Paul Anderson, devenu en cours de carrière Paul W.S. Anderson pour ne pas être mépris avec l’autre Paul Anderson, alias Paul Thomas Anderson, est un réalisateur britannique spécialisé dans la série B à gros budget. Il est connu pour Event Horizon et Resident Evil, et ses expérimentations visuelles volontairement décérébrées. Un style adroit, mais kitsch, superficiel mais efficace.
Paul W.S. Anderson est un cinéaste mal considéré. Il a développé sur trois décennies un type de divertissement pétaradant aux scénarios rachitiques et invraisemblables qui ont fait de lui le parangon de la série B stylée, mais sans substance. Cet aspect se répète de blockbusters en blockbusters, ses films ayant tendance à traîner les mêmes tares ou qualité, ressemblant tous à de grosses séries B foutraques, où l’auteur s’amuse comme un gamer.
Un précurseur dans l’adaptation de jeux vidéo
Né en 1965 en Angleterre, Paul W.S. Anderson réalise un premier long qui défraie la chronique dans son pays et s’attire de très mauvais papiers chez les Britanniques : Shopping avec ses casseurs de vitrines, Jude Law, Sean Pertwee et Sadie Frost, ne montre pas le bon exemple à la jeunesse locale. De cette production indépendante, il ressort un véritable talent que les Américains – qui découvrent le film à Sundance – vont s’approprier à l’occasion de l’adaptation du jeu vidéo Mortal Kombat. A l’époque, ce type de source d’inspiration était rare, mal vu, mais le film avec Christophe Lambert connaît un vrai succès commercial.
Paul W.S. Anderson, le gamer qui aimait la science-fiction
Obsédé par la science-fiction, il abandonne la franchise des Mortal Kombat pour une œuvre de science-fiction qui lui tient à cœur, Soldier, mais Kurt Russell laissera la production en suspens pendant deux ans, laissant le temps au cinéaste de livrer un autre objet de S.F., Event Horizon, le vaisseau de l’au-delà. Ce classique de l’épouvante, qui aurait pu n’être qu’une énième version de Alien, s’avère être une version méphistophélique de L’exorciste dans l’espace, à l’échelle d’un vaisseau fantôme. Ambitieux, avec un budget généreux de la part de Paramount, Event Horizon est lourdement censuré par les pontes de la Paramount qui détestent le montage proposé en screen test aux Etats-Unis ; son montage originel devient l’objet de fantasme pour les fans de ce morceau d’angoisse qui ne cesseront de grossir au fil des décennies. Bide à sa sortie, ce space opera infernal est parvenu à relancer l’intérêt autour du genre horrifique aux USA. La décennie 90 fut marquée par une absence de productions d’épouvante d’envergure, hors Dracula, Frankenstein, et Wolf qui s’adressaient à une large audience. Les effets spéciaux de ce film particulièrement effrayant demeureront pendant longtemps une référence dans la science-fiction.
Renforcé et affaibli par cette expérience mi-figue mi-raisin, Paul W.S. Anderson enchaîne enfin avec ce qui deviendra le plus gros revers de sa carrière. Il parvient, effectivement, à réaliser enfin Soldier, avec Kurt Russell. L’acteur a pris le temps de se mettre en forme pour le tournage. Cette production qui contient la génétique même de la future filmographie d’Anderson est évidemment un échec commercial cinglant qui condamne le film à une exploitation en direct-to-video en dehors des Etats-Unis.
Paul W.S. Anderson, l’homme qui ressuscita la figure du mort-vivant au cinéma
Après un détour par un pilote pour une série télévisée qui ne se fera pas et l’impossibilité de tourner Course à la mort, remake de Death Race 2000 qui lui tient à cœur, Paul W.S. Anderson revient en 2002 avec une série B à budget bien plus raisonnable que celui de ses deux films de science-fiction précédents. Il s’agit de Resident Evil, increvable franchise sur deux décennies qui va relancer la mode du film de zombies. La figure du mort-vivant avait totalement disparue dans les années 90, devenue ringarde pour toute une génération préférant les tueries adolescentes des Scream et autre Urban Legend. Mais soudainement, briqué, aseptisé par la réalisation clinquante et numérique de Paul W.S. Anderson, le mort-vivant va revenir en force sous l’impulsion du jeu vidéo. Le succès de Resident Evil est mondial et cette nouvelle adaptation va susciter des convoitises. En Grande-Bretagne, 28 jours plus tard de Danny Boyle surfe sur la vague, Zack Snyder réalise un remake du Crépuscule des morts vivants de Romero, avec Dawn of the Dead (2004), et George A. Romero lui-même peut enfin sortir de sa retraite forcée pour livrer le quatrième segment de sa saga fondatrice, Land of the Dead (2005).
Paul W.S. Anderson et Milla Jovovich, une aventure commune
Resident Evil permet au cinéaste britannique de diriger pour la première fois sa future épouse, Milla Jovovich. Inséparables, ils se feront complices de productions ludiques où l’action et les effets spéciaux numériques, ainsi que l’humour, prennent le dessus sur le premier degré. Paul W.S. Anderson produira les épisodes deux et trois de Resident Evil, et réalisera les quatrième volet, (Afterlife, 2010), le cinquième numéro (Retribution, 2012), et évidemment le chapitre final (2016). Ensemble, ils seront aux manœuvres d’une adaptation surréaliste des Trois Mousquetaires en 2011, que l’on peut considérer comme un nanar fun. Enfin, en 2020, Anderson dirige Milla Jovovich dans Monster Hunter, nouvelle adaptation de jeu vidéo qui doit affronter la crise du coronavirus et surtout une absence cruelle de scénario.
Un crossover
En dehors de sa collaboration fructueuse avec son épouse, Paul W.S. Anderson tourne en 2004 le spinoff de Alien et de Predator, alias Alien vs Predator. On appellera ce croisement racé chez les extra-terrestres un crossover. Anderson y manifeste toute la futilité de son cinéma, et déstabilise la critique par son refus d’insuffler le moindre degré de violence ou la moindre once de peur au film, comme s’il réfutait toute idée de psychologie et de maturité dans son travail. C’est toutefois un petit hit de plus dans son cinéma et une suite sera mise en place pour 2007. Ecouter son interview sur le film ici.
Un remake
En 2008, le cinéaste peut enfin accomplir le remake de Death Race, alias Course à la mort (l’ancêtre du Prix du danger et de Running Man, avec David Carradine et Sylvester Stallone). Suivant la mode des relectures des films des années 70-80 qui débordait de vitalité durant la décennie 2000, le cinéaste livre une série B bordélique avec Jason Statham en tête d’affiche. C’est un franc succès et la naissance d’une nouvelle franchise de DTV qu’Anderson se fera un plaisir de produire.
L’un des pires films de Paul W.S. Anderson surviendra en 2014, avec la romance catastrophe Pompéi. Le péplum en images de synthèse dégouline d’effets spéciaux sur fond vert et l’échec est à la fois public et critique. Le film mettait en scène notamment Kit Harington et Emily Browning. Un choix risqué pour une œuvre au budget proche des 100 millions de dollars.
Paul W.S. Anderson, un auteur du kitsch dans l’antichambre d’Hollywood
Le cinéma de Paul W.S. Anderson est mal-aimé car volontairement dans le refus d’une quelconque évolution, un peu à l’image de celui de Renny Harlin. Artificiel, récréatif, mais jamais sérieux, son travail est le symbole même d’un cinéma en 3D qui veut en mettre plein la vue sans se saisir pleinement de ses moyens. Anderson restera contre vents et marées fidèle à un style singulier qui sera le sien, devenant de ce fait un véritable auteur du nawak de supermarché. Ses prouesses visuelles n’en demeurent pas moins souvent brillantes et même dans la marge hollywoodienne, il reste une figure attachante d’un cinéma commercial pompier qui aura habillé deux décennies de grosses séries B.