : 1 / Couleurs (Eastmancolor) / Son : Stéréo
  • Festivals et récompenses : Montréal World Film Festival 1983 : Prix spécial du jury / Chicago International Film Festival 1983 : en compétition officielle / César 1984 : 1 nomination dans la catégorie Meilleur Film francophone
  • Illustrateur / Création graphique Benjamin Baltimore © Tous droits réservés / All rights reserved
  • Crédits : © 1983 UGC, Europe 1, FR3 Cinéma, La Nouvelle Imagerie, Opera Film Produzione, Ministère de la Communauté française de Belgique © Tous droits réservés / All rights reserved
Note des spectateurs :

Benvenuta est une œuvre rigoureuse, esthétiquement superbe et ambitieuse qui ravit davantage l’esprit qu’il ne suscite d’émotions. Il s’agit tout de même d’une belle réussite au cœur du cinéma complexe d’André Delvaux.

Synopsis : Jeanne, une romancière vivant à Gand, écrivit jadis la chronique scandaleuse d’un amour, celui de Livio et Benvenuta. Un jeune scénariste tente d’en découvrir les détails pour en faire un film. Au contact du jeune homme et au gré de ses confidences ou de ses mensonges, Jeanne revit cette passion absolue, réelle ou inventée.

Le réalisme magique d’André Delvaux à l’œuvre

Critique : Esthète, pianiste et également pionnier d’un vrai cinéma belge, André Delvaux a été révélé au public et surtout aux critiques avec son second long-métrage intitulé Un soir, un train (1968), porté par le couple Yves MontandAnouk Aimée. Pour André Delvaux, il s’agissait de faire entrer le fantastique et l’onirisme au cœur du quotidien. Il a ainsi pu développer l’idée de créer un « réalisme magique » qu’il n’a eu de cesse d’explorer dans ses œuvres suivantes dont font partie notamment Rendez-vous à Bray (1971), Belle (1973) et également Benvenuta (1983).

A chaque fois, le cinéaste s’appuie sur un matériau littéraire solide. Pour Benvenuta, il adapte à l’écran un roman La confession anonyme de Suzanne Lilar publié initialement en 1960 et réédité en 1980. Ce livre de confessions d’une femme amoureuse était le terreau parfait pour André Delvaux qui en a même complexifié les enjeux en introduisant une narration plus tortueuse. Ainsi, le film raconte à la fois la rencontre entre un scénariste (Mathieu Carrière) et une romancière cloitrée chez elle (excellente Françoise Fabian) et l’histoire fictive (ou non ?) de l’amour inconditionnel d’une femme (magnifique Fanny Ardant) et d’un vieux séducteur italien (charismatique Vittorio Gassman).

Benvenuta, un jeu narratif subtil et complexe

Très rapidement, le spectateur est amené à jongler entre différents niveaux de narration puisque la réalité et la fiction ne cessent de se recouper. Pire, il y a également l’inclusion de flashbacks à l’intérieur du récit fictionnel, tandis que certains passages basculent carrément dans le fantastique avec intrusion de personnages morts au sein du dialogue entre vivants. Bref, André Delvaux s’amuse ici à explorer tous les possibles narratifs et il le fait avec beaucoup de brio puisque le spectateur est déstabilisé, certes, mais jamais perdu. On sent donc ici toute la méticulosité d’un auteur qui était effectivement connu pour son obsession des détails.

Benvenuta, jaquette DVD

© 1983 UGC, Europe 1, FR3 Cinéma, La Nouvelle Imagerie, Opera Film Produzione, Ministère de la Communauté française de Belgique / © 2011 La Vie est Belle Films Associés. Tous droits réservés.

Outre ce brio scénaristique, Benvenuta fait aussi preuve d’un travail esthétique de premier plan. Confrontant deux cultures très différentes (l’esprit flamand et l’Italie), André Delvaux semble tout de même plus à l’aise lorsqu’il décrit avec amour la ville de Gand que lorsqu’il se rend en Italie où il n’échappe pas toujours aux clichés. On adore notamment tout le travail effectué sur la photographie dans la partie belge où l’on retrouve la beauté des éclairages de la peinture flamande. Cela est moins pertinent dans la partie italienne, heureusement plus courte. On fera d’ailleurs le même reproche quant à l’interprétation, assez inégale par la faute d’une coproduction qui imposait certains noms sur l’affiche.

Un couple central malheureusement mal assorti

Alors que le jeu intériorisé de Fanny Ardant correspond parfaitement à son personnage, on reste davantage réservé quant à la faconde développée par Vittorio Gassman, sans aucun doute trop vieux pour le rôle, même si l’écart d’âge est bien mentionné dans les dialogues. En fait, malgré tous les efforts d’André Delvaux, on a bien du mal à croire en cette histoire d’amour fou entre deux acteurs dont l’alchimie ne fonctionne pas tout à fait. C’est sans aucun doute le gros point faible d’une œuvre par ailleurs exigeante et brillante sur le plan formel.

Finalement, Benvenuta doit être vu comme un long-métrage purement intellectuel qui échoue à transmettre la passion de ses personnages, mais qui ne cesse de susciter l’imaginaire littéraire du spectateur à travers des dialogues très écrits et particulièrement brillants. Aucunement destiné au grand public – comme le reste de la filmographie d’André Delvaux par ailleurs – Benvenuta saura séduire les amateurs d’un cinéma d’auteur européen exigeant et qui s’adresse avant tout à un auditoire épris de culture. Les autres risquent bien d’être éconduits par la rigueur même de sa réalisation et la complexité de sa narration alambiquée.

Un petit tour dans les salles françaises

Sorti dans les salles françaises le 7 septembre 1983, Benvenuta a pu disposer d’un parc de 11 salles sur la capitale, réalisant 22 373 entrées lors de sa semaine d’investiture pour une 11ème place hebdomadaire. Il multipliera par trois sa mise de départ.

Sur la France entière, Benvenuta arrive à percer à la 17ème place du classement la semaine de sa sortie avec 31 175 amoureuses dans les salles. La septaine suivante, le drame romanesque réunit encore 24 781 amants supplémentaires et, en semaine 3, il émarge à 16 406 retardataires. La suite se fait dans les marges des classements avec un résultat final à 118 756 entrées. Très loin donc des plus beaux succès du cinéaste qui, généralement, générait le double, voire le triple d’entrées.

Sorti en VHS chez UGC en 1984 et en DVD, en 2011, Benvenuta est méconnu des cinéphiles. Il mérite pourtant l’attention des cinéphiles exigeants, malgré les limites évoquées ci-dessus.

Critique de Virgile Dumez

Les sorties de la semaine du 7 septembre 1983

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Benvenuta, l'affiche

© 1983 UGC, Europe 1, FR3 Cinéma, La Nouvelle Imagerie, Opera Film Produzione, Ministère de la Communauté française de Belgique / Affiche : Benjamin Baltimore. Tous droits réservés.

Biographies +

André Delvaux, Fanny Ardant, Vittorio Gassman, Françoise Fabian, Mathieu Carrière, Claire Wauthion

Mots clés

Cinéma belge, Les histoires d’amour malheureuses au cinéma, L’Italie au cinéma

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