Note des spectateurs :

Madonna, ses 15 meilleurs albums, du moins bon au meilleur. A l’occasion de son passage en France pour le Celebration Tour, les 12, 13, 19 et 20 novembre, retour sur 40 ans d’albums, rarement girlie, souvent expérimentaux et originaux, toujours passionnants à redécouvrir après l’orage et le tonnerre qui ont secoué leurs sorties surmédiatisées.

15 Hard Candy

Hard Candy est la réponse de Madonna et Warner à l’insuccès de la chanteuse après la guerre en Irak qui a suivi l’effondrement du World Trade Center. La star s’y s’était opposée, précipitant un boycott irrémédiable d’une bonne moitié de l’Amérique et de ses médias conservateurs qu’elle ne regagnera jamais.

Vu comme un projet urbain opportuniste de par sa variété de producteurs, Hard Candy est surtout un projet mal habillé (pochette et marketing rose d’un mauvais goût crasse), mais réalisé dans une cohérence musicale évidente. Titres évolutifs (She’s not me, Incredible), tubes planétaires (Give it 2 Me avec Pharrell Williams et surtout 4 Minutes avec Timberlake et Timbaland, l’un des ses morceaux les plus streamés et son dernier numéro 1 aux USA), tube non exploité (Beat Goes On, feat Kanye Wets), ballade savoureuse (Miles Away), Hard Candy est souvent solide, mais surtout victime du divorce entre Madonna et Warner qui n’en exploiteront jamais le potentiel. La chanteuse décide de se focaliser sur sa tournée, le Sticky & Sweet Tour. Sa plus rentable.

14 I’m Breathless

L’album I’m Breathless est inspiré par le blockbuster Dick Tracy (100M$ au box-office américain en 1990) de Warren Beatty. Il contient le tube Vogue, numéro 1 sur bien des marchés et manifeste à la gloire de la Ciccone qui s’illustrait par l’un de ses tubes mythiques. Dans cet opus de transition, édité un an et deux mois après Like a Prayer, seulement deux singles seront exploités (Hanky Panky est le second). L’ensemble jazzy aux sonorités vintage n’était pas commercial, ce qui n’a pas empêché le projet de bien se comporter pendant l’été 1990. Le titre Sooner or Later, composé par Stephen Sondheim, remportera même un Oscar en 1991, peu après la sortie de la compilation The Immaculate Collection. La référence en matière de Greatest Hits.

13 MDNA

L’album le plus commercial de Madonna dans les années 2010 manque de cohérence et trébuche sur son incapacité à faire sens. Plaisant à l’oreille, MDNA est formaté pour faire un carton en concert avec une domination de titres électro-dance entre le sombre et puissant Gang Bang (dont on retrouve Mika dans les crédits) et l’électrisant MDNA. La fin de l’album est plus écrit (Masterpiece), d’une narration plus complexe (Love Spent, Falling Free).

Le duo avec Nicki Minaj, I Don’t Give A avait tout d’un tube. Madonna sans maison de disques, appartenant désormais à l’écurie Live Nation, fera l’erreur de lui préférer Give Me All Your Luvin’ pour la scène du Super Bowl, et Turn Up the Radio. Une erreur d’appréciation qui lui coûtera bien des streams.

12 Bedtime Stories

En septembre 1994, Madonna sort encore un titre porteur, Secret. Le morceau marque une orientation plus R&B et mid-tempo et trouvera une belle seconde place en France. Malheureusement, l’album qui l’accompagne ne marquera aucune cohérence avec ce savoureux morceau de Dallas Austin. L’ensemble bien trop disparate s’étiole dans son inconsistance, malgré des fulgurances : Inside of Me, Love Tried to Welcome Me, Sanctuary, Betime Story que Björk a écrit car Nellee Hooper participait à la production du LP…

Les Américains en retiendront le tube Take a Bow qui fut énorme du côté de l’Atlantique grâce à la touche Babyface. Madonna, pour sa part, expie sa rage avec Human Nature, coloscopie musicale qu’elle fera passer au forceps auprès de ses fans en érigeant à chaque tournée cette chanson comme un doigt d’honneur à l’Amérique puritaine et à ses détracteurs qui se sont acharnés contre elle. L’insuccès commercial de ce titre hip hop aujourd’hui validé par tous leur donnera le point à l’époque.

11 Madame X

Belle production, élaborée avec réflexion de la pochette jusqu’à la tournée intimiste dans une poignée de petites salles, avec une vraie vision d’artiste, le projet Madame X voulait célébrer la femme aux 1 000 visages derrière des styles musicaux marqués du X de la pluralité.

Bien fichu, le concept parfois expérimental (Dark Ballet), volontairement éclectique, généra l’indifférence en raison de la paresse des oreilles non habituées à l’effort de devoir écouter autant de diversités. Pour captiver dès la première écoute, à l’ère de l’immédiateté du streaming et du zapping, Madame X et ses détours par la world music, les rythmes latinos, la musique portugaise, le reggaeton, le fado… a du mal à exaucer toutes les subjectivités qui ont au moins de la pop (Looking for Mercy), et de la disco (God Control) pour se raccrocher aux anciennes valeurs musicales de Madonna…

Un très bel OVNI musical.

madonna, pochette de l'album Madame X

Copyrights : Interscope, Polydor

10 American Life

L’album le plus pop-rock de Madonna, essentiellement réalisé par Mirwais, se distingue par sa sonorité rêche et folk. Cette authenticité aurait pu séduire, mais le résultat sombre dans les charts en raison d’un premier single éponyme qui ne convaincra pas. Pis , les Américains se rangent derrière le président américain, le belliqueux et opportuniste George Bush et boycottent pour des raisons patriotiques la Madonna politique. La France sera l’un des seuls territoires à lui faire honneur. La chanteuse arborant une chevelure brune de combat enchaîne les morceaux intimistes ou et les hymnes décoiffants dans leur mélange de rock et d’électro : Nothing Fails, Hollywood, Mother and Father, Intervention, Die Another Day

Madonna dans l’épure offre une convaincante suite à l’album Music, également produit par Mirwais. Sa phase de rébellion par le son n’a pas pris une ride.

9 Rebel Heart

Retour aux sonorités urbaines pour l’album Rebel Heart. Madonna doit rectifier l’inégalité de MDNA et passe énormément de temps sur la production multiple de ce bel objet. Les écritures sont pointues ; les signatures affinées ; les titres copieux… L’album qui avait leaké avant sa sortie très attendu sera un non-événement malgré une tournée à guichets fermés. Le boycott des radios mainstream expliquera sa discrétion dans les charts, mais la réalité des mélodies, des textures et des compositions demeure gagnante pour peu que l’on accepte une production urbaine qui a effacé les hymnes feel-good voulus par le regretté Avicii initialement. Living For Love, Devil Pray, Ghosttown, Illuminati, Iconic, Inside Out, Wash Al Over Me, Messiah… une ouverture certaine pour une nouvelle génération de fans.

8 Madonna / The First Album

Hymne disco-funk à la texture new-yorkaise du début des années 80, Madonna, retitré The First Album après le succès de Like a Virgin, est très marqué par le temps. D’aucuns le trouveront même daté. Mais Lucky Star, Borderline, Burning Up, et évidemment le tube Holiday, ont marqué la carrière d’une Madonna juvénile qui saura revenir régulièrement sur ses primes audaces. Physical Attraction et Think of Me, qui fut samplé par la radio NRJ pour un jingle culte, sont de bien beaux moments aux effluves de nostalgie.

7 Like a virgin

L’album produit notamment par Nile Rogers contient nombre de morceaux trop entendus : Material Girl, Like a Virgin, Into the Groove (dans sa version rééditée post-Recherche Susan désespérément)… Des classiques éternels qui ont touché le public le plus large à cause de leurs diffusions outrancières à la radio et à la télé pendant des décennies… Difficile alors d’avoir du recul sur ces morceaux de tube que l’on a du mal à réécouter avec le même bonheur qu’une vierge. Mais les singles Dress You Up et Angel ont beaucoup de charme, Love Don’t Live Here Anymore, Pretender, Stay brossent une belle émotion à l’instar d’un Physical Attraction sur le premier album. Madonna est devenu un phénomène grâce à cet opus, brouillant à jamais les pistes entre chanteuse, star et idole. L’album du phénomène pour la société américaine.

Madonna dossier discographie les singes

© Les Archives de CinéDweller

6 True Blue

Le plus gros succès de la carrière de Madonna est aussi le plus grand paradoxe de l’artiste devenue super star mondiale : 5 tubes planétaires figurent parmi les plus grands de son illustre répertoire (Live to Tell, La Isla Bonita, Papa Don’t Preach) complétés par 5 titres légers. Cet opus trop entendu qui n’a jamais été complété par la maison disques par des inédits, est aujourd’hui bien maigre si on lui enlève ses singles déjà présents sur des compilations ou sur des playlists. Bref, en 2023, l’album True Blue n’a plus grand intérêt si ce n’est la pochette iconique signée Herb Ritts en format vinyle.

5 Erotica

Erotica n’a pas forcément les meilleures chansons, mais l’album de Shep Pettibone concentre l’une des meilleures productions. D’une cohérence et singularité exemplaire dans la carrière de la chanteuse, ce 5e album étoffe le concept de Madonna comme artiste à albums et abandonne celui d’une faiseuse de tubes en série. L’oriental et sexy Erotica, la musicalité jazzy de la prose sur la fellation Where Life Begins, le dépressif Bad Girl, l’élégance mélodique de Rain, In this Life et ses souvenirs de proches emportés par le sida, l’hymne à la tolérance Why it’s so Hard aux échos d’un Keep it Together… Touyte cette excellence permettrait presque d’oublier quelques titres anecdotiques comme Bye Bye Baby, Words ou Thief of Hearts.

4 Like a prayer

En 1989, Madonna en a marre de servir de la soupe aux gamins (la chanson Who’s Taht Girl, vous remettez?). Elle se réoriente et livre déjà l’album de la maturité. Désormais trentenaire, la madone n’a plus à afficher son visage sur la pochette de son vinyle : un cliché en forme de clin d’œil aux icones rock et psychédéliques des années 60-70 suffira à donner le ton. Dépourvu de vrais tubes dance (les arrangements de Keep it Together et Express Yourself dans leurs versions LP sont trop chiches pour susciter le désir d’onduler), Like a Prayer a pour titre celui d’un single monumental qui a terrassé les ventes de 45 tours en son temps. La guitare de Prince que l’on retrouve sur Act of Contrition a plus d’intensité que sa présence dans le duo Love Song qui ne sera jamais exploité ailleurs que sur la galette comme si cette rencontre musicale était un faux événement.

Les temps forts sont à chercher dans la tristesse poignante de ballades comme Pray for Spanish Eyes, Promise to Try et surtout Oh Father. Madonna n’est jamais aussi authentique que quand elle compose sur son enfance. Le guilleret Cherish en devient revigorant et Dear Jessie, mâtiné de l’euphorie fleurie des Beatles, est une comptine qui prend du sens faisant écho à sa propre enfance, alors qu’il s’agit d’un titre écrit pour la fille de Patrick Leonard, l’un de ses compositeurs et amis de cette époque glorieuse.

3 Music

Le bijou de Mirwais, mais aussi de William Orbit qui poursuit sa collaboration, est un feu d’artifices de sons électroniques sur une composition globalement intimiste. La force atmosphérique de Paradise (Nor for Me) et Nobody’s Perfect, la texture de I deserve it et Gone, la mélancolie d’American Pie, tout synthétise une belle cohérence d’écriture et d’arrangements. Le single Music, Amazing qu’on qualifiera de cousin de Ray of Light et Beautiful Stranger, et l’onduleux Impressive Instant dépotent.

Music est un cocktail d’électro folk et de French Touch, aux sons désormais rétro. On fond de plaisir. Malheureusement, Music , du single à l’album, ne figure plus parmi les préoccupations musicales des auditeurs contemporains. Ce morceau de bravoure semble souffrir du peu de singles proposés par la maison de disques et de la concentration de la star sur la tournée du Drowned World.

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Vignette VOD de Madonna The Confessions Tour

Cover Artwork The Confessions Tour © Warner Bros Records, Maverick Records. All Rights Reserved.

2 Confessions on a Dance Floor

L’un des plus gros succès de la reine de la réinvention paraît à l’aube de ses 50 ans, après plus de 25 ans de carrière. Confessions on a Dance Floor est la réponse aux expérimentations moins commerciales que furent Ray of Light, Music et American Life. Cette production Stuart Price contient également l’un de ses plus grands triomphes en format single, Hung Up.

De ces Confessions naitra la référence dance des années 2000, une chorégraphie musicale enchaînée qui étrille la notion d’âge et redéfinit l’universalité d’un dance floor idéalisé aux influences éminentes, de Moroder aux Pet Shop Boys, Jump, Future Loves, Get Together, Sorry mais aussi le rock I Love New York propulsent la gloire des années 80 bien au-delà du nouveau millénaire.

1 Ray of Light

La réinvention ultime. La madone pécheresse oublie les provocations sous la direction du producteur William Orbit qui signe un flot de rêveries subaquatiques dont ressortent les thèmes de la naissance et de la maternité. Dans cet onirisme lyrique, Ray of Light dégoupille les bombes spirituelles que sont Frozen, The Power of Goodbye, Skin, Sky Fit Heaven… Philosophe, Madonna démarrera 25 ans plus tard la tournée Celebration, avec le 5e extrait de ce classique : Nothing Really Matters. Tout un symbole pour fêter avec le public ses 40 ans de carrière.

Frédéric Mignard

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