Reboot pas vraiment valeureux, Police Story : Lockdown bénéficie d’un script correct, parfois gâché par une réalisation chichiteuse. Jackie Chan s’avère toutefois convaincant dans un rôle dramatique.
Synopsis : Dans le but de faire sortir de prison un détenu condamné à une longue peine, un homme prend en otage plusieurs personnes dont un policier et sa fille.
Un reboot très différent du reste de la saga
Critique : Annoncé en grande pompe en 2012, Police Story : Lockdown a été survendu comme étant le reboot de la fameuse saga des années 80 qui comptait déjà cinq longs-métrages à son compteur (plus un spin-off). En réalité, comme l’avait déjà plus ou moins fait New Police Story (2004) de Benny Chan, le ton de cette nouvelle œuvre est radicalement différent de la série inaugurée dans les années 80. Ici, non seulement le ton se veut plus sérieux et sombre, mais la structure même de l’intrigue invite à d’autres comparaisons. Il est donc important pour les fans d’occulter ce titre racoleur pour se pencher sur le film lui-même.
Pas vraiment centré sur l’action, Lockdown nous enferme plutôt dans un lieu clos pendant la quasi-totalité de la projection, si l’on excepte quelques flashback qui ont pour vocation d’aérer une intrigue très claustrophobe et d’ajouter quelques pointes d’action. En réalité, le film se réfère plutôt à des œuvres en lieu clos comme Piège de cristal (McTiernan, 1988) ou encore Piège en haute mer (Davis, 1992) avec son intrigue fondée sur une prise d’otages.
Intrigue tortueuse pour réalisation toc
Par contre, l’aspect tortueux du scénario fait davantage songer à la saga Saw (sans les excès horrifiques et gore bien entendu). Ainsi, le spectateur est amené à découvrir progressivement la raison qui a poussé le criminel interprété avec charisme par Liu Ye à prendre ces gens-là en otage. L’histoire qui paraissait simple lors de la première demi-heure se complexifie et dévoile ainsi des ressorts intéressants, même si pas forcément crédibles – on ne voit pas bien l’intérêt notamment de cette prise d’otage spectaculaire de la part du criminel, alors que des enlèvements plus ciblés auraient eu le même impact au vu de ses motivations (que nous ne dévoilerons pas ici).
Si le scénario est donc plutôt correct, Police Story : Lockdown (2013) n’est pourtant pas exempt de défauts. On peut notamment regretter la tendance du réalisateur Ding Sheng à multiplier les effets de manche, parfois au détriment de la spontanéité. Lors des scènes de combat, il effectue un découpage trop cut qui empêche souvent de profiter des chorégraphies. A l’inverse, lors de la séquence finale, très explosive, il choisit de filmer le tout au ralenti comme autrefois Brian De Palma et annihile toute sensation d’adrénaline. Conscient d’avoir une intrigue complexe à gérer, il cherche à donner du rythme aux passages dialogués en ne s’arrêtant que trop rarement sur les visages des intervenants. Là encore, ce choix se fait au détriment de l’émotion dégagée par les acteurs.
Jackie Chan, vieilli mais convaincant dans le drame
Pire, lorsque le drame se noue autour des personnages principaux, le réalisateur a recours à une dramatisation parfois outrancière (par ailleurs typique des productions asiatiques). On a le droit ainsi à une musique alternativement correcte ou sirupeuse, le pire venant des quelques chansons kitsch utilisées qui viennent ruiner l’émotion en quelques secondes. Enfin, signalons que l’esthétique globale du film s’apparente un peu trop à un simple produit vidéo, le réalisateur ne parvenant pas vraiment à sublimer son décor principal, pourtant imposant.
Au milieu de tout ceci, Jackie Chan est plutôt correct. Le petit dragon a compris qu’il n’a plus l’âge d’effectuer des combats complexes ou des cascades dangereuses. Certes, il livre encore un combat efficace en plein cœur du film, mais il préfère désormais se consacrer à perfectionner son jeu dramatique. Il est d’ailleurs plutôt crédible, même si on peut trouver irritant son côté donneur de leçons. Car avec Police Story : Lockdown on est bien face à un produit chinois actuel où toute aspérité semble volontairement lissée. La police n’est jamais critiquée et même les criminels sont des gens de parole, ce qui peut sembler bien angélique. On sent bien qu’il ne faut surtout pas faire de vague.
Un DTV de plus, ni meilleur, ni pire qu’un autre
Au final, Police Story : Lockdown laisse un sentiment mitigé. On saluera l’audace d’un script travaillé et ambitieux, mais on ne peut passer à côté d’éléments plus problématiques comme une réalisation très inégale et une tendance à développer un discours moralisateur un peu irritant. Alors que New Police Story est parvenu à se frayer un chemin jusque dans les salles françaises au mois de juillet 2005, le reboot est resté inédit chez nous jusqu’à sa sortie directement en DVD en février 2017. Au vu de ses modestes qualités artistiques, il ne faut pas vraiment s’en étonner.
Critique de Virgile Dumez