Avec Aline, Valérie Lemercier pose un regard tout à fait personnel et malicieusement inattendu sur l’univers pailleté de la célébrissime Céline Dion. Au programme, tendre ironie et fabuleuse performance d’actrice.
Synopsis : Québec, fin des années 60, Sylvette et Anglomard accueillent leur quatorzième enfant : Aline. Dans la famille Dieu, la musique est reine et quand Aline grandit on lui découvre un don, elle a une voix en or. Lorsqu’il entend cette voix, le producteur de musique Guy-Claude n’a plus qu’une idée en tête… faire d’Aline la plus grande chanteuse au monde. Epaulée par sa famille et guidée par l’expérience puis l’amour naissant de Guy-Claude, ils vont ensemble écrire les pages d’un destin hors du commun.
L’énorme pari de Valérie Lemercier à 23 millions d’euros
Critique : Pour sa sixième réalisation, Valérie Lemercier s’expose derrière et devant la caméra pour nous faire partager, entre bienveillance et fascination, le destin de l’une des plus grandes voix de la musique populaire, de la cabane perdue au fond des bois de son grand-père aux palaces de Las Vegas. Un biopic fantasmé aux allures de conte de fées, jamais parodique, qui tire toute sa saveur du décalage incroyable entre la petite fille non désirée et son statut de star planétaire.
Avec Brigitte Buc, sa fidèle coscénariste, Valérie Lemercier mixe habilement candeur et clairvoyance et toutes deux peuvent s’enorgueillir d’avoir tracé le portait touchant mais jamais mièvre d’une femme authentique et simple qui, accueille avec la même autodérision et le même humour les honneurs de ses admirateurs ou les critiques de ses détracteurs. Le scénario ne se contente de mettre le doigt sur cette singulière sagesse. Il en cherche les raisons à travers cette famille fantasque débordante d’amour et de vitalité, capable de déployer un soutien sans faille autour de cette petite dernière que plus personne n’attendait, condamnée, faute de place dans la maison, à dormir dans un tiroir durant les premiers mois de sa vie et qui s’avère être dotée d’un don exceptionnel.
Portée par un casting québécois haut de gamme, cette smala vibrionnant constitue le cœur battant de ce qui est avant une histoire d’amour romanesque.
Entre vérité et fiction, Lemercier privilégie le personnel
Hormis les événements primordiaux (Concours de l’Eurovision, cérémonie des Oscars), le récit fait le choix de ne pas s’attarder sur les détails de la carrière de la chanteuse. Entre vérité et fiction, il privilégie les moments-clés de sa vie personnelle, faisant ainsi partager au spectateur des scènes savoureuses, essentiellement dominées par la spontanéité et le franc-parler de l’épatante Danielle Fichaud (Thérèse rebaptisée Sylvette) et la sensibilité de Sylvain Marcel (Guy-Claude alias René) dont la ressemblance avec René Angelil est stupéfiante et donne toute la mesure du talent des coiffeurs, maquilleurs, costumiers…
La tendre complicité qui la lie à son maquilleur (interprété par un Jean-Noël Brouté craquant) ajoute une note supplémentaire d’humanité dans ce monde du show-biz souvent cruel.
Aline, car Céline est unique
Si Valérie Lemercier réalisatrice a la bonne idée d’envelopper ses personnages dans le cocon d’une mise en scène ample et généreuse, Valérie actrice n’est pas en reste. Pour éviter tout risque de caricature et parce que, affirme-t-elle, Céline il n’y en a qu’une, elle devient Aline, Aline Dieu pour être précis, qu’elle incarne, grâce à d’habiles subterfuges techniques de sa petite enfance à aujourd’hui.
Jouant de cet humour à la fois naïf et corrosif qui a fait sa renommée, elle compile avec jubilation les différentes étapes plus ou moins heureuses de la transformation de cette gamine gauche, pas vraiment jolie et aux dents de travers, en diva internationale. Un peu plus tard, sa longue silhouette élancée et quelques trucages géniaux auront tôt fait de lui permettre de se glisser au millimètre près dans la peau d’une Céline plus vraie que nature, tandis que l’impressionnante performance vocale de Victoria Sico nous propulse directement dans l’univers musical de l’interprète francophone la plus emblématique.
Le pouvoir de l’amour
Qui peut vivre sans amour ? Chante Céline Dion. Personne, lui répond Valérie Lemercier qui non seulement réussit parfaitement son hommage à celle qui la fascine par sa capacité à distiller l’amour envers et contre tout, mais parvient aussi à nous rendre heureux.
Critique de Claudine Levanneur