BT93, artiste projet à l’histoire atypique, propose un second album, BT2033, qui le pose comme le grand sauveur de nos humeurs. En ces temps de grèves contre la réforme de la retraite, c’est évidemment la playlist de nos marches.
BT93, artiste passé par l’entreprise, retrouve l’envie de changer son monde depuis 2020 et la sortie d’un album de titres composés entre 1989-94, qui plaquait notre passé à une actu présente celle siphonnée par le grand confinement. En 2023, BT93 ose nous projeter dans un avenir, à la fois grandiose, cacophonique, toujours cinématique, celui de son BT2033.
Produit par la fée Sainte Victoire, présente en featuring avec le vertigineux Tu m’as aimé, qui clôt magistralement ce manifeste de 11 titres, BT2033 est la confirmation d’un univers singulier, celui d’un fils des années 80, comme le confirme l’infernal et déjanté Les altruistes, single au son d’un Perez sous ecstasy, ou le premier morceau de l’album. BT93 ouvre en effet cette étrangeté cette biographie musicale et pose le son (musique synthétique des années 80, façon, première moitié de la décennie), et les thèmes de cette épopée intime. Il sera en effet question de l’entreprise (“il manque une dimension aux artistes qui n’ont jamais bossé dans un bureau“), et surtout de cinéma.
BT93 accouche avec BT2033 d’un album profondément cinématique
Ponctué par un instrumental enjoué, comme une invitation à poursuivre le trip (Festival) mais qui arrive un peu trop tôt, l’album est nourri de la dérision et du cynisme bienvenu de BT93 sur le monde du travail, et donc du cinéma, puisqu’il y a officié pendant un certain temps après avoir quitté les tours de la Défense.
Sous son vrai nom de Bernard Tanguy, BT93 a réalisé quatre métrages, dont le moyen métrage (30 minutes) Parenthèse qu’il évoque joyeusement dans son premier morceau. D’ailleurs, il a même participé à la production de Snowboarder (!), La vie au ranch, Sea, No Sex & Sun, Bye Bye Blondie, ou le branché Les Coquillettes pour lequel il retrouvait la réalisatrice Sophie Letourneur.
Bernard Tanguy relate son expérience cinématographique à travers la chanson CNC, où il appelle “à un choc de simplification”, face à la bureaucratie, ironisant en empruntant les mots du président Macron en évoquant la culture d’état. Ce n’est pas le meilleur morceau de l’album, mas cela parlera aux connaisseurs du milieu. Tout aussi axé sur le cinéma, sur un phrasé parlé, Le boulet d’l’art et essai, proposé dans un remix supérieur au single de 2020, possède une dimension musicale plus marquée qui donne une accessibilité autre à ce morceau vraisemblablement triste sur les sans-talents d’un milieu de l’autopromotion entre festivals et réseaux sociaux.
Une collection de bijoux comme morceaux
Beaucoup plus pertinent pour une audience plus large, l’hommage à Truffaut et ses actrices, François I miss you est le morceau coup de cœur qui transgresse l’indépendance brute pour rejoindre les grands noms d’une scène française inépuisable : Dominique A, Bertrand Belin, Le Noiseur… Il faut dire que BT93 a le goût de la mélodie forte. Ventmiglia Despair et sa mélancolie, voire sa désespérance, assume un final de millésime. Les doigts de la main évolue sur une guitare à faire saigner le cœur et interpelle tout aussi brillamment. Enfin le titre promotionnel Sentiment Vague est sans aucun doute le morceau le plus pop et immédiat de ce second opus.
Dans BT2033, Bernard Tanguy multiplie donc les jalons et accomplit un sans-faute que l’on qualifiera d’incontournable.
BT93 et ses SocialDwellings
Label : Dragon Accel / Modulor – Copyrights 2022 Dragon Accel distribué par Modulor
Photo bandeau : © Yann Orhan
Date de sortie : disponible en CD, streaming et achat numérique depuis le 27 janvier 2023